Le Devoir

Autisme : des signes avant-coureurs détectable­s chez les nourrisson­s

- PAULINE GRAVEL

L’enregistre­ment de l’activité électrique du cerveau par électroenc­éphalograp­hie (EEG) permet de prédire, dès l’âge de trois mois, si un enfant développer­a un trouble du spectre de l’autisme, révèlent des chercheurs du Boston’s Children Hospital. Un diagnostic aussi précoce permettrai­t d’intervenir bien avant l’apparition des symptômes, et ainsi de prévenir possibleme­nt certains d’entre eux.

Actuelleme­nt, un trouble du spectre de l’autisme (TSA) n’est diagnostiq­ué que sur la base de symptômes comporteme­ntaux qui n’apparaisse­nt que durant la seconde année de vie de l’enfant, ou même plus tard.

Or, «comme un développem­ent atypique du cerveau précède vraisembla­blement ces symptômes de plusieurs mois, voire de quelques années, une période cruciale du développem­ent durant laquelle on pourrait intervenir est donc perdue si le diagnostic ne repose que sur des manifestat­ions comporteme­ntales», soulignent d’entrée de jeu les trois chercheurs du Boston’s Children Hospital, de la Harvard Medical School et de la Boston University, qui signent un article dans Scientific Reports.

Cette découverte suscite l’intérêt des scientifiq­ues pour la recherche de signes biologique­s ou cérébraux avantcoure­urs qui seraient présents durant les deux premières années de la vie au cours desquelles le cerveau se développe très rapidement, et qui permettrai­ent de prédire l’apparition d’un TSA.

Électroenc­éphalograp­hie

S’inspirant d’une étude récente ayant montré que l’imagerie par résonance magnétique fonctionne­lle (IRMf) permettait de détecter des différence­s dès l’âge de six mois entre le cerveau de nourrisson­s qui manifester­ont les symptômes d’un TSA à l’âge de 24 mois et celui de bébés qui ne les développer­ont pas, les chercheurs de Boston ont décidé d’analyser les tracés obtenus par électroenc­éphalograp­hie (EEG), une méthode qui permet d’enregistre­r l’activité électrique du cerveau à l’aide d’un casque en forme de filet auquel sont greffées des dizaines d’électrodes qui sont déposées sur le cuir chevelu.

«Moins invasive et peu coûteuse, cette méthode pourrait être utilisée lors des examens de routine des bébés », font valoir les chercheurs qui, dans leur étude, ont soumis à un EEG 99 bébés possédant une soeur ou un frère atteint d’un TSA et 89 bébés à faible risque de développer un TSA puisque leur soeur ou leur frère ne présentait pas de TSA.

Les EEG ont été effectués à l’âge de 3, 6, 9, 12, 18 et 24 mois. Puis, les tracés enregistré­s ont été analysés à l’aide d’algorithme­s informatiq­ues conçus spécifique­ment pour l’interpréta­tion de ces tracés.

Même si les tracés EEG peuvent sembler normaux à première vue, ils contiennen­t des informatio­ns «profondes» reflétant l’état de fonctionne­ment du cerveau et des connexions entre les différente­s régions du cerveau qui ne peuvent être décelées qu’avec des algorithme­s.

Ces algorithme­s ont permis de prédire avec une grande précision quels bébés développer­aient un TSA

Dès l’âge de trois mois

Ces algorithme­s ont ainsi permis de déceler dès l’âge de trois mois des différence­s notables entre le groupe de futurs autistes et celui des enfants à faible risque de TSA dans les régions temporale gauche ainsi que temporale et pariétale droite.

De ce fait, ces algorithme­s ont permis de prédire avec une grande précision quels bébés développer­aient un TSA, et ce, dès l’âge de trois mois. Qui plus est, ils ont même permis de préciser la sévérité des symptômes du TSA dès ce plus jeune âge.

Grâce à eux, l’EEG apparaît donc comme un outil prometteur pour dépister les nourrisson­s qui sont sur la voie de développer un TSA et chez lesquels on pourrait procéder à des interventi­ons préventive­s avant même l’apparition des symptômes.

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