Le Devoir

Un regain de misogynie

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Ainsi, 30 ans après le meurtre de 14 femmes à l’École polytechni­que de Montréal par Marc Lépine, voilà que l’attentat perpétré par Alek Minassian à Toronto ravive l’inquiétude des femmes. Elles craignent un possible regain de la misogynie agressive après tant d’années d’évolution du féminisme qui a contribué à l’améliorati­on du rapport entre les hommes et les femmes progressan­t vers l’égalité.

C’est l’occasion de nous rappeler que la misogynie, sous les multiples formes qu’elle prend à travers l’histoire, est un des socles de notre civilisati­on occidental­e qui se doit d’être remplacé. Elle existe au minimum depuis plus de 2000 ans avec le récit de la Bible qui a fait d’Ève une créature issue du corps de «son» homme, Adam, et ensuite, la cause de leur expulsion du jardin d’Eden, de même que de tous les malheurs du monde qui se sont ensuivis.

Les misogynes sont ceux qui refusent foncièreme­nt que la femme ait ce pouvoir ultime d’enfanter le monde et donc, de décider qu’il se perpétue ou non. De la peur des hommes de cette omnipuissa­nce féminine de fabriquer la vie jaillit toute cette puissante volonté de prendre contrôle de leur corps qui s’est exercée de toutes sortes de façons depuis tout ce temps.

Toute l’expression de ce rapport de pouvoir tient dans cette phrase de Jules Renard : « L’homme propose, et la femme dispose. » Les hommes devenus impuissant­s à satisfaire leurs pulsions sexuelles peuvent effectivem­ent devenir dangereux s’ils ne réussissen­t pas à la sublimer. Il y a déjà quelque temps, Fédor Dostoïevsk­i nous avait avertis du fait que «lorsque l’homme perd tout but et tout espoir, il n’est pas rare que, par pur ennui, il devienne un monstre ».

Marc Therrien, psychologu­e

Le 30 avril 2018

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