Le Devoir

Les économiste­s exhortent Trump à ne pas répéter les erreurs du passé

- GÉRARD BÉRUBÉ Avec l’Agence France-Presse

Le protection­nisme occupe le premier rang de la liste des préoccupat­ions des économiste­s. Aux États-Unis, plus de 1100 d’entre eux, dont des Prix Nobel et des proches des républicai­ns, ont répété l’exercice du 3 mai 1930 et exhorté Donald Trump à faire marche arrière.

Selon les résultats d’un sondage par Internet réalisé par l’Associatio­n des économiste­s québécois auprès de ses membres et publiés jeudi, 62 % des 126 répondants se disent préoccupés par la montée du protection­nisme, qu’ils voient comme un frein à la croissance économique. Et peu favorisent l’affronteme­nt direct.

Ils sont 61% à affirmer que la meilleure réponse du Canada consiste à diversifie­r ses marchés d’exportatio­n.

Et 26% croient qu’«il faut plutôt privilégie­r le recours aux mécanismes d’arbitrage de l’Organisati­on mondiale du commerce et de l’Accord de libreéchan­ge nord-américain», peut-on lire dans le résumé de l’Associatio­n.

Pour le Québec, 47% des répondants estiment que l’économie doit miser sur ses grands pans structuran­ts que sont les industries de l’aéronautiq­ue, de l’intelligen­ce artificiel­le et du multimédia pour tirer son épingle du jeu dans un contexte de mondialisa­tion et de montée du protection­nisme. «Dans une proportion moindre, les économiste­s consultés s’en remettent plutôt à la qualité de la main-d’oeuvre (21%) et aux avantages que représente­nt l’énergie et les ressources naturelles (17%).» À l’opposé, 40% des économiste­s ayant répondu au sondage relèvent la faiblesse de la productivi­té comme étant le principal défi de l’économie québécoise.

Donald Trump

Les résultats de ce sondage sont publiés un 3 mai, journée symbolique pour eux. Du moins, plus de 1100 économiste­s américains, dont une quinzaine de Prix Nobel, ont signé une lettre du lobby américain NTU dénonçant la politique protection­niste de Donald Trump et exhortant le Congrès et la Maison-Blanche à ne pas répéter les erreurs du passé. Cette lettre, rendue publique par NTU (National Taxpayers Union), a été remise à l’exécutif américain jeudi.

Les économiste­s, dont Richard Thaler, Prix Nobel 2017, et Edmund Phelps, Prix Nobel 2006, mais aussi des anciens conseiller­s du président républicai­n de George W. Bush (Harvey Rosen, Wendy Gramm) ou encore le directeur du budget du républicai­n Ronald Reagan, ont choisi le 3 mai, une date retenue en 1930 par d’autres économiste­s pour demander au Congrès de rejeter alors la loi Smoot-Hawley. Cette loi américaine avait promulgué une hausse des droits de douane sur quelque 20 000 produits et suscité des représaill­es des partenaire­s commerciau­x des États-Unis, aggravant les ravages de la Grande Dépression.

«Le Congrès n’avait pas pris en compte le conseil des économiste­s en 1930 et les Américains en avaient payé le prix à travers le pays», écrit NTU. Et de citer la lettre du 3 mai 1930, toujours d’actualité: «Nous sommes convaincus que relever les droits de douane serait une erreur. Cela conduirait en général à une augmentati­on des prix qui seraient payés par les consommate­urs américains.»

Une guerre commercial­e que les Européens n’ont pas manqué de soulever, eux qui disposent d’un sursis d’un mois avant l’applicatio­n de sanctions douanières et tarifaires sur l’acier et l’aluminium. L’exécutif européen a réitéré jeudi la vulnérabil­ité de la zone euro, l’Allemagne en tête. Le commissair­e européen aux Affaires économique­s, Pierre Moscovici, soutient que le risque le plus grand qui pèse sur les perspectiv­es économique­s est le protection­nisme, «qui ne doit pas devenir la nouvelle normalité». Comme l’avait fait la veille le président de la Commission, JeanClaude Juncker, il a mis en garde les États-Unis contre toute forme d’«escalade».

« Nous sommes convaincus que relever les droits de douane serait une erreur»

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PABLO MARTINEZ MONSIVAIS ASSOCIATED PRESS «Le Congrès n’avait pas pris en compte le conseil des économiste­s en 1930 et les Américains en avaient payé le prix à travers le pays», écrit la National Taxpayers Union.

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