Le Devoir

Un réseau indispensa­ble au service de l’éducation

- ANDRÉ LAVOIE Collaborat­ion spéciale

Héritage important de la Révolution tranquille, les cégeps sont périodique­ment remis en question, établissem­ents d’enseigneme­nt singuliers en Amérique du Nord, d’où cette méfiance parfois tenace. Le réseau de l’Université du Québec (UQ), créé officielle­ment le 18 décembre 1968, n’est pas non plus à l’abri des critiques. Johanne Jean, présidente de l’UQ depuis juillet 2017, elle-même fière diplômée de l’Université du Québec en Abitibi-Témiscamin­gue (UQAT) avant d’y enseigner et d’en avoir été la rectrice pendant 13 ans, s’applique depuis longtemps à défendre son caractère unique et essentiel.

«La journée où l’on va arrêter de discuter des préjugés à l’égard de l’UQ, je vais m’inquiéter!» lance-t-elle au téléphone dans un grand éclat de rire. Sur un ton plus sérieux, elle admet que cet impression­nant réseau, qui compte dix établissem­ents répartis un peu partout dans la province,«n’apas150ou 300 ans, mais 50». Et alors que l’Université du Québec à Montréal (UQAM) fut fondée en 1969, l’UQAT, la plus jeune, fut créée en 1983, avec entre les deux plusieurs écoles et instituts, comme la TELUQ, l’INRS, l’ENAP, l’ETS, et les université­s situées dans les capitales régionales comme Trois-Rivières (UQTR), Gatineau (UQO), Saguenay (UQAC) et Rimouski (UQAR).

La bataille des diplômes

À l’aube des festivités soulignant les 50 ans de l’UQ, Johanne Jean trouve le moment bien choisi pour rappeler des faits trop souvent occultés, et mettre en garde citoyens et élus convaincus que la bataille des diplômes est gagnée au Québec. «En 1971, environ 5% de la population adulte possédait un diplôme universita­ire ; en 2016, c’est 20,5%», souligne la présidente de cette organisati­on qui a décerné près de 700 000 diplômes depuis sa fondation, et ce, dans les 750 programmes disponible­s parmi les 10 établissem­ents du réseau.

Cette augmentati­on, si impression­nante soit-elle, ne la satisfait pas. «Le travail n’est pas fini, d’autant plus que nous sommes encore en dessous des moyennes ontarienne et canadienne», déplore celle qui demeure profondéme­nt convaincue que, pour un individu autant qu’une société, les études universita­ires n’ont rien d’un luxe. Et elle salue le courage des fondateurs de l’UQ qui, dès le départ, ont développé les établissem­ents en favorisant à la fois les études de premier, deuxième et troisième cycles, en plus de la recherche. «On ne peut les dissocier, et c’est encore plus important en 2018 d’avoir des créneaux de recherche qui couvrent l’ensemble du territoire québécois.»

C’est à cela que s’applique le réseau de l’UQ, d’abord dans ce déploiemen­t régional, mais aussi en faisant en sorte que chaque entité soit en phase avec son milieu, sa communauté. «L’océanograp­hie à Rimouski, ça fait toute la différence, car pour l’UQAR, c’est important d’être près des gens qui ont besoin de ces recherches. Même chose pour le secteur de l’environnem­ent minier et de la foresterie à l’UQAT, et ce, dès sa fondation, ce qui n’empêche pas les partenaria­ts avec d’autres établissem­ents du réseau, comme l’UQAM ou l’UQO. Nos chercheurs trouvent des solutions à des problèmes, et elles circulent partout à travers le monde.»

Pénurie à l’horizon

Avant la tenue d’un important colloque en novembre prochain sur le passé, le présent et surtout l’avenir de l’UQ, des questions pressantes occupent sa présidente et, par ricochet l’ensemble de la société québécoise. « Les besoins de main-d’oeuvre, je trouve que l’on ne s’y attarde pas assez, et il va falloir y réfléchir rapidement », selon Johanne Jean. Par sa proximité, sa fine connaissan­ce du milieu où chaque établissem­ent est implanté, l’UQ peut inverser une tendance jugée très inquiétant­e.

«Quand on parle de pénurie de main-d’oeuvre, on revient souvent à la question de la formation profession­nelle», regrette la présidente, sortant quelques chiffres pour élargir le débat. «En 2017, un nouvel emploi sur deux exigeait un diplôme collégial ou universita­ire. Selon Emploi-Québec, en 2024, les trois quarts des nouveaux emplois vont exiger un diplôme collégial ou universita­ire. Et quand on sait que ça prend six ans pour former un ingénieur forestier, deux ans au cégep et quatre ans au baccalauré­at, il faut vraiment se relever les manches ! »

À ce défi important s’ajoutent ceux du numérique et des nouvelles technologi­es. Ils ont favorisé l’accessibil­ité aux études universita­ires avec la formation à distance — la TELUQ fut d’ailleurs une pionnière en ce domaine —, mais «changent nos approches en enseigneme­nt et en recherche, et ce n’est pas fini. L’UQ devra s’adapter rapidement, et sera capable de le faire », conclut Johanne Jean.

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LOUISE BILODEAU 2017 Johanne Jean, présidente de l’UQ
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