Le Devoir

Un comité du Sénat appelle à concevoir une société « sans carbone » après 2030

- ALEXANDRE SHIELDS

S’il veut respecter ses engagement­s dans le cadre de l’Accord de Paris sur le climat, le Canada devra rapidement prendre le virage vers une économie qui n’émettra plus de gaz à effet de serre. C’est du moins le constat que fait le Comité sénatorial de l’énergie, de l’environnem­ent et des ressources naturelles, tout en rappelant que l’industrie des énergies fossiles suit plutôt une trajectoir­e de forte croissance des émissions de gaz à effet de serre (GES).

Le gouverneme­nt de Justin Trudeau s’est engagé à réduire les émissions de GES du Canada de 30% d’ici 2030, par rapport à 2005. Cette cible, qui est la même que celle du précédent gouverneme­nt, sous Stephen Harper, demandera des efforts substantie­ls au pays, prévient un nouveau rapport du comité, intitulé « Le pétrole et le gaz canadiens dans une économie à faibles émissions de carbone ».

«L’atteinte de la cible fixée pour 2030 nécessiter­a une transforma­tion titanesque des modes de production et des habitudes de consommati­on d’énergie au Canada. Il faut concevoir une société essentiell­ement transformé­e et sans carbone après 2030 », souligne le comité sénatorial dans ce rapport, publié vendredi.

Les auteurs du document ne se prononcent pas formelleme­nt sur les impacts de cette décarbonis­ation pour l’économie canadienne, dans un contexte où l’industrie pétrolière et gazière a contribué pour 142 milliards de dollars au PIB en 2015. «Il demeure toutefois qu’une société décarbonis­ée signifie de nouveaux débouchés économique­s, moins de pollution et une meilleure qualité de l’air, une population plus en santé et une productivi­té accrue, grâce à de nombreux gains sur le plan du rendement énergétiqu­e », insistent-ils.

La commissair­e à l’environnem­ent et au développem­ent durable, Julie Gelfand, a d’ailleurs dit au comité qu’«en ne s’engageant pas à réduire les émissions dans le secteur pétrolier et gazier, le Canada a raté des occasions». Qui plus est, en raison de son inaction, il est probable que le pays ratera l’objectif fixé pour 2020 (17 % sous les niveaux de 2005 d’ici 2020).

Croissance des GES

Pour corriger le tir et atteindre la cible de 2030, le Canada devra réduire ses émissions de GES annuelles de 199 millions de tonnes (Mt). Le comité souligne que cette réduction « est supérieure aux émissions projetées pour la totalité de l’industrie pétrolière et gazière en amont du Canada en 2030 », soit 193 Mt.

Les données of ficielles indiquent en ef fet que l’industrie des énergies fossiles se trouve sur une trajectoir­e de croissance­s des émissions de GES d’ici 2030, contrairem­ent à d’autres secteurs importants comme les transports, la production d’électricit­é et l’agricultur­e. Cette augmentati­on est en bonne partie imputable à la croissance de la production pétrolière, qui devrait dépasser les cinq millions de barils par jour en 2030, dont 3,7 millions de barils provenant des sables bitumineux.

«L’industrie gazière et pétrolière est une des plus importante­s de l’économie canadienne, mais c’est aussi la pire source d’émissions de gaz à effet de serre. Nous nous attendrons à une aide énorme de sa part pour que le Canada progresse vers ses objectifs en matière de réduction de ces gaz», a résumé la sénatrice Rosa Galvez, présidente du comité, par voie de communiqué.

Une réduction des émissions de GES dans le secteur des énergies fossiles sera même «essentiell­e » pour que le pays espère respecter ses engagement­s envers l’Accord de Paris et la lutte contre les changement­s climatique­s.

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