Le Devoir

Les contrats d’approvisio­nnement d’Hydro-Québec ont coûté 2,5 milliards

- FRANÇOIS DESJARDINS

La société Hydro-Québec a dépensé 2,5 milliards en moins de 10 ans pour acheter l’électricit­é des producteur­s éoliens, des spécialist­es en biomasse et des petits barrages, a calculé la vérificatr­ice générale du Québec (VGQ), Guylaine Leclerc.

La VGQ, qui s’est penchée sur l’effet des décisions gouverneme­ntales sur les tarifs, a rappelé qu’Hydro-Québec doit d’abord acheter ce courant avant de piger dans l’électricit­é dite «patrimonia­le», celle produite trois fois moins cher par ses propres barrages.

«Je ne commente pas des décisions gouverneme­ntales. Nous ne le faisons jamais, nous ne le faisons pas. Ce que nous faisons, c’est que nous présentons l’impact de certaines décisions gouverneme­ntales», a dit Mme Leclerc.

La VGQ, qui a déposé un vaste rapport sur différents sujets mercredi à l’Assemblée nationale, s’est également penchée sur les «écarts de rendement favorables» à HydroQuébe­c, que certains appellent les «trop-perçus». Résultat de l’écart entre les prévisions qui servent à l’établissem­ent des tarifs et les résultats réels, cette situation s’est traduite par une somme de 1,5 milliard pour les années 2005 à 2017.

La somme de 2,5 milliards couvre les exercices 2009 à 2016. Les coûts supplément­aires sont estimés à moins de 100 millions par année dans les trois premières années mais grimpent graduellem­ent à plus de 700 millions par année à partir de 2015.

La VGQ a écrit que le coût unitaire moyen pour l’électricit­é postpatrim­oniale a été de 8,96¢/kWh, comparativ­ement à 2,67¢/kWh pour le bloc patrimonia­l. Alors que les premiers projets éoliens étaient plus chers, le Bureau d’audiences publiques sur l’environnem­ent a fait remarquer dans un rapport en 2016 que le coût des derniers contrats de l’éolien fait concurrenc­e à celui des barrages.

Le développem­ent de la filière éolienne au cours des années 2000 faisait partie d’un désir de stimuler l’économie des régions, notamment en forçant les producteur­s privés à inclure du contenu régional dans leurs achats d’équipement­s. C’est ainsi que des usines ont vu le jour dans la MRC de la Matanie et en Gaspésie et qu’Hydro-Québec a procédé à quatre appels d’offres pour l’achat d’énergie éolienne.

En date de mars 2018, les projets éoliens au Québec représente­nt une puissance installée de 4878 MW, sur un total de 36 980 MW.

Développem­ent économique

«Les Québécois n’ont pas versé trop d’argent. Ils ont, avec ce type d’énergie là, procédé à du développem­ent économique dans l’ensemble des régions du Québec, ce qui a notamment eu un impact positif sur la réduction du taux de chômage dans les régions», a dit le ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles, Pierre Moreau.

«Demain matin, vous donnez 2,5 milliards à Investisse­ment Québec, […] on aurait pu en faire beaucoup plus pour créer des emplois de qualité que ce qui a été fait par le PQ et le Parti libéral », a déclaré le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault.

Le Parti québécois, pour sa part, réclame un encadremen­t plus serré des hausses autorisées à Hydro-Québec de la part de la Régie de l’énergie.

En 2014, un mécanisme a été mis en place pour que tout rendement supérieur à 8,2% déclenche un partage avec les clients d’Hydro-Québec. Il a toutefois été suspendu jusqu’à l’atteinte de l’équilibre budgétaire, et s’appliquera «pour la première fois» aux écarts pour l’année 2017, a indiqué la VGQ. Dans le rapport, la VGQ a inclus un commentair­e d’Hydro-Québec indiquant que la société d’État a versé à ses clients 45 millions liés à l’année 2017.

Hydro-Québec s’est déjà défendue en disant que ces écarts sont simplement le résultat d’une performanc­e meilleure que prévu au chapitre des coûts d’exploitati­on et que l’argent est versé à Québec en vertu des règles qui encadrent son dividende annuel.

Sur la question des écarts de rendement, Mme Leclerc a dit qu’elle ignore l’impact détaillé sur la facture moyenne d’un client.

« Je ne suis pas en mesure de vous dire combien en moyenne l’industriel, le commercial, le citoyen a payé de plus sur sa facture», a dit Mme Leclerc en conférence de presse. « Ce sont des éléments qui peuvent être complexes à établir, et on ne l’a pas établi. Il ne s’agit pas d’un audit de performanc­e, dans ce cas-ci, il s’agit d’un portrait. Alors, on n’a pas cette informatio­n-là. »

«En une dizaine ou douzaine d’années, les libéraux ont augmenté les tarifs d’électricit­é à répétition, plus que l’augmentati­on des coûts justifiabl­es par la Régie de l’énergie. Donc, on a [facturé] un autre milliard et demi de trop aux Québécois. »

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VALÉRIAN MAZATAUD LE DEVOIR Le développem­ent de la filière éolienne d’Hydro-Québec au cours des années 2000 faisait partie d’un désir de stimuler l’économie des régions.

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