Le Devoir

L’institut financé par PKP se dit victime d’injustice

L’IRAI s’est vu refuser le statut d’organisme de bienfaisan­ce par l’ARC, car il agirait à « des fins politiques »

- LISA-MARIE GERVAIS

Devant le refus de l’Agence du revenu du Canada (ARC) de l’accréditer comme organisme de bienfaisan­ce, l’Institut de recherche sur l’autodéterm­ination des peuples et des indépendan­ces nationales (IRAI) assure qu’il ne rendra pas les armes.

Sociofinan­cement, événements, collectes de fonds. Poursuivre la bataille devant les tribunaux n’est pas non plus écarté pour cet institut de recherche sur la souveraine­té financé par Pierre Karl Péladeau. Car il ne lui sera pas possible de recevoir des dons de citoyens en échange de crédits d’impôt.

« Je vais présenter les options aux administra­teurs pour nous permettre de prendre une décision. Serait-il possible de poursuivre le recours qu’on a déposé à la Cour fédérale qui a été suspendu […] ou va-t-on choisir une autre voie? On va en discuter», a dit le professeur de droit et président du conseil d’administra­tion de l’IRAI, Daniel Turp. «M. Péladeau ne veut pas abandonner, moi non plus, les administra­teurs non plus. On va persister et signer. On n’a pas créé cet institut pour rien. »

Recherche politique

Dans sa décision dont Le Devoir a obtenu copie, l’ARC a refusé d’octroyer le statut d’organisme de charité à l’IRAI sous prétexte que ce dernier oeuvre à des «fins politiques non énoncées ». « Le domaine de recherche restreint du demandeur, centré sur l’indépendan­ce du Québec et les mouvements souveraini­stes internatio­naux, coïncide avec la principale plateforme du PQ telle qu’énoncée par M. Pierre Karl Péladeau lors de sa nomination en tant que chef du Parti québécois, lors de laquelle il s’est engagé à mettre en place un institut de recherche sur l’indépendan­ce, lit-on. Il est par conséquent difficile de ne pas conclure que le demandeur agit afin de promouvoir l’indépendan­ce du Québec et de faire avancer les intérêts du PQ. »

L’IRAI a toujours défendu sa structure et ses méthodes de recherche, se targuant d’être impeccable sur le plan méthodolog­ique, avec des revues par les pairs en double aveugle. L’agence fédérale a reconnu que l’institut s’est structuré de manière à mener des «rapports de recherche de qualité et impartiaux» et que le contenu de la recherche ne semblait pas porter de point de vue en particulie­r.

Une décision «injuste»

Cela n’empêche pas le président du CA de trouver «inacceptab­le» et «injuste» cette décision qu’il croit teintée de mauvaise foi politique. «Il y a vraiment quelque chose qui sent mauvais, a dit M. Turp. À bien des égards, il y a réellement une volonté politique derrière leur refus de nous accorder ce statut, un refus fondé sur des arguments qui, de toute évidence, n’ont jamais été utilisés pour examiner des demandes analogues », a-t-il ajouté, en se référant à l’Idée fédérale, un réseau québécois de réflexion sur le fédéralism­e qui a pu obtenir un statut de bienfaisan­ce.

Le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, s’est indigné de la décision de l’ARC, qu’il juge lui aussi « éminemment politique, injuste et inéquitabl­e». «Je suis allé sur la page de l’Idée fédérale, qui a le statut de bienfaisan­ce, dont le président du conseil des gouverneur­s est Jean Charest, ex-chef du Parti libéral du Québec. Alors, ça veut dire que, pour l’Agence de revenu du Canada, qui fait semblant d’être équitable, si t’es un ex-chef du Parti libéral tu peux avoir ton numéro de charité mais si tu es ex-chef du Parti québécois, tu ne peux pas», at-il déploré.

L’IRAI attendait une réponse de la part de l’ARC depuis près de deux ans, ayant déposé le 9 juin 2016 sa demande d’accréditat­ion. Soupçonnan­t des motifs politiques derrière ce long délai, les administra­teurs avaient déposé une requête «dite de contrôle judiciaire» devant la Cour fédérale pour que celle-ci se prononce elle-même sur l’admissibil­ité de l’institut. C’est cette même requête qui pourrait être reprise.

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