Les victimes en quête de reconnaissance plus que de vengeance
Si les délinquants sexuels peuvent espérer résoudre leurs problèmes et parfois bénéficier d’une peine réduite en prenant le chemin de la thérapie, les victimes, elles, affichent des réactions partagées face à ce parcours.
En fait, plus que la sentence de prison, c’est d’abord le fait de voir que leur version des faits est crue et reconnue qui apporte du réconfort aux victimes, affirme Catherine Rossi, professeure agrégée en criminologie à l’Université Laval, qui rappelle que la vaste majorité des femmes victimes de délits sexuels n’auront jamais ce soulagement.
«Plus de 90% des auteurs de crimes sexuels ne sont jamais dénoncés ni condamnés, alors obtenir une peine, c’est déjà une reconnaissance immense de ce qu’elles ont subi », affirme la chercheuse.
La proportion de délinquants sexuels ayant accès à des thérapies en milieu carcéral est si petite qu’il est difficile de dire si leurs victimes préfèrent cette avenue aux peines de détention classiques.
Mais, chose certaine, «la punition ne guérit pas la victime, pas plus que la prison. Je pense que beaucoup d’entre elles préfèrent savoir que leur agresseur suit un traitement, car la majorité de ceux-ci sont des proches qui risquent de se retrouver à nouveau dans leur entourage», croit la criminologue qui intervient auprès de victimes d’agression sexuelle.
La dénonciation qui mènera à une accusation, et éventuellement à une peine d’emprisonnement, n’est d’ailleurs pas souvent la voie privilégiée par celles qui ont subi une agression ou écopé de la délinquance sexuelle de quelqu’un de leur entourage.
«Pour plusieurs de ces victimes, l’idée de la prison est plutôt un frein à la dénonciation. Elles veulent d’abord que les gestes arrêtent. Dans mon expérience, quand les victimes comprennent le but du traitement ou d’une thérapie, elles préfèrent cela à une peine», ajoute la criminologue.
Un problème social
Une vision que ne partage pas entièrement Stéphanie Tremblay, du Regroupement québécois des Centres d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel (RQCALACS). «J’ai toujours une réserve quand on assimile la délinquance sexuelle à la “maladie mentale” qui peut se résoudre par un traitement. Pour nous, c’est un problème social, et la vraie solution, c’est de faire de la prévention en bas âge », dit-elle.
Le Regroupement s’interroge aussi sur les réductions de peine qui pourraient être octroyées en échange de tels traitements, puisque les peines purgées par les délinquants sexuels sont déjà minimales. Plusieurs condamnés sont aussi libérés avant la fin de leur peine, mais ce n’est pas le cas à la prison de Percé.
D’autres organismes contactés, qui n’ont pas souhaité être identifiés, déplorent également que les fonds consacrés aux programmes d’aide aux délinquants prennent de plus en plus de place par rapport aux services offerts aux victimes.