Le Devoir

Ceux qui restent

Netflix lance avec beaucoup de précaution­s la seconde saison de Treize raisons

- MANON DUMAIS LE DEVOIR

L’été dernier, une étude d’Internal Medicine affirmait qu’il y avait eu un accroissem­ent de 19% de recherches sur le suicide dans les 19 jours suivant la mise en ligne en avril de Treize raisons, série de Netflix relatant les circonstan­ces ayant mené une adolescent­e à mettre fin à ses jours. Alarmée, la communauté scientifiq­ue avait même demandé à la plateforme numérique de retirer la série à laquelle on reprochait de «glamourise­r» le suicide et de la modifier afin qu’elle respecte les directives de l’Organisati­on mondiale de la santé.

De fait, l’OMS suggère de ne pas s’attarder sur le suicide d’un personnage ni d’illustrer l’acte en question. Or, non seulement y montrait-on de façon explicite le suicide d’Hannah Baker (Katherine Langford), la série de treize épisodes d’une heure mettait en scène Clay Jensen (Dylan Minnette), meilleur ami d’Hannah, écoutant les treize cassettes où celleci relatait les treize raisons l’ayant poussée à commettre l’irréparabl­e.

En avril 2017, alors que la popularité de la série battait son plein, Réal Labelle, psychologu­e et directeur du Centre de recherche et d’interventi­on sur le suicide et l’euthanasie, parlait de l’effet Werther à la journalist­e du Devoir Amélie DaoustBois­vert: «Devant un antagonist­e qui nous ressemble, si on est vulnérable, son suicide peut nous apparaître comme une option. Plus ce geste est glorifié, plus c’est dangereux. Il faut éviter de créer des héros ou d’en faire un geste romantique. »

Un petit vent de polémique

Face à la polémique, les représenta­nts de Netflix, persuadés que la série allait entraîner plus de discussion­s que de passages à l’acte, avaient par communiqué promis de développer la suite de la série en approfondi­ssant les recherches sur le sujet. La chaîne avait ensuite ajouté un avertissem­ent général au premier épisode et renforcé ceux des épisodes au contenu plus éprouvant. Rappelons par ailleurs que sur le compte Twitter de la série se trouvaient l’adresse d’un site de prévention et différents numéros de ligne d’écoute aux quatre coins du monde.

Aussi populaire que controvers­ée, Treize raisons revient pour une deuxième saison, mais cette fois, Netflix a pris encore plus de précaution­s afin de mettre en garde les jeunes spectateur­s. Avant le générique du premier épisode, quatre acteurs de la série annoncent que Treize raisons est une fiction qui traite de sujets délicats, tels le suicide, la dépression et l’intimidati­on.

Ils suggèrent de ne pas regarder la série si on traverse une période difficile, de la regarder en compagnie d’un adulte avec qui pouvoir en discuter et de ne pas hésiter à contacter les personnes ou ressources à sa dispositio­n. Ce segment a d’ailleurs été ajouté à la première saison, toujours disponible sur Netflix. Dans le générique final de chaque épisode, on rappelle également l’existence du site 13reasonsw­hy.info.

La chaîne s’est-elle conformée aux directives de l’OMS? Dans les neuf des treize épisodes que Netflix a consenti à déposer sur le site de presse, aucune image du suicide d’Hannah ni de la tentative de suicide d’Alex Standall (Miles Heizer). Toutefois, le suicide est encore au coeur de l’action puisque le fantôme d’Hannah hante Clay et qu’Alex, partiellem­ent amnésique et handicapé, doit vivre avec les conséquenc­es de son geste.

En parallèle, les parents d’Hannah, Olivia (Kate Walsh) et Andy (Brian d’Arcy James), poursuiven­t l’école qui n’a pu protéger leur fille, tandis que Clay reçoit des photos Polaroid au contenu troublant d’un expéditeur anonyme.

Alors que la première saison était narrée par Hannah, chacun des personnage­s assure la narration de l’épisode tournant autour de son témoignage en cour. À chaque nouvelle révélation, le personnage d’Hannah se complexifi­e… Netflix ayant fait parvenir une liste de onze divulgâche­urs à ne pas partager, le compte rendu se termine ici.

Ce que l’on peut révéler toutefois, c’est qu’il y aura certaineme­nt encore matière à polémique. À preuve, la publicatio­n durant le tournage de la deuxième saison d’une photo suggérant qu’Alex et Jessica Davis (Alisha Boe) reforment un couple avait créé un tollé de protestati­on sur Twitter — cela dit, plusieurs jeunes fans souhaitent les revoir ensemble. Pour mémoire, Alex n’avait pas empêché son ami Bryce Walker (Justin Prentice) de violer Jessica et a longtemps caché la vérité à sa petite amie. Parions, et souhaitons, que la série suscitera plusieurs discussion­s sur la notion de consenteme­nt, sur les agressions sexuelles et sur la culture du viol.

Besoin d’aide ? 13reasonsw­hy.info suicideact­ionmontrea­l.org 1 866 277-3553

Treize raisons 2 Netflix, dès vendredi

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NETFLIX Alors que la première saison était narrée par Hannah, chacun des personnage­s assure la narration de l’épisode tournant autour de son témoignage en cour.

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