Le Devoir

Répondre aux défis de demain

- ALICE MARIETTE Collaborat­ion spéciale

Une ville intelligen­te est une ville qui décide de faire les choses autrement pour améliorer la qualité de vie de ses citoyens. Un concept actuelleme­nt incontourn­able et suivi de près par les municipali­tés.

«La ville intelligen­te utilise l’innovation et les nouvelles technologi­es pour mieux servir le citoyen et devenir plus attractive», décrit Vicki-May Hamm, mairesse de la ville de Magog et présidente de la Commission des villes intelligen­tes de l’Union des municipali­tés du Québec (UMQ). Il n’existe cependant pas de définition unique de ce concept. « Il n’y a pas de définition parce que l’expression vient de smart city et que la traduction du mot smart est floue», explique Sehl Mellouli, professeur en systèmes d’informatio­n organisati­onnelle à la Faculté des sciences de l’administra­tion de l’Université Laval et spécialist­e de la question. Malgré cette absence de consensus autour de la définition, l’objectif de la municipali­té reste toujours le même: améliorer son attractivi­té et son efficacité. Lors de l’atelier politique «La ville intelligen­te: plus qu’un concept à la mode», les participan­ts aux assises de l’UMQ se questionne­ront sur le sujet et partageron­t leurs différente­s expérience­s.

Un virage nécessaire

Si la technologi­e se trouve au coeur même des projets des villes intelligen­tes, ce n’est pas la seule composante. Selon le professeur Mellouli, il en existe d’autres: politique, citoyenne, environnem­entale, organisati­onnelle, économique, de gouvernanc­e et les infrastruc­tures existantes. «Tout est relié; par exemple, sans la volonté politique, une ville peut avoir toute la technologi­e possible, cela ne marchera jamais », relève-t-il. Il insiste sur le fait que la participat­ion citoyenne est aussi fondamenta­le. «C’est important que le citoyen s’engage parce que, quand il cocrée avec la ville, il aide dans la réflexion et permet de résoudre les problèmes que lui-même est en train de vivre», développe M. Mellouli.

En outre, le concept de ville intelligen­te touche toutes les municipali­tés, et non uniquement les plus grandes. «Lors de la création de la Commission, j’ai insisté pour avoir des municipali­tés de toutes tailles, car pour moi, une ville intelligen­te ce n’est pas juste une affaire de grandes villes pour régler des problèmes urbains», raconte Mme Hamm. Une fois les représenta­nts autour de la table, le travail a pu commencer. L’objectif: mieux outiller les membres de l’UMQ pour faire face aux défis de demain. «Nous souhaitons aider les municipali­tés de toutes tailles à emboîter le pas, à prendre un virage plus intelligen­t », commente la présidente de la Commission.

Un projet de ville intelligen­te se fait par étape, dont la première est l’identifica­tion de la vision. «La ville doit savoir comment elle se voit sur les 10 ou 15 prochaines années, cela peut notamment passer par des consultati­ons citoyennes», détaille Sehl Mellouli, ajoutant que, si la municipali­té n’est pas capable de se projeter, il ne sera pas possible de trouver des solutions adaptées. «Cela dépend de ce sur quoi la municipali­té a envie de travailler, de ses priorités ou encore de son ADN », renchérit Mme Hamm. Elle ajoute qu’il est important de ne pas copier sur ce que fait le voisin, car chaque réalité est différente.

C’est donc pour accompagne­r les municipali­tés dans la démarche que l’UMQ, en partenaria­t avec le CEFRIO, a lancé une applicatio­n Web d’autodiagno­stic. L’outil, à l’aide de questionna­ires, permet aux villes de dresser leur autoportra­it et de se fixer des objectifs. L’applicatio­n rassemble également des informatio­ns sur les villes intelligen­tes et des exemples de projets. «La prochaine étape est de montrer le chemin parcouru et par où on s’en va», explique

Mme Hamm, en insistant sur le fait qu’il est important que les municipali­tés puissent aussi mesurer les progrès de leurs villes.

Possibilit­és infinies

Une ville intelligen­te peut toucher de nombreuses facettes de la ville, à l’instar des technologi­es de l’informatio­n et de la communicat­ion, de l’environnem­ent, de la productivi­té, de la qualité de vie, de l’inclusion et de l’équité sociale ou encore des infrastruc­tures physiques. La mairesse de Magog prend l’exemple du nouvel outil interactif Typiquemen­t Memphrémag­og, lancé par la Ville. «Ici à Magog, on a la prétention de dire que nous avons parmi les plus beaux paysages et que c’est un patrimoine à protéger, alors on a créé une applicatio­n sur les paysages, qui permet aux gens de déposer leurs photos et de documenter», illustre-t-elle. D’autres projets ont été mis en place dans sa municipali­té, comme une applicatio­n en temps réel pour la gestion du stationnem­ent. «Même avec mes vieux parcomètre­s, qui pourraient être des antiquités, les gens peuvent payer avec l’applicatio­n. Cela montre aussi que l’on n’est

pas obligés de changer l’installati­on au complet », ajoute-t-elle.

En outre, la question des données ouvertes peut aussi poser un certain nombre de problèmes aux villes. « Les citoyens ont des attentes d’efficience et de transparen­ce, et nous avons aussi des ressources plus limitées, donc, si on peut faire des affaires de façon plus efficace, cela va nous aider», croit Mme Hamm. Pour les demandes d’accès à l’informatio­n par exemple, la libération des données va permettre un gain de temps important pour les municipali­tés. Pour finir, elle mentionne que si les possibilit­és sont multiples, c’est la théorie des petits pas qui est importante. «On commence par de petites initiative­s et, tranquille­ment, on intègre totalement le concept », estime-t-elle.

De son côté, Sehl Mellouli prédit que le concept ne va cesser d’évoluer. « Aujourd’hui, c’est la composante technologi­que qui prédomine, mais d’ici trois ou quatre ans peut-être que cela sera plutôt la composante citoyenne, puisque l’on parle beaucoup de participat­ion citoyenne en ce moment », pense-t-il.

Enfin, pour les municipali­tés qui souhaitent se lancer ou faire le point sur leurs démarches, une première école d’été francophon­e sur les villes intelligen­tes aura lieu à l’Université Laval en juin.

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ISTOCK L’UMQ, en partenaria­t avec le CEFRIO, a lancé une applicatio­n Web d’autodiagno­stic. L’outil permet aux villes de dresser leur autoportra­it et de se fixer des objectifs pour devenir une ville intelligen­te.

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