Le Devoir

Le surpeuplem­ent fait des ravages

- LISA-MARIE GERVAIS

Les femmes inuites sont particuliè­rement affectées par le surpeuplem­ent et les mauvaises conditions de logement, et ce, plus que les hommes. C’est ce qu’a démontré une étude menée dans douze communauté­s du Nunavik et du Nunavut présentée mardi dans le cadre d’un colloque intitulé «Perspectiv­es féministes sur le logement des femmes», organisé par l’UQAM et l’Université du Québec en Outaouais.

«Elles sont plus sensibles au phénomène de surcharge domestique, ont une part importante dans l’éducation des enfants, sont les plus investies dans les soins des personnes vieillissa­ntes ou autres membres de la famille et ont l’insécurité alimentair­e à gérer. Il est facile de comprendre que tous ces facteurs sont exacerbés en situation de surpeuplem­ent», a déclaré l’une des auteures principale­s de l’étude, Karine Perreault, candidate au doctorat en santé publique à l’Université de Montréal.

Son étude s’est intéressée à un échantillo­n de près de 300 Inuits en attente d’un logement qui ont répondu à des questionna­ires pour mesurer huit indicateur­s de bien-être liés à l’habitation, comme l’espace, l’intimité, la sécurité, etc. La majorité des Inuits sur la liste d’attente l’étaient depuis au moins trois ans et demi et 58% vivaient en situation de surpeuplem­ent, comparativ­ement à 3 % en moyenne au Canada.

Les questionna­ires ont révélé que les femmes, une fois installées dans un nouveau logement, étaient celles dont les besoins étaient toujours les plus difficilem­ent comblés, particuliè­rement en ce qui a trait à l’intimité, à l’espace, etc. «Lorsqu’il y a des tensions familiales exacerbées, les hommes […] ont tendance à s’en aller ailleurs pour prendre un répit, alors que les femmes doivent rester à la maison», a fait remarquer Mme Perreault.

Surpeuplem­ent partout

Aux prises avec les mêmes problèmes de surpeuplem­ent, plusieurs communauté­s des Premières Nations du Québec voient leurs besoins en logements sociaux augmenter de manière exponentie­lle, alors que le financemen­t ne suit pas du tout la tendance. «Ça fait quatre ans qu’on n’est plus en constructi­on, mais on a pourtant 300 personnes de plus», a déclaré Adrienne Jérôme, chef de Lac-Simon et représenta­nte du Groupe des femmes élues de l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador (APNQL).

À Lac-Simon, le premier défi est le logement, avant l’éducation, ose-t-elle dire. «Nos enfants sont dans des maisons surpeuplés, le gouverneme­nt dit qu’on doit mettre l’argent dans la réussite éducative. Mais où veux-tu que les enfants fassent leurs devoirs?» a-t-elle déclaré, ajoutant que ce sont les femmes qui souffrent le plus d’un logement inadéquat.

Pour son projet doctoral, Laurence Richard-Norbert tente de savoir en quoi «l’inertie» de l’État favorise l’émergence de nouvelles initiative­s de la communauté. Elle remarque qu’il y a un important manque de coordinati­on des efforts entre les différents paliers de gouverneme­nt en ce qui a trait au logement. Au cours des 20 dernières années, près de 300 millions provenant du gouverneme­nt fédéral servent notamment à construire 1750 nouveaux logements annuelleme­nt. Or, l’attributio­n des logements sociaux se fait souvent de façon arbitraire.

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