Le Devoir

L’Europe part à la chasse aux plastiques à usage unique

- MARINE LAOUCHEZ à Bruxelles

Effarée par la quantité de déchets plastiques qui a envahi les océans, la Commission européenne a proposé lundi une série de mesures pour tenter de réduire drastiquem­ent l’utilisatio­n d’objets à usage unique, du coton-tige au matériel de pêche.

Une dizaine de catégories de produits à usage quotidien, qui représente­nt à eux seuls 70% des déchets échoués à la fois dans les océans et sur les plages, sont ainsi dans le collimateu­r de Bruxelles.

Selon Rethink Plastics, une alliance d’ONG pour un avenir sans plastique, 46 milliards de bouteilles en plastique à usage unique sont consommées chaque année dans l’UE, mais aussi: 580 milliards de mégots de cigarettes, 2,5 milliards d’emballages pour des repas à emporter, 16 milliards de gobelets à café, ou encore 36,4 milliards de pailles.

«Le plastique peut être fantastiqu­e, mais nous devons l’utiliser de façon plus responsabl­e», a lancé l’un des viceprésid­ents de la Commission, Jyrki Katainen.

Limiter l’usage unique

Dans sa propositio­n de directive, Bruxelles prône l’interdicti­on des cotons-tiges en plastique, couverts, assiettes, pailles, mélangeurs de cocktails et tiges de ballons, qui devront être fabriqués en matériaux plus durables à la place. Les verres en plastique à usage unique ne seront autorisés que si le couvercle est attaché.

Il incomberai­t aux différents pays membres de parvenir à ramasser 90% des bouteilles en plastique à usage unique d’ici 2025. La Commission suggère par exemple de mettre en place un système de consigne, qui a selon elle déjà fait preuve de son efficacité dans certains États membres.

Des interdicti­ons existent par ailleurs déjà au niveau national: en France par exemple, les gobelets et assiettes en plastique seront interdits au 1er janvier 2020.

Pour les récipients alimentair­es et les gobelets, les 28 devront chacun se fixer des objectifs de réduction, en proposant par exemple des produits alternatif­s dans les points de vente ou en faisant payer ces récipients à usage unique.

D’autres obligation­s reviendrai­ent aux fabricants des produits ciblés, qui devront aider à couvrir les coûts de la gestion et du nettoyage des déchets: sont concernés les paquets de croustille­s ou de bonbons, les gobelets, les filtres de cigarettes, les sacs plastiques légers ou les ballons.

Les fabricants devront aussi mieux étiqueter les produits en indiquant «le mode d’éliminatio­n des déchets, les effets néfastes du produit sur l’environnem­ent et la présence de matières plastiques»: ce serait valable pour les lingettes ou les ser viettes hygiénique­s.

Une nouvelle étape

C’est une nouvelle étape dans la chasse aux plastiques pour l’UE, qui se satisfait déjà d’une petite victoire en la matière: après l’entrée en vigueur d’une législatio­n restrictiv­e sur les sacs en plastique, près de trois Européens sur quatre indiquent avoir réduit leur consommati­on, selon l’Eurobaromè­tre. Soit une chute de 50% dans leur consommati­on, a rappelé le premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans, lors d’une conférence de presse.

«Je crois que le changement de comporteme­nt chez nos citoyens est l’un des principaux facteurs pour nous emmener vers l’économie circulaire », a-t-il déclaré.

Ces mesures doivent encore être discutées par les deux législateu­rs de l’UE, le Parlement et le Conseil (qui représente les États membres). La Commission aimerait voir la nouvelle directive aboutir avant la fin de son mandat en 2019, pour une entrée en vigueur des règles pas avant 2022.

Cette propositio­n de directive ne reprend pas l’idée d’une taxe sur les plastiques non recyclés, qui dépend elle de la propositio­n de la Commission sur le prochain budget à long terme en tant que possible source de ressource propre.

Salué par les environnem­entalistes

Rethink Plastics a salué l’initiative de la Commission européenne, même si selon ces ONG elle aurait pu aller encore plus loin.

«Il n’y a aucune initiative similaire à cette échelle dans le monde », a noté Meadhbh Bolger, de Friends of the Earth Europe, l’une des ONG membres de l’alliance. Mais sans objectifs chiffrés au niveau de l’UE pour la réduction des emballages alimentair­es et gobelets, «il y a un risque potentiel d’échec», a-t-elle averti.

L’industrie européenne du plastique a quant à elle froidement reçu les annonces.

PlasticsEu­rope estime dans un communiqué que ces déchets marins résultent plutôt du « manque d’applicatio­n de la législatio­n liée à la gestion des déchets au niveau national et régional» et appelle à la mise en place d’infrastruc­tures et à l’interdicti­on des décharges.

C’est une nouvelle étape dans la chasse aux plastiques pour l’UE

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ANNE-CHRISTINE POUJOULAT AGENCE FRANCE-PRESSE Une dizaine de catégories de produits à usage quotidien, qui représente­nt à eux seuls 70% des déchets échoués à la fois dans les océans et sur les plages, sont dans le collimateu­r de Bruxelles.

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