ALUMINIUM ET ACIER, LA RIPOSTE
Le Canada, l’Union européenne et le Mexique imposeront des tarifs à des produits américains en représailles aux droits de douane sur l’aluminium et l’acier que le gouvernement Trump vient lui-même de mettre en vigueur.
Wall Street a ressenti le plus durement les contrecoups de la guerre commerciale déclenchée par le gouvernement Trump. Après un choc initial, les Bourses européennes ont contenu leur chute alors qu’à Toronto l’indice de référence a terminé la séance en territoire positif.
En réaction immédiate à la décision de Washington de taxer les importations d’acier et d’aluminium, la plupart des Bourses européennes ont amorcé un repli. Le recul a toutefois été amoindri en fermeture. L’économie allemande étant la plus sensible aux sanctions décrétées, l’indice Dax de la Bourse de Francfort a lâché 1,4%. Ailleurs, les pertes sur papier oscillaient entre 0,1% pour Milan et 0,5% pour Paris. Londres se permettait même de fermer sur un léger gain.
«Si le marché pensait vraiment que les États-Unis entrent dans une guerre commerciale frontale avec non seulement l’Union européenne, mais aussi le Canada et le Mexique, ses deux principaux partenaires commerciaux, les indices chuteraient beaucoup plus», a estimé Gregori Volokhine de Meeschaert Financial Services. «Les investisseurs ont pris l’habitude de volte-face de la part du gouvernement Trump et considèrent sans doute les dernières décisions comme une nouvelle tactique dans un processus de négociation encore en cours. »
D’ailleurs, New York écopait davantage. L’indice symbolique Dow Jones s’est replié de 1% pour terminer à 24 415,84 points. Plus représentatif, l’indice élargi S & P 500 a abandonné 0,7% à 2705,27 points. «Tout ce qui porte atteinte au libre-échange a tendance à faire monter les prix et à faire baisser la productivité. Dans une économie dont la croissance n’est pas encore à 3%, cela représente un pas dans la mauvaise direction», a estimé Jack Ablin, responsable des investissements pour Cresset Wealth Advisors.
La réaction des marchés est toutefois selon lui restée assez mesurée, car «ce gouvernement fait maintenant face à un problème de crédibilité dans la mesure où il change sans cesse de position», et les investisseurs voient dans ses dernières décisions «surtout une tactique de négociation».
À Toronto l’indice S & P/TSX a fait fi l’escalade des tensions commerciales pour repasser en territoire positif en fin de séance. La hausse a été de 12,84 points, à 16 061,50 points.
Impact négligeable
Dans sa lecture de la situation, l’économiste senior Nathan Janzen, de la Banque Royale, estime que l’effet de l’imposition des tarifs sur l’acier et l’aluminium est «gérable ». Il soutient que l’impact immédiat se traduit par l’incertitude freinant les investissements, et qu’il y a plus à craindre d’une escalade de la rhétorique aboutissant à une véritable guerre commerciale.
La décision de Washington «aura un impact négatif modéré mais gérable sur tous les pays impliqués », souligne l’économiste, qui ajoute que nous sommes encore loin d’un scénario de guerre commerciale à grande échelle.
Nathan Janzen rappelle que 90% de l’acier et de l’aluminium canadien est dirigé vers les États-Unis. En revanche, près de la moitié de l’acier et des trois quarts de l’aluminium canadiens exportés seront touchés par les tarifs américains, ce qui ne représente qu’environ 3% de l’ensemble des exportations canadiennes. «Globalement, la production combinée de l’acier et de l’aluminium compte pour environ 0,5% du PIB et des emplois au Canada», nuance l’économiste.
S’ajoute l’effet réel de ces tarifs, qui se traduit généralement par une hausse des prix devant se ressentir, ici, davantage sur le marché américain que du côté des producteurs et consommateurs extérieurs. Et par un éventuel recul du dollar canadien devant en atténuer l’impact.