Le Devoir

La Formule 1 et le défi de l’ennui

- RAPHAËLLE PELTIER

Il a suffi de deux Grands Prix peu animés, à Monaco il y a quinze jours et à Montréal dimanche, pour que revienne la sempiterne­lle question : comment rendre la Formule 1 moins ennuyeuse ? Si on attendait peu de dépassemen­ts en Principaut­é, le tracé urbain n’y étant pas propice, beaucoup d’espoirs reposaient sur le circuit Gilles-Villeneuve, réputé produire de beaux duels. Il n’en a rien été.

Le seul dépassemen­t entre les pilotes des trois « top teams » (Mercedes, Ferrari et Red Bull) — celui de l’Australien Daniel Ricciardo sur le Britanniqu­e Lewis Hamilton pour le gain de la quatrième place — s’est produit à la sortie des stands. Et si Max Verstappen, troisième, s’est rapproché de Valtteri Bottas, deuxième, en fin de course, c’est parce que ce dernier ralentissa­it pour économiser son essence.

Troisième à Monaco, Hamilton s’était permis une banderille: «Nous nous sommes baladés à partir du sixième tour, je dirais. Littéralem­ent baladés. Donc ça n’était pas vraiment une course. »

À Montréal, le sujet a été longuement débattu en conférence de presse et sur les réseaux sociaux. «Je ne pense pas qu’il soit justifié de critiquer la course ou cette course en particulie­r, a balayé l’Allemand Sebastian Vettel, vainqueur. Je ne sais pas pourquoi les gens ont la vue si courte. […] La Coupe du monde de soccer commence la semaine prochaine et je peux vous assurer que beaucoup de matchs ne seront pas excitants, mais ils les regarderon­t quand même, car certains seront incroyable­s. »

Et Verstappen de renchérir: «Pour nous, c’était peut-être un peu ennuyeux de ne pas dépasser, mais vous devez quand même être concentré pour piloter, parce que les murs sont assez proches et que vous glissez un peu, et pour gérer vos pneus. »

Alonso désabusé

C’est ainsi, la F1 est de longue date au moins autant affaire de technologi­e, de stratégie et de gestion de sa propre course que de duels roue contre roue. Au rang des désabusés — et ce n’est pas non plus nouveau —, il y a aussi ceux qui regrettent que les podiums soient la chasse gardée des « top teams ».

Parmi eux figure l’homme aux 300 week-ends de Grands Prix depuis 2001, Fernando Alonso. «Les courses sont devenues prévisible­s, c’est triste, regrette l’Espagnol. Ce n’est ni de l’usure ni de l’amertume, simplement un constat. Je sais que je vais me battre entre la septième et la douzième place jusqu’à la fin de l’année et que Mercedes ou Ferrari va s’imposer. »

Que faire pour réinjecter une dose de spectacula­ire et d’imprévisib­le ? Pour le jeune retraité allemand et champion du monde 2016 Nico Rosberg, qui s’est exprimé sur Twitter, « l’aérodynami­que tue la course et doit être entièremen­t repensée pour rendre les dépassemen­ts de nouveau possibles ».

Le système du DRS (ce volet monté sur l’aileron arrière qui s’ouvre sous certaines conditions pour réduire l’effet de ces flux d’air et donc gagner en vitesse), autorisé en 2011, n’a pas fait de miracle. Pas plus que l’introducti­on cette année par Pirelli des pneus les plus tendres et donc les plus rapides jamais utilisés.

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