Le Devoir

Historiens et architecte­s s’opposent à la destructio­n de la maison Legendre

- JEAN-FRANÇOIS NADEAU Avec Dave Noël

Des spécialist­es de l’histoire, du patrimoine et de l’architectu­re ancienne ont manifesté leur vive opposition à la destructio­n de la maison Legendre située à Sainte-Croix-de-Lotbinière.

Cette maison construite avant 1790 est laissée à l’abandon depuis 2012. Son dernier propriétai­re souhaite désormais la détruire, faute d’être parvenu à s’entendre avec un comité local voué à la préservati­on de cette demeure, une des plus vieilles et des plus intéressan­tes de la région.

L’architecte Marie-Josée Deschênes s’est adressée à la municipali­té. Au moment d’une expertise technique sur ce bâtiment en 2014, l’architecte avait noté que la maison «n’était pas dans une santé parfaite ». La maison a continué de se dégrader depuis, faute d’entretien.

«L’expertise doit être mise à jour. Mais il faudrait vraiment que ce soit épouvantab­le pour que ça ne vaille pas la peine de la préserver. Il s’agit d’une des plus vieilles maisons de la région, sinon la plus vieille. La municipali­té a un rôle à jouer là-dedans. La question est de savoir si nous avons la volonté collective de la préserver. »

Le rapport d’expertise estimait à 383 000 $ les coûts d’une restaurati­on et d’une mise en valeur de la maison. « C’est tout à fait courant comme coût pour ce type de bâtiment, et même inférieur à bien des projets de préservati­on du même genre. De beaux bâtiments se perdent parce que les municipali­tés ne jouent pas leur rôle, surtout en milieu rural. »

Au nombre des autres opposants à cette destructio­n, on trouve la Fédération Histoire Québec, appuyée par la société Patrimoine et histoire des seigneurie­s de Lotbinière. L’associatio­n Amis et propriétai­res de maisons an- ciennes du Québec et le groupe Action patrimoine se sont aussi opposés auprès de la municipali­té à ce que la maison soit rasée.

Sauvegarde

En tout, quinze lettres d’opposition ont été adressées à ce jour à la municipali­té en vue d’une assemblée qui doit se tenir le 3 juillet prochain. Un comité formé de deux conseiller­s municipaux et du maire peut en principe décider du sort du bâtiment puisque celui-ci n’a jamais fait l’objet d’une protection légale en vertu de la Loi sur le patrimoine.

Yvon Legendre avait vendu cette maison à Yvon Hamel en 2012.

« M. Hamel n’est pas totalement responsabl­e de la situation et ne mérite certaineme­nt pas toutes les critiques qui fusent de toutes parts », affirme aujourd’hui M. Legendre. « Si M. Hamel avait réellement voulu démolir cette maison depuis six ans, il aurait pu le faire bien avant », puisqu’il est actionnair­e d’une très grosse compagnie de constructi­on.

La maison de ses ancêtres, installés en ce lieu depuis 1758, « est presque impossible » à sauver dans son intégralit­é, pense-t-il. « Reste maintenant à envisager une sauvegarde de ce qui peut être préservé. »

Il faudra, à son sens, envisager une déconstruc­tion plutôt qu’une démolition. Divers spécialist­es des maisons anciennes ont en effet procédé à un démontage patient de maisons patrimonia­les afin de les reconstrui­re.

Selon M. Legendre, qui voit dans la déchéance de ce bâtiment un échec personnel, il «ne sert à rien maintenant d’accuser qui que ce soit… Tentons de préserver ce que nous pouvons. »

 ?? CHRISTINE ROUSSEAU ?? La maison Legendre, construite vers 1790, la plus vieille des environs, risque d’être prochainem­ent démolie sous le pic de démolisseu­rs.
CHRISTINE ROUSSEAU La maison Legendre, construite vers 1790, la plus vieille des environs, risque d’être prochainem­ent démolie sous le pic de démolisseu­rs.

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