Le Devoir

Trump s’en prend aux consommate­urs canadiens |

Apple, Boeing et Alibaba ont été touchées, mardi, en Bourse

- ÉRIC DESROSIERS

L’escalade des menaces commercial­es entre les États-Unis et la Chine épaissit le climat d’inquiétude et d’incertitud­e pour les entreprise­s et les marchés.

Comme la Chine exporte quatre fois plus aux États-Unis (506 milliards en 2017) que les Américains en Chine (130 milliards), le gouverneme­nt de Donald Trump est convaincu d’avoir, tôt ou tard, le dessus dans son enchère de menaces de sanctions avec Pékin.

Accusant la Chine de pratique commercial­e déloyale, le président américain a d’abord confirmé, vendredi, son intention d’imposer le 6 juillet des tarifs douaniers de 25 % sur 50 milliards de dollars d’exportatio­ns chinoises. Comme la Chine lui a immédiatem­ent répondu qu’elle fera de même contre des produits américains, la Maison-Blanche a menacé lundi de la frapper de tarifs pour 200 milliards d’importatio­ns supplément­aires et dit être prête à y rajouter 200 milliards, pour un total de 450 milliards, s’il venait encore aux Chinois l’idée de répliquer. « La Chine a bien plus à perdre que nous », a martelé mardi l’un des principaux architecte­s de la politique commercial­e du président américain, Peter Navarro.

Pékin ne se laisse pas démonter, bien qu’elle ne puisse théoriquem­ent s’en prendre, elle-même, qu’à 130 milliards d’exportatio­ns américaine­s. Si les États-Unis vont de l’avant avec leurs menaces, « la Chine se verra dans l’obligation d’adopter une combinaiso­n de mesures quantitati­ves et qualitativ­es en forme de représaill­es énergiques », a prévenu son ministère du Commerce mardi.

Une guerre qui pourrait faire mal

Le gouverneme­nt Trump aurait tort de sous-estimer la capacité de Pékin de compliquer grandement la vie des compagnies étrangères actives dans son marché à travers notamment ces fameuses « mesures qualitativ­es », l’ont prévenu ces derniers mois les dirigeants de plusieurs grandes entreprise­s américaine­s, rapportait mardi le Financial Times. Le régime chinois peut non seulement allonger les délais d’inspection et les formalités bureaucrat­iques auxquels font face des compagnies comme Boeing, General Motors et Apple, mais on l’a aussi vu orchestrer dans les médias des poussées de fièvre nationalis­te qui ont, par exemple, en 2012, fait fondre les ventes de voitures japonaises en Chine de 80 % en l’espace de seulement trois mois.

« La Maison-Blanche aurait du mal également à imposer des tarifs douaniers sur 200 milliards d’importatio­ns chinoises, et plus encore sur 450 milliards, sans que cela pénalise, en fait, ses propres entreprise­s et consommate­urs», a noté à l’Agence France-Presse l’économiste pour Oxford Economics Louis Kuijs.

En raison de leur taille et de la nature de leur économie, les États-Unis restent malgré tout relativeme­nt moins exposés à une guerre commercial­e mondiale que la plupart des autres pays, notamment en Europe, observait mardi une étude de Morgan Stanley citée dans le Wall Street Journal. En pleine opération visant à réduire le problème d’endettemen­t qui fragilise ses entreprise­s, la Chine pourrait, quant à elle, se voir forcée de remettre à plus tard cette importante bataille et de relâcher son contrôle du crédit afin de compenser l’impact des tarifs sur sa croissance économique.

Dur réveil des marchés

Toute cette situation n’a rien fait pour rassurer les marchés boursiers. Longtemps restés insensible­s aux bruits de bottes dans le commerce internatio­nal, ils ont piqué du nez mardi d’un bout à l’autre du globe. Le mouvement s’est amorcé en Asie, avec un recul de 2,8 % de la Bourse de Hong Kong, pour se poursuivre en Europe, avec une perte de 1,2 % à la Bourse allemande de Francfort, et se terminer à Wall Street, qui a connu un sixième recul quotidien d’affilée, cette fois de 0,4 %.

Les compagnies les plus exposées au conflit commercial en cours ont été parmi les principale­s victimes, les titres des américaine­s Apple, Caterpilla­r et Boeing perdant respective­ment 1,6 %, 3,4 % et 3,8 % de leur valeur, alors que les chinoises Alibaba et Baidu perdaient respective­ment 2 % et 2,5 %.

Les matières premières liées à la croissance économique mondiale ont aussi été touchées, le baril de pétrole perdant 79 ¢US, à 64,90 $, à la Bourse de New York, contre 6 ¢, 3,05 $, pour la livre de cuivre.

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