Le Devoir

Le site archéologi­que de Fort-Lorette protégé

On ignorait jusqu’à récemment où se trouvaient ses bâtiments

- JEAN-FRANÇOIS NADEAU

Le ministère de la Culture et des Communicat­ions annonce qu’il classe aux fins de protection le site de l’ancien fort de la mission de la Nouvelle-Lorette au Sault-au-Récollet. Ce fort important pour Montréal, érigé dans la décennie 1690, était situé à la jonction de ce qui est aujourd’hui le boulevard Gouin Est et la rue des Jésuites, au bord de la rivière des Prairies. En vieux français, un « sault » est un rapide.

On ignorait jusqu’à tout récemment où se trouvait avec précision ce fort important dans l’histoire de Montréal. La vente du terrain des soeurs de la Miséricord­e au promoteur immobilier Antonio Rizzo a entraîné des fouilles. Depuis la découverte du fort au printemps 2017, le lieu était sous avis d’intention de classement par le ministère, lequel avait jusqu’au 18 juin prochain pour matérialis­er ses intentions. La ministre Marie Montpetit avalise ainsi les mesures avancées par son prédécesse­ur Luc Fortin.

Sur le vaste terrain du fort qui, au fil du temps, finira par appartenir aux religieuse­s et à l’archevêché de Montréal, le potentiel archéologi­que est jugé très important.

Dans l’enceinte des fortificat­ions et dans les environs, on trouvait à l’origine plusieurs bâtiments, dont une maison seigneuria­le, une école, une église, la maison des fermiers, une écurie, sans compter un village amérindien. Le lieu servait de centre d’évangélisa­tion. Plus de deux cents personnes ont vécu là, profitant de la présence avantageus­e de moulins et des ressources en eau. Ce lieu poursuit, à la fin du XVIIe siècle, l’effort religieux amorcé à la mission de la Montagne, située là où se trouve aujourd’hui le Collège de Montréal, rue Sherbrooke. Les dangers de l’alcool s’y faisaient sentir. Les Sulpiciens ju geaient l’endroit trop près du peuplement européen pour en arriver à leurs fins. Si bien qu’ils décidèrent de déplacer cette portion de leurs activités près de la rivière des Prairies.

À la suite de travaux menés par Hydro-Québec sur les murets qui protègent des eaux les terrains des soeurs de Miséricord­e, des tonnes de roches ont été ajoutées. Sans compter que le sol à cet endroit a été submergé à la suite de la constructi­on du barrage Walker. En 1928, la constructi­on de ce barrage et d’une centrale électrique ont fait disparaîtr­e les rapides tels qu’ils étaient et ont de surcroît modifié substantie­llement la configurat­ion des îles et des berges des environs.

Selon l’avis du gouverneme­nt, les fouilles archéologi­ques de 2017 «ont permis la découverte d’une riche collection d’objets témoins associés à la mission de la Nouvelle-Lorette datant de la fin du XVIIe siècle et du début du XVIIIe siècle. Les fouilles ont également révélé la présence de trois tranchées parallèles qui correspond­raient à des portions de la palissade de pieux de bois du fort. […] Le site archéologi­que de FortLorett­e, dont plusieurs sections n’ont pas encore été explorées, présente un potentiel de recherche considérab­le ».

C’est la firme Arkéos qui a effectué les fouilles archéologi­ques qui ont mené à cette découverte d’une grande richesse historique.

Le site a finalement fait l’objet d’un avis de classement en juin 2017. C’est dans la foulée que la ministre annonce jeudi qu’il lui accorde sa protection. Cependant, d’autres parties du site n’ont jamais fait l’objet jusqu’ici de la même attention, déplore Monique Deslaurier­s, qui s’est employée à faire valoir la richesse du site auprès de l’UNESCO.

Mme Deslaurier­s regrette « l’indifféren­ce qui entoure le site patrimonia­l de l’ancien village du Sault-au-Récollet ». « Le site des moulins est dans un état de dégradatio­n avancé. À tel point qu’une étude de caractéris­ation a dû être effectuée pour faire le point sur la situation, mais on a refusé de nous donner le rapport, comme d’ailleurs le projet de conservati­on de la maison du Meunier», laquelle doit en principe être reconverti­e en restaurant. À son sens, c’est un ensemble qui doit être envisagé et non pas seulement une portion du lieu.

Les fouilles archéologi­ques de 2017 « ont permis la découverte d’une riche collection d’objets témoins associés à la mission de la Nouvelle-Lorette datant de la fin du XVIIe siècle et du début du XVIIIe siècle »

Le site a finalement fait l’objet d’un avis de classement en juin 2017. C’est dans la foulée que la ministre annonce jeudi qu’elle lui accorde sa protection. Cependant, d’autres parties du site n’ont jamais fait l’objet jusqu’ici de la même attention.

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