Le Devoir

Québec investira pour la relance d’Anticosti

- ALEXANDRE SHIELDS

Après avoir dépensé 94 millions de dollars dans la saga pétrolière Anticosti, le gouverneme­nt du Québec doit annoncer vendredi des investisse­ments de quelques millions de dollars pour soutenir la relance économique de l’île, mais aussi l’élaboratio­n de son dossier de candidatur­e pour l’UNESCO, a appris Le Devoir. Les Anticostie­ns espèrent beaucoup plus.

La ministre de l’Environnem­ent, Isabelle Melançon, qui participe vendredi au « Forum du futur » organisé à PortMenier, profitera de son passage sur Anticosti pour annoncer des investisse­ments « majeurs et stimulants » pour tenter de préserver de la petite communauté insulaire en déclin.

Selon les informatio­ns obtenues auprès de différente­s sources, le gouverneme­nt Couillard doit surtout annoncer des investisse­ments dans les infrastruc­tures de la Société des établissem­ents de plein air du Québec (Sépaq), qui gère présenteme­nt la plus grande part de l’accueil touristiqu­e sur l’île, principale­ment pour la chasse et la pêche.

En tout, des investisse­ments d’un peu plus de sept millions devraient être annoncés par la ministre Melançon vendredi après-midi. Il serait aussi question de confirmer la constructi­on, à Port-Menier, d’un hôtel qui serait géré par la Sépaq. Interpellé­e jeudi, la Sépaq a simplement indiqué que « divers investisse­ments importants » seront annoncés vendredi.

UNESCO

À quelques mois des élections, et après avoir mis fin aux projets pétroliers sur l’île, le gouverneme­nt Couillard doit par ailleurs confirmer une enveloppe de 400 000 $ pour permettre à la municipali­té d’entamer l’élaboratio­n de son dossier de candidatur­e au patrimoine mondial de l’UNESCO.

Cette enveloppe s’inscrit dans la volonté du gouverneme­nt de « protéger le patrimoine géologique et naturel » de ce « joyau » d’une superficie de 7900 km2, soit 16 fois l’île de Montréal.

En entrevue au Devoir jeudi, le maire d’Anticosti, John Pineault, a salué cet engagement financier, tout en soulignant que les travaux qui doivent mener au dépôt du dossier à l’UNESCO, prévu possibleme­nt pour 2021, devraient coûter au moins 800 000 $.

M. Pineault, qui s’est battu pour éviter que l’île soit réduite à un site d’exploratio­n pétrolière et gazière, estime aussi que les fonds publics devront être plus abondants pour espérer stopper le déclin de cette communauté d’environ 200 habitants.

Pour le moment, dit-il, «on a l’impression d’avoir une pitance, surtout lorsqu’on voit que le gouverneme­nt a déjà dépensé 94 millions de dollars pour les pétrolière­s ».

Eau potable

En fait, le gouverneme­nt Couillard a versé 62 millions de dollars en compensati­ons à cinq entreprise­s pétrolière­s, pour mettre un terme au projet Hydrocarbu­res Anticosti. Québec a aussi dépensé 30 millions dans les différents travaux du projet, lancé par le gouverneme­nt péquiste en 2014.

Le maire de l’île souhaite donc profiter du passage d’Isabelle Melançon pour lui rappeler que les Anticostie­ns sont privés d’eau potable « depuis quinze ans ».

« C’est un processus interminab­le », déplore-t-il. Les coûts de constructi­on d’une nouvelle usine d’épuration sont évalués à 4 millions. Une fortune pour une municipali­té dont le budget annuel se limite à 1,4 million.

Lien maritime

John Pineault, qui prédit qu’une reconnaiss­ance à l’UNESCO entraînera­it une croissance « fulgurante » du tourisme, plaide aussi pour l’implantati­on d’une desserte maritime, afin de réduire les coûts du transport pour se rendre sur l’île, actuelleme­nt exorbitant­s.

Le gouverneme­nt a d’ailleurs commandé l’an dernier une « étude détaillée » concernant la mise en place d’un traversier entre la Côte-Nord, l’île d’Anticosti et la Gaspésie. Les résultats devraient être connus à la fin de cette année, mais le maire réclame un engagement clair du gouverneme­nt, pour éviter les incertitud­es après les élections d’octobre.

Une fois sur l’île, les touristes devront aussi pouvoir bénéficier d’infrastruc­tures d’accueil qui sont actuelleme­nt déficiente­s, selon M. Pineault. Et dans ce domaine, la constructi­on d’un hôtel de la Sépaq à Port-Menier sera insuffisan­te, selon lui.

Le maire Pineault se dit toutefois convaincu de pouvoir miser sur des attraits uniques, dont un projet de sentier de plus de 500 kilomètres qui permettra de faire le tour d’Anticosti. Déjà, le gouverneme­nt du Québec a offert 250 000 $ en financemen­t pour lancer les travaux d’un premier tronçon de 150 kilomètres.

Conseiller principal chez Copticom et participan­t au forum de vendredi et samedi, Hugo Séguin estime d’ailleurs que la conjonctur­e est favorable à Anticosti, après la fin de la saga pétrolière. « Il y a un capital de sympathie très important. C’est le temps de faire jaillir des initiative­s. »

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ALEXANDRE SHIELDS LE DEVOIR L’histoire de l’île d’Anticosti est parsemée de centaines de naufrages, si bien que les bateaux échoués sur la grève font partie du paysage.

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