Québec investira pour la relance d’Anticosti
Après avoir dépensé 94 millions de dollars dans la saga pétrolière Anticosti, le gouvernement du Québec doit annoncer vendredi des investissements de quelques millions de dollars pour soutenir la relance économique de l’île, mais aussi l’élaboration de son dossier de candidature pour l’UNESCO, a appris Le Devoir. Les Anticostiens espèrent beaucoup plus.
La ministre de l’Environnement, Isabelle Melançon, qui participe vendredi au « Forum du futur » organisé à PortMenier, profitera de son passage sur Anticosti pour annoncer des investissements « majeurs et stimulants » pour tenter de préserver de la petite communauté insulaire en déclin.
Selon les informations obtenues auprès de différentes sources, le gouvernement Couillard doit surtout annoncer des investissements dans les infrastructures de la Société des établissements de plein air du Québec (Sépaq), qui gère présentement la plus grande part de l’accueil touristique sur l’île, principalement pour la chasse et la pêche.
En tout, des investissements d’un peu plus de sept millions devraient être annoncés par la ministre Melançon vendredi après-midi. Il serait aussi question de confirmer la construction, à Port-Menier, d’un hôtel qui serait géré par la Sépaq. Interpellée jeudi, la Sépaq a simplement indiqué que « divers investissements importants » seront annoncés vendredi.
UNESCO
À quelques mois des élections, et après avoir mis fin aux projets pétroliers sur l’île, le gouvernement Couillard doit par ailleurs confirmer une enveloppe de 400 000 $ pour permettre à la municipalité d’entamer l’élaboration de son dossier de candidature au patrimoine mondial de l’UNESCO.
Cette enveloppe s’inscrit dans la volonté du gouvernement de « protéger le patrimoine géologique et naturel » de ce « joyau » d’une superficie de 7900 km2, soit 16 fois l’île de Montréal.
En entrevue au Devoir jeudi, le maire d’Anticosti, John Pineault, a salué cet engagement financier, tout en soulignant que les travaux qui doivent mener au dépôt du dossier à l’UNESCO, prévu possiblement pour 2021, devraient coûter au moins 800 000 $.
M. Pineault, qui s’est battu pour éviter que l’île soit réduite à un site d’exploration pétrolière et gazière, estime aussi que les fonds publics devront être plus abondants pour espérer stopper le déclin de cette communauté d’environ 200 habitants.
Pour le moment, dit-il, «on a l’impression d’avoir une pitance, surtout lorsqu’on voit que le gouvernement a déjà dépensé 94 millions de dollars pour les pétrolières ».
Eau potable
En fait, le gouvernement Couillard a versé 62 millions de dollars en compensations à cinq entreprises pétrolières, pour mettre un terme au projet Hydrocarbures Anticosti. Québec a aussi dépensé 30 millions dans les différents travaux du projet, lancé par le gouvernement péquiste en 2014.
Le maire de l’île souhaite donc profiter du passage d’Isabelle Melançon pour lui rappeler que les Anticostiens sont privés d’eau potable « depuis quinze ans ».
« C’est un processus interminable », déplore-t-il. Les coûts de construction d’une nouvelle usine d’épuration sont évalués à 4 millions. Une fortune pour une municipalité dont le budget annuel se limite à 1,4 million.
Lien maritime
John Pineault, qui prédit qu’une reconnaissance à l’UNESCO entraînerait une croissance « fulgurante » du tourisme, plaide aussi pour l’implantation d’une desserte maritime, afin de réduire les coûts du transport pour se rendre sur l’île, actuellement exorbitants.
Le gouvernement a d’ailleurs commandé l’an dernier une « étude détaillée » concernant la mise en place d’un traversier entre la Côte-Nord, l’île d’Anticosti et la Gaspésie. Les résultats devraient être connus à la fin de cette année, mais le maire réclame un engagement clair du gouvernement, pour éviter les incertitudes après les élections d’octobre.
Une fois sur l’île, les touristes devront aussi pouvoir bénéficier d’infrastructures d’accueil qui sont actuellement déficientes, selon M. Pineault. Et dans ce domaine, la construction d’un hôtel de la Sépaq à Port-Menier sera insuffisante, selon lui.
Le maire Pineault se dit toutefois convaincu de pouvoir miser sur des attraits uniques, dont un projet de sentier de plus de 500 kilomètres qui permettra de faire le tour d’Anticosti. Déjà, le gouvernement du Québec a offert 250 000 $ en financement pour lancer les travaux d’un premier tronçon de 150 kilomètres.
Conseiller principal chez Copticom et participant au forum de vendredi et samedi, Hugo Séguin estime d’ailleurs que la conjoncture est favorable à Anticosti, après la fin de la saga pétrolière. « Il y a un capital de sympathie très important. C’est le temps de faire jaillir des initiatives. »