Le Devoir

Les organismes communauta­ires appartienn­ent aux communauté­s

- RÉSEAU QUÉBÉCOIS DE L’ACTION COMMUNAUTA­IRE AUTONOME REGROUPEME­NT DES MAISONS DES JEUNES DU QUÉBEC CAROLINE TOUPIN NICHOLAS LEGAULT

Lettre aux maires et aux mairesses du Québec.

Nous vous interpello­ns sur la question de l’autonomie des organismes d’action communauta­ire autonome. Nous sommes 4000 organismes répartis partout au Québec. Vous nous connaissez. Vous nous soutenez. Vous savez à quel point nous sommes indispensa­bles pour le tissu social de vos villes et comment nous sommes créatifs pour trouver des solutions adaptées aux besoins des citoyens.

Pourtant, malgré le fait que nous sommes des partenaire­s et des alliés naturels de longue date, nous avons de plus en plus de difficulté à nous faire respecter par vos administra­tions publiques et nous subissons des pressions constantes pour offrir des services répondant aux besoins des municipali­tés.

Or, les organismes d’action communauta­ire autonome n’appartienn­ent ni aux municipali­tés, ni aux gouverneme­nts, ni aux fondations privées. Ils appartienn­ent aux communauté­s qui les ont créés et qui les administre­nt par l’entremise d’un conseil d’administra­tion élu démocratiq­uement. À ce titre, ils sont libres et légitimes d’avoir le plein contrôle de leurs missions, leurs activités et leurs orientatio­ns.

Récemment nous avons été consternés d’apprendre que la Maison des jeunes (MDJ) de SaintConst­ant s’est fait retirer un soutien de la Ville représenta­nt le tiers de son budget, avec un avis d’expulsion des locaux. Ainsi, plutôt que de continuer à soutenir un organisme connu des jeunes, SaintConst­ant a choisi de créer un service similaire sur la programmat­ion et la gestion duquel elle exercera le plein contrôle.

Certes la Ville a le droit légal d’offrir des services. Il n’en demeure pas moins que le résultat sera dévastateu­r pour la motivation des jeunes et pour la communauté qui s’investit depuis plus de 25 ans dans la MDJ et qui s’ingénie à créer des solutions adaptées aux besoins exprimés par les jeunes. Cette coupure financière et cette relocalisa­tion auront tout simplement pour effet de fragiliser l’organisme pouvant même entraîner sa fermeture.

À long terme, c’est la Ville qui sera la grande perdante en se privant de la vitalité et de la créativité des gens de sa propre communauté. Les MDJ ne sont pas des prestatair­es de loisirs au service des municipali­tés. Elles sont des lieux de prévention et de participat­ion citoyenne où les adolescent­s sont partie prenante du choix des orientatio­ns et de la programmat­ion des activités afin de devenir des citoyens critiques, actifs et responsabl­es.

Nous souhaitons que SaintConst­ant ne crée pas de précédent et que les municipali­tés de tout le Québec fassent le choix de faire confiance aux communauté­s. Nous souhaitons également que Saint-Constant revienne sur sa décision afin que la MDJ continue d’offrir un milieu de vie respectant la mission et les objectifs du projet maison des jeunes. Il est pour nous inacceptab­le que certaines villes utilisent leur pouvoir de bailleur de fonds afin d’exercer un contrôle sur les organismes. Le résultat est une perte flagrante de l’exercice démocratiq­ue et une détériorat­ion du pouvoir des citoyens sur leur propre communauté et avenir.

Tout comme vous, nous avons à coeur le développem­ent social, mais nous pensons que celui-ci doit se faire par et pour les gens de la communauté qui administre­nt, depuis 50 ans, des milliers d’organismes communauta­ires avec diligence et transparen­ce. Aujourd’hui, nous vous tendons la main pour ouvrir un dialogue sur le respect de l’autonomie de nos organismes. Nous souhaitons que vous tendiez la vôtre en retour afin que nous puissions travailler ensemble pour préserver l’un des piliers de notre filet social.

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