Le Devoir

Artisan de son propre malheur

En panne devant l’inoffensiv­e Corée du Sud, l’Allemagne subit une humiliante éliminatio­n

- KARL RETTINO-PARAZELLI

L’Allemagne éliminée d’une Coupe du monde de la FIFA, ça peut toujours passer. Mais voir la plus puissante équipe de l’heure écartée dès la phase de groupes par l’une des formations les moins bien classées du tournoi défie l’entendemen­t. Lorsqu’ils auront digéré leur défaite, s’ils y parviennen­t, les Allemands réaliseron­t cependant qu’ils n’ont qu’eux à blâmer.

En subissant une improbable défaite de 2-0 mercredi face à la Corée du Sud, l’Allemagne a marqué l’histoire du soccer internatio­nal, mais pas de la manière espérée. Elle a subi l’éliminatio­n dès le premier tour du Mondial pour une première fois depuis 1938.

En ne marquant que deux buts lors du tournoi, la Mannschaft a inscrit son plus faible total de filets lors d’une Coupe du monde.

Et surtout, en se faisant montrer la sortie lors de la phase de groupes quatre ans après avoir été couronnée au Brésil, l’Allemagne a elle aussi été victime de la malédictio­n des champions en titre du Mondial. La France en 2002, l’Italie en 2010 et l’Espagne en 2014 ont toutes subi le même sort.

Manque d’opportunis­me

Parmi l’avalanche de statistiqu­es qui a déferlé à la suite de la déconfitur­e allemande, les plus éclairante­s pointent la performanc­e des joueurs sur le terrain.

Mercredi, l’Allemagne a obtenu un décoiffant total de 28 chances de marquer, contre 12 pour son adversaire, et a outrageuse­ment dominé les SudCoréens en ce qui concerne la possession du ballon (74 %).

Selon le modèle statistiqu­e élaboré par le réseau ESPN, une équipe ayant eu autant d’occasions que les Allemands aurait dû marquer 2,9 buts.

Mais puisque la puissance européenne n’a pas réussi à trouver le fond du filet, ESPN a conclu que l’écart de 2,9 entre le nombre de buts prévus et réellement marqués est le plus grand jamais enregistré dans un match de la Coupe du monde de la FIFA depuis 1966.

En un mot, les Allemands ont creusé leur propre tombe en manquant cruellemen­t d’opportunis­me.

Selon le site spécialisé en statistiqu­es sportives Opta, les champions de la Coupe des confédérat­ions 2017 ont inscrit 2 buts sur 72 tirs, pour un médiocre taux d’efficacité de 3 %.

Cette Coupe du monde 2018 a donné lieu à de grandes surprises dès les premiers matchs, au point où on se demandait si l’Espagne, puis l’Argentine parviendra­ient à se qualifier en dépit de leurs débuts laborieux.

Les deux équipes ont finalement trouvé les réponses à temps, mais les Allemands ont été à court de miracles.

Une victoire de 1 à 0 aurait été suffisante pour assurer leur qualificat­ion.

Merci, « mon frère »

Face à la Corée du Sud, 57e au classement de la FIFA, la tâche ne semblait pas trop ardue, mais les Sud-Coréens — et leur brillant gardien de but — en ont décidé autrement. Le site spécialisé en journalism­e de données FiveThirty­Eight ne donnait pourtant pas cher de la peau du pays asiatique, avec seulement 5 % de chances de gagner contre les Allemands.

La Suède termine donc première du groupe, grâce à un gain de 3 à 0 face au Mexique, tandis que le pays nord-américain profite de la victoire sud-coréenne pour se qualifier, ce qui explique le slogan scandé mercredi par des partisans mexicains en liesse, en Russie comme ailleurs : « Mon frère coréen, tu es maintenant mexicain. »

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FRANK AUGSTEIN ASSOCIATED PRESS L’Allemand Niklas Suele est dépité alors que les Sud-Coréens célébrent leur victoire.

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