La guerre entre les États-Unis et la Chine est commencée
Les États-Unis et la Chine s’échangent les assauts de ce que d’aucuns considèrent déjà comme le début de « la plus grande guerre commerciale de l’histoire économique ».
Comme attendu, le gouvernement de Donald Trump a confirmé, dans la nuit de jeudi à vendredi, l’imposition de tarifs douaniers de 25% sur des biens importés de la Chine d’une valeur annuelle de 34 milliards de dollars américains. Il souhaite ainsi obliger Pékin à changer ses pratiques commerciales à l’égard, notamment, des compagnies étrangères en matière de difficulté d’accès à son marché intérieur et de transfert forcé de propriété intellectuelle. Comme promis, la Chine a immédiatement annoncé qu’elle entendait frapper des importations provenant des États-Unis de contre-mesures commerciales d’une valeur égale.
Le président américain a rappelé jeudi que d’autres sanctions contre des importations chinoises d’une valeur de 16 milliards entreraient en vigueur probablement d’ici deux semaines et que s’il venait aux Chinois l’idée de répondre aux mesures américaines, il était prêt à ajouter à ces premiers 50 milliards une autre volée de tarifs sur 200 milliards d’importations, et de rajouter, au besoin, encore 200 ou 300 milliards. «OK? Ça nous fait 50, plus 200, plus presque 300 », a résumé jeudi Donald Trump aux journalistes qui commençaient à perdre le compte. On les comprend, le total des importations chinoises aux États-Unis s’étant élevé l’an dernier à 506 milliards.
La Chine a accusé vendredi le gouvernement Trump d’avoir lancé «la plus grande guerre commerciale de l’histoire économique ». En plus d’annoncer sa première série de représailles, elle a porté l’affaire devant l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Ces nouvelles sanctions contre la Chine s’ajoutent à celles récemment appliquées contre elle aux États-Unis dans l’acier et l’aluminium, les machines à laver et les panneaux solaires, sans compter les nouvelles restrictions imposées à ses investissements et à l’entrée de ses ressortissants.
Afin d’éviter de toucher directement les consommateurs américains, les tarifs appliqués depuis vendredi par Washington visent l’importation de biens industriels intermédiaires chinois, comme des pièces d’avion et de voitures élec- triques ou encore de l’équipement lourd utilisé en agriculture, dans la construction et dans le secteur minier. Comme d’autres pays avant elle, la Chine a cherché, quant à elle, à ce que ses représailles fassent mal à la base électorale du président américain, en frappant notamment des produits agricoles, l’industrie automobile et le bourbon.
Du jamais vu depuis les années 30
Cette bataille de titans qui s’amorce entre les deux premières économies mondiales s’annonce comme la plus importante campagne de la guerre lancée par Donald Trump contre un ordre commercial international que le président qualifie de fondamentalement biaisé contre son pays. Depuis son entrée à la MaisonBlanche, il y a seulement un an et demi, le chef américain a notamment sorti son pays du Partenariat transpacifique et forcé la réouverture de l’Accord de libreéchange nord-américain (ALENA), en plus d’imposer au monde entier des tarifs sur l’acier et l’aluminium et de le menacer aujourd’hui de sanctions plus douloureuses encore dans l’automobile. Comme la Chine, le Canada, l’Union européenne et les autres pays touchés par ces tarifs ont pris le parti jusqu’à présent de ne jamais être les premiers à tirer, mais de rendre coup pour coup.
Cette situation constitue, sans conteste, la plus grande bataille commerciale lancée par les États-Unis depuis la Grande Dépression, concluait vendredi le Wall Street Journal. Comme le président Trump et Pékin apparaissent déterminés à ne pas reculer et que la bonne tenue de l’économie retardera probablement le moment où commencera vraiment à se faire ressentir l’impact de leur guerre commerciale, cette dernière pourrait se poursuivre, crainton, pendant des mois, voire plus longtemps encore.
Conséquences incertaines
Pour l’instant, ces dommages économiques apparaissent relativement modestes à la plupart des experts. Cela pourrait changer si les États-Unis et la Chine allaient au bout de leurs menaces, expliquait vendredi l’économiste en chef de Moody’s Analytics, Mark Zandi, dans le Wall Street Journal.
Dans ce cas, c’est plus de la moitié de la croissance attendue l’an prochain aux États-Unis qui pourrait être perdue.
Mais les experts sous-estiment lourdement l’impact de toutes ces mesures sur des économies nationales de plus en plus globalisées et étroitement intégrées, dit l’économiste. Nos modèles théoriques ne permettaient pas de prédire, par exemple, que la compagnie américaine Harley-Davidson en conclurait récemment qu’il valait mieux pour elle déménager en Europe la fabrication de ses célèbres motos destinées à ce marché.
En plus d’annoncer sa première série de représailles, la Chine a porté l’affaire devant l’Organisation mondiale du commerce