Une fabulation
La cigale est érigée en symbole de la musique divine depuis l’Antiquité. Platon résume dans Phèdre le mythe de son apparition. Il explique que les cigales étaient « jadis des hommes » tellement bouleversés par le chant des muses qu’ils en oublièrent de s’alimenter et moururent « sans s’en apercevoir ». Le philosophe ajoute qu’en renaissant, « la cigale a reçu le privilège de n’avoir nul besoin de nourriture et de se mettre à chanter tout de suite, sans manger, ni boire, jusqu’à la mort ».
Ses arpèges étaient appréciés dans la Grèce antique comme un hymne au soleil et à la chaleur. La cigale se retrouve représentée sur des pièces de monnaie, des poteries, en sculpture, par les bijoux, en plus d’être célébrée en poésie.
Ésope la met en scène dans un apologue que pastiche Jean de La Fontaine dans sa célébrissime fable
La cigale et la fourmi, première fable du premier de ses recueils paru en 1668. L’écrivain met à mal la réputation de l’artiste des bois, dépeinte comme imprévoyante et insouciante comparativement à sa voisine travailleuse et économe.
Jean-Jacques Rousseau mettait en garde contre ce texte censé donner en modèle aux enfants une avaricieuse et une moqueuse, méchante de surcroît. Un entomologiste, JeanHenri Fabre, a noté les erreurs de la fable fabulatrice. La plus évidente souligne que la cigale ne mange ni mouche ni vermisseau.
« La cigale sert de nourriture à d’autres animaux, note Marjolaine Giroux, de l’Insectarium. Son rôle n’est pas aussi important que celui de l’abeille qui pollinise. Ce n’est pas une fourmi non plus, mais les fourmis sont aussi des insectes sociaux très évolués capables de collaboration. Toutefois, la cigale est capable de communiquer avec des sons, et ce trait particulier en fait un insecte impressionnant du point de vue évolutif. » Pour en savoir plus : Vies et mémoires
de cigales, Michel Boulard et Bernard Mondon, Équinoxe, 1995.