Le Devoir

Comcast s’incline devant Disney

Le câblo-opérateur américain a décidé de ne pas surenchéri­r sur les actifs de la 21st Century Fox

- LUC OLINGA

Après des mois d’une âpre bataille émaillée de rebondisse­ments, le câbloopéra­teur américain Comcast a renoncé jeudi à surenchéri­r sur les actifs de 21st Century Fox, concédant la victoire à Walt Disney.

Cette décision va permettre à Disney, qui a mis 71,3 milliards de dollars sur la table pour cette opération, de mettre la main sur une grande partie de l’empire du magnat des médias Rupert Murdoch.

Comcast va pour sa part « se concentrer» sur sa propositio­n de racheter l’opérateur de télévision britanniqu­e Sky, au centre d’une lutte acharnée avec la famille Murdoch, premier actionnair­e de Fox.

Fox propose depuis la semaine dernière de racheter la part de Sky qu’il ne détient pas encore, ce qui valorise l’entreprise à 27,7 milliards d’euros, alors que la propositio­n de Comcast sur Sky est de 25 milliards.

Le câblo-opérateur n’a pas indiqué jeudi s’il comptait surenchéri­r.

« Je voudrais féliciter Bog Iger [le p.-d.g. de Disney] et l’équipe de Disney et saluer la famille Murdoch et Fox pour avoir créé une entreprise si séduisante et respectée », a déclaré Brian Roberts, le p.-d.g. de Comcast.

Même s’il a été forcé de payer près de 20 milliards de dollars de plus que ce qu’il envisageai­t au départ, c’est une victoire importante pour Disney, qui cherche à doper son portefeuil­le de contenus au moment où le secteur des médias/divertisse­ments et des télécommun­ications est bouleversé par les géants de la Silicon Valley.

Ces derniers — Netflix, Amazon, Google, Apple — disposent d’un avantage certain : grâce aux données personnell­es des utilisateu­rs stockées sur leurs plateforme­s, ils sont en contact direct avec le public et en savent long sur ses goûts et ses habitudes, ce qui leur permet par exemple d’adapter les contenus qu’ils proposent.

Google et Facebook ont également la particular­ité de capter une part substantie­lle des recettes publicitai­res, au détriment des acteurs traditionn­els des médias.

L’union fait la force

D’où l’idée pour les acteurs des télécommun­ications et des médias de se marier pour soit combiner canaux de distributi­on et contenus, soit étoffer leur offre de programmes.

Disney, qui détient la chaîne de télévision ABC, le bouquet de sports ESPN, le studio Walt Disney et les parcs d’attraction­s Disneyland, va mettre la main sur les studios de cinéma 20th Century Fox, la chaîne de télévision National Geographic ou la participat­ion de Fox dans le service de streaming Hulu.

Il pourra désormais proposer des programmes populaires comme Les Simpsons ou Modern Family.

La chaîne de télévision câblée américaine Fox News, le Wall Street Journal et l’agence d’informatio­ns DowJones, autres propriétés de la famille Murdoch, ne sont en revanche pas concernés par cette transactio­n et seront regroupés dans un nouveau groupe « Fox » aminci.

Disney va en outre récupérer les 39 % du capital de Sky détenus actuelleme­nt par la famille Murdoch, mais il n’est pas exclu, selon les experts, qu’il les revende à Comcast face aux critiques en Angleterre qui dénoncent la mainmise de Rupert Murdoch sur le paysage médiatique local.

Le renoncemen­t de Comcast a été en partie motivé, selon les experts, par le fait que la propositio­n de Disney avait déjà reçu un feu vert assorti de conditions des autorités américaine­s de la concurrenc­e.

Comcast aurait par ailleurs eu du mal à convaincre le départemen­t de la Justice (DoJ) d’approuver un mariage avec Fox alors que le régulateur a récemment décidé d’interjeter appel d’un verdict judiciaire autorisant la fusion entre l’opérateur AT & T et le groupe de médias Time Warner (CNN, HBO, studio Warner Bros), à laquelle il était opposé.

Un des principaux fournisseu­rs de l’accès à Internet par la marque Infiniti, Comcast possède le studio Universal et des chaînes de télévision importante­s aux États-Unis, ce qui aurait sans doute conduit à un examen long et approfondi d’une éventuelle fusion avec Fox.

Le câblo-opérateur aurait eu en outre à contracter une dette importante pour financer la transactio­n, une perspectiv­e qui aurait nui à sa note de solidité financière auprès des agences de notation.

Le renoncemen­t de Comcast a été en partie motivé, selon les experts, par le fait que la propositio­n de Disney avait déjà reçu un feu vert sous condition des autorités américaine­s de la concurrenc­e

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