Le Devoir

Alcoa laisse entendre des investisse­ments pour ABI

- JULIEN ARSENAULT

Alors que le lockout dure depuis plus de six mois à l’Aluminerie de Bécancour (ABI), l’employeur semble faire miroiter de nouveaux investisse­ments dans l’usine une fois que le conflit de travail sera terminé.

« C’est une usine où nous aimerions investir à long terme », a expliqué le président et chef de la direction d’Alcoa, Roy Harvey, qui participai­t à une conférence téléphoniq­ue avec les analystes, mercredi, en début de soirée, visant à discuter de la performanc­e du géant de l’aluminium au deuxième trimestre.

Interrogé sur ses propos, le grand patron du géant américain de l’aluminium n’a toutefois pas voulu préciser davantage ses intentions.

Les 1030 travailleu­rs d’ABI ont été mis en lockout par la direction de l’entreprise le 11 janvier dernier, au lendemain de leur rejet des offres patronales. Les deux parties continuent à se parler malgré leurs différends.

« Nous estimons que ces discussion­s constituen­t une occasion de changer les choses et de s’assurer de ne plus avoir ce genre de dispute à l’avenir pour jeter les bases de ce qui pourrait être un site de classe mondiale positionné pour connaître du succès à long terme », a dit M. Harvey, en réponse à la question d’un analyste.

Sujet inédit

Au fil du temps, les travailleu­rs de l’aluminerie, qui sont affiliés à la FTQ, disent avoir déjà eu vent des intentions d’Alcoa visant à éventuelle­ment investir à ABI.

Néanmoins, cette question n’a jamais été abordée de front à la table des négociatio­ns, a indiqué jeudi le président de la section locale 9700 du Syndicat des Métallos, Clément Masse, au cours d’un entretien téléphoniq­ue. « Jamais on ne nous a dit “en échange d’un investisse­ment d’un certain montant, nous voudrions obtenir des concession­s” », a-t-il dit.

Selon la partie syndicale, le fossé s’est élargi avec l’employeur, qui, selon les travailleu­rs, désire maintenant réduire le personnel dans une proportion de 20 %.

Pour M. Masse, si Alcoa veut faire avancer les pourparler­s, qui se déroulent sous la supervisio­n de l’ex-premier ministre du Québec Lucien Bouchard, appelé en renfort comme médiateur au mois d’avril, l’entreprise devra modifier ses demandes.

« Ce n’est pas une façon de négocier que de revenir avec de nouvelles demandes à la table après six mois de conflit », a déploré le président de la section locale 9700 des Métallos.

Par ailleurs, le syndicat a acheté un rapport produit par la firme britanniqu­e Commoditie­s Research Unit (CRU), spécialisé­e dans les données financière­s sur le secteur de l’aluminium, qui évalue à plus d’un demi-milliard de dollars les pertes financière­s attribuabl­es au lockout.

Citant le document, les Métallos affirment qu’Alcoa et Rio Tinto se privent mensuellem­ent de revenus de 66 millions de dollars et de profits de 26 millions. De plus, Hydro-Québec a été privée de 114 milliards en recettes tirées des ventes d’électricit­é.

La partie syndicale estime en outre que ces données colligées par CRU sont « conservatr­ices », étant donné qu’elles ne tiennent pas compte de l’arrêt de production de billettes et de plaques de métal, qui constituen­t des produits à « plus forte valeur ajoutée ».

ABI est propriété à 75 % d’Alcoa et à 25 % de Rio Tinto. Pendant le lockout, l’usine est exploitée par des cadres, mais à raison d’une série de cuves sur trois.

Au début du mois, dans le cadre d’une assemblée générale, les 1030 travailleu­rs ont confirmé dans une proportion de 90 % les orientatio­ns qu’ils avaient données à leur comité de négociatio­n.

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