Le Devoir

Les authentiqu­es Ramones à Montréal

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Si les Fucking Raymonds permettron­t vendredi après-midi aux millénaria­ux de remonter le temps et de hurler « Gabba Gabba Hey » (leur cri de ralliement), les vrais de vrais Ramones ont déjà hurlé « Hey ! Ho ! Let’s Go ! » (leur autre cri de ralliement) à plusieurs reprises à Montréal : en 1977 en première partie d’Iggy Pop, en 1995, pour une dernière fois, à l’Auditorium de Verdun, ainsi que le 23 mai 1980, à l’auditorium Le Plateau. C’est Lucien Francoeur qui, ce soir-là, met la table pour les squelettiq­ues New-Yorkais, à l’invitation du producteur Donald K. Donald.

« Dans le temps, quand on se faisait cracher dessus [par le public], c’était pas toujours clair si c’était une marque d’appréciati­on ou une insulte », se rappelle le poète rock en évoquant une salle remplie de « punks à maman du West Island, qui n’avaient aucune idée de qui j’étais ». « Quand j’ai reçu un premier crachat sur mes pantalons en cuir, je me suis mis à donner des coups de pied avec mes santiags très pointus. Les épingles à couche revolaient, le sang a coulé, je me suis fait pogner par les jambes, je suis tombé par terre, j’en ai kické quatre, cinq, mais ils ont tellement aimé ça qu’ils

ont arrêté d’être hostiles. En sortant de scène, les Ramones nous ont embrassés et nous ont dit: “We didn’t get all the words, but we know

you’re on our side .”»

Alan Lord, un pilier du punk montréalai­s qui accompagna­it à l’époque Francoeur à la guitare, dit ne pas se souvenir de pareille échauffour­ée. Mais il n’oubliera jamais la fascinante et militaire éthique de travail de ses héros. « De retour

backstage, notre band s’est remis à boire et à fumer comme on l’avait fait avant d’entrer sur scène. Mais ce fut un choc d’observer les Ramones faire des exercices de “warm up” avant leur show : Johnny et Dee Dee jouaient furieuseme­nt leurs grattes à sec, et Marky martelait un banc avec ses baguettes comme un débile. Au lieu de boire, de fumer et de raconter des blagues, ces dieux olympiens du punk se réchauffai­ent comme de véritables athlètes olympiques ! […] », écrivait-il en 2007 dans la défunte revue contre-culturelle Steak Haché.

« Car oui, afin de pouvoir sauter sur un stage et livrer un vrai show destroy, il faut d’abord se lever tôt et s’entraîner sérieuseme­nt. Ce fut une sacrée leçon punk pour moi. »

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