Québec approuve le projet minier d’Arianne Phosphate
investissements requis pour l’ensemble du projet, de la faiblesse des prix [du phosphate sur les marchés], d’un marché saturé et de l’absence de partenaires financiers », souligne-t-il en conclusion de son analyse.
« Aussi, sans même prendre en compte les différents enjeux environnementaux et sociaux associés aux trois composantes du projet minier [la mine, le chemin d’accès au terminal portuaire et le terminal], le projet pris dans son ensemble ne semble pas justifiable économiquement à court ou moyen terme, sur un horizon d’au moins 10 ans », ajoute M. McCollough.
L’économiste rappelle que le contexte du marché du phosphate (l’apatite est composée de phosphate) semble pour le moins incertain pour les prochaines années. Selon les prévisions de la Banque mondiale, le prix de la tonne de phosphate, qui se situe sous les 100 $ US depuis plus de deux ans, ne devrait pas atteindre 125 $ avant au moins 2030. Or, selon les données d’Arianne Phosphate citées par l’économiste du MDDELCC, le seuil de rentabilité du projet se situerait entre 125 $ et 130 $ la tonne.
Preuve que le marché international est difficile, l’autre projet de mine d’apatite dont le gouvernement du Québec est actionnaire, Mine Arnaud, à Sept-Îles, est toujours au point mort malgré son approbation en mars 2015 et les millions injectés par Québec.
Arianne Phosphate, dont la mine à elle seule nécessiterait des investissements de plus de 1,2 milliard de dollars, ne doute pourtant pas de la rentabilité de son projet. «Pour nous, Mine Arnaud ou le futur projet au Sénégal ou les études d’une expansion au Pérou sont des projets dans “l’environnement phosphate” dont nous devons tenir compte mais qui n’ont pas d’impact sur la suite des choses pour Arianne. L’année 2021 est un point de rupture sur les marchés et nous devons être prêts pour utiliser cette fenêtre pour livrer notre production », explique le chef des opérations, Jean-Sébastien David.
Au moment d’approuver la construction de cette importante mine à ciel ouvert, le 22 décembre 2015, le premier ministre Philippe Couillard avait pour sa part affirmé que le projet « présente un potentiel de retombées économiques important pour le Québec». Son gouvernement a d’ailleurs injecté jusqu’à présent 3,4 millions de dollars dans le projet.
Port à revoir
L’analyse produite par le MDDELCC dans le cadre de l’examen de l’ACEE remet par ailleurs en question la construction de l’imposant terminal maritime d’exportation, tel qu’il est prévu par l’Administration portuaire du Saguenay, promoteur de ce projet de 260 millions.
Pour le moment, il est prévu de construire un port « multi-usagers » à Sainte-Rose-du-Nord, sur la rive nord du Saguenay, à cinq kilomètres du parc marin. « En fonction du développement probable dans ce secteur du territoire qui amènera des projets potentiels, un quai multi-usagers peut éviter d’avoir une demande de multiplication des infrastructures dans l’avenir », explique le directeur, commercialisation et projets, Frédéric Lebrun.
Cette portion du projet n’a pas été étudiée dans le cadre de l’évaluation du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) menée en 2015, puisque le promoteur estime que le projet est de compétence fédérale. Dans son rapport, le BAPE soulignait pourtant que le projet minier devrait être autorisé seulement à la suite d’une évaluation environnementale québécoise du projet de port.
Les experts du MDDELCC estiment aujourd’hui qu’il n’est pas possible de « conclure à l’acceptabilité environnementale » d’un tel terminal, qui aurait une longueur de 280 mètres sur la rive du Saguenay. Ils soulignent ainsi qu’« un empiétement supplémentaire significatif sur le fond marin, en rive ou en milieu terrestre serait occasionné par la présence d’infrastructures d’un tel équipement », mais aussi que « son implantation modifierait de façon importante et irréversible le paysage du fjord ».
Dans ce contexte, ils recommandent la construction d’une infrastructure « de moindre envergure », uniquement destinée au projet d’Arianne Phosphate.