Le Devoir

La gestion de l’offre, sans les compromis ?

Québec réitère son appui au système, mais refuse un quelconque « plan B »

- MARIE-MICHÈLE SIOUI À STOWE LE DEVOIR

Le message a été le même, lundi, du Vermont à l’Île-du-Prince-Édouard : le Québec et le Canada ne sacrifiero­nt pas le système de gestion de l’offre dans le cadre de la renégociat­ion de l’ALENA.

De l’Atlantique, le premier ministre, Justin Trudeau, a attesté au micro de CBC qu’il n’avait « absolument pas » l’intention de renoncer à ce mécanisme de contrôle des prix.

De Stowe au Vermont, où il se trouve pour la Conférence des gouverneur­s de la Nouvelle-Angleterre et des premiers ministres de l’Est du Canada, le négociateu­r en chef de l’ALENA pour le Québec, Raymond Bachand, a servi le même message.

« Oui », il est possible de conclure un accord en maintenant la gestion de l’offre, a-t-il attesté. « La position canadienne est très, très claire, et même les Américains ne demandent plus l’abolition de la gestion de l’offre », a-t-il ajouté. Et d’ailleurs : « On se rend compte qu’aux États-Unis, il n’y a pas un seul gouverneur qui a demandé la fin de l’ALENA, comme il n’y a pas un seul sénateur [qui l’a fait] », a-t-il souligné.

Face à une «Maison-Blanche très particuliè­re» — comme l’a qualifiée Raymond Bachand —, les approches effectuées par les Canadiens auprès des élus locaux se révèlent jusqu’ici plus fructueuse­s, ont observé les gouverneur­s et premiers ministres présents. « C’est pourquoi c’est aussi important, pour nous, d’avoir ce type d’événements. Nous ne contrôlons peut-être pas ce que dit Washington, mais nous contrôlons ce que nous disons et faisons », a résumé le gouverneur républicai­n du Vermont, Phil Scott.

Le premier ministre Philippe Couillard a reconnu que le président américain, Donald Trump, a rendu les relations entre le Québec et les ÉtatsUnis « plus fragiles ». « Nous ne nous attendions pas à ce type de relation de la part de notre ami, notre allié, notre voisin », a-t-il admis lors de la conférence de clôture de sa rencontre avec ses homologues américains et de l’Atlantique. « Mais je fais une distinctio­n entre [l’approche de Donald Trump] et ce que je vois ici, autour de la table », a-t-il précisé.

Au terme de cette rencontre qui a mené au timide engagement d’« échanger de l’informatio­n » et d’« envisager des stratégies pour aider à optimiser les résultats d’un accord de libreéchan­ge américain renouvelé», les élus ont refusé de s’avancer sur la mise en place d’un «plan B» advenant l’échec des négociatio­ns sur l’ALENA. « Je pense que tout le monde est sur la direction d’un renouvelle­ment, d’une modernisat­ion nécessaire. [C’est] le meilleur plan. On ne peut pas faire reculer le continent », a déclaré Philippe Couillard. Le gouverneur républicai­n du Massachuse­tts, Charlie Baker, a déclaré que de passer « 25 ans sans renouveler un accord », c’était « probableme­nt assez ».

Quels compromis ?

Les élus n’ont cependant pas osé s’avancer sur les concession­s que pourrait faire le Canada pour assurer la sauvegarde de la gestion de l’offre. « Nous devons reconnaîtr­e que les deux pays soutiennen­t leur agricultur­e, mais le font de manière différente », a martelé Philippe Couillard, en faisant référence aux programmes américains de subvention­s.

Raymond Bachand a répété le même message lors d’un panel sur l’ALENA. « Mais sur quels aspects allez-vous faire des compromis ? », a répliqué la chef de la direction du Conseil canadien des affaires américaine­s, Maryscott Greenwood. « Si ce n’est pas la gestion de l’offre, qu’est-ce que ce sera ? », a demandé l’ex-membre du gouverneme­nt Clinton. « Vous n’offrez rien d’intéressan­t. Il [le président Trump] va augmenter les tarifs tant que vous ne le ferez pas », a-t-elle prédit.

Dans un gazouillis envoyé vendredi, Donald Trump a menacé le Canada d’imposer de nouveaux tarifs douaniers sur les automobile­s. « Les discussion­s avec le Mexique avancent bien. […] Le Canada doit attendre», a-t-il aussi écrit.

Raymond Bachand ne s’est pas montré inquiété par les propos du président, ni même par la tenue de rencontres bilatérale­s entre les ÉtatsUnis et le Mexique depuis quelques semaines. « Le Canada n’est pas mis à l’écart », a-t-il insisté. « Sur l’automobile, [le Canada et les États-Unis ont] les mêmes intérêts. […] Ce qui va être convenu va convenir au Canada », a-t-il assuré.

Mais sur quels aspects allez-vous faire des compromis ? Si ce n’est pas la gestion de l’offre, qu’est-ce que ce sera ? Vous n’offrez rien d’intéressan­t. Il [le président Trump] va augmenter les tarifs tant que vous ne le ferez pas. MARYSCOTT GREENWOOD

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GRAHAM HUGHES LA PRESSE CANADIENNE Raymond Bachand est le négociateu­r en chef de l’ALENA pour le Québec.

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