Le Canada intègre mieux les immigrants au marché du travail
Le pays fait bonne figure parmi les membres de l’OCDE, selon une étude
En matière d’intégration des immigrants au marché du travail, le Canada tire mieux son épingle du jeu que les autres pays industrialisés. C’est ce qui ressort des résultats préliminaires d’une enquête de l’OCDE présentée dans le cadre d’un colloque international sur l’égalité et la diversité à l’Université de Montréal.
Le Canada serait «particulièrement bon » notamment parce que sa population immigrante, sélectionnée à travers divers programmes, fait partie des plus éduquées et qualifiées dans le monde, a suggéré le chercheur Thomas Liebig, coordonnateur de l’étude. En matière d’éducation, les enfants des immigrants, soit la 2e génération, font aussi bien, sinon mieux que les Canadiens qui n’ont pas de parents immigrants.
Dans les pays européens, cela demeure toutefois un problème, a souligné le chercheur. Les immigrants hautement qualifiés et possédant des diplômes de haut niveau ne voient pas reconnaître leurs compétences à la hauteur de ce qu’elles sont (déqualification). Dans certains pays, notamment en France et aux Pays-Bas, le défi de trouver un emploi à la hauteur de ses compétences s’étendrait même aux immigrants de 2e génération, qui se disent en grand nombre victimes de discrimination à l’embauche.
M. Liebig explique ces difficultés par l’attitude discriminatoire de certains employeurs, la question de la langue et l’absence de réseau et de contacts, surtout pour les nouveaux arrivants.
Des nuances
Marie-Thérèse Chicha, professeure à l’École des relations industrielles de l’Université de Montréal et coorganisatrice du colloque sur l’égalité et la diversité de l’UdeM, accueille avec beaucoup d’intérêt les constats de l’OCDE, mais souligne qu’ils devraient être davantage approfondis. Selon elle, les comparaisons sont globales et il serait plus prudent de regarder plus particulièrement les données pour le Canada, même de comparer le Québec et l’Ontario, qui n’ont pas du tout le même type d’immigration.
«Les immigrants réussissent mieux car on les sélectionne, mais en même temps, la déqualification est très élevée au Canada», note-t-elle. Elle cite les études de son collègue Brahim Boudarbat, qui parle des grandes difficultés des immigrants de 1re et 2e générations à s’intégrer au marché du travail, notamment ceux ayant un nom d’origine étrangère.
Pour l’OCDE, le Canada semble aussi bon élève en ce qui a trait à la reconnaissance que la diversité est une réalité et un défi auquel il faut s’attaquer. En comparaison avec la France, l’Allemagne et la Norvège, il est, et de loin, le pays où les entreprises ont adopté le plus grand nombre de mesures pour augmenter la présence des minorités visibles, selon ce qu’ont répondu les gestionnaires en ressources humaines — 3000, dont près de 1000 au Canada — sondés dans l’enquête.
Et 60 % de ces répondants canadiens — comparativement à 40% en Europe — croient que la diversité est un enjeu important dans la société. Le petit bémol est que seulement un tiers des gestionnaires — au Canada et en Europe — disent que c’est le cas dans leur entreprise. « Il y a un discours qui dit qu’il faut s’en occuper, mais très peu d’entreprises passent à l’action », remarque Tania Saba, titulaire de la Chaire en diversité et gouvernance de l’Université de Montréal et coorganisatrice du colloque. Elle soutient que plusieurs entreprises canadiennes devront faire des efforts pour améliorer leurs pratiques et faire une place aux immigrants de première génération.
Selon sa collègue, Mme Chicha, le constat sur l’inaction des entreprises est le même depuis dix ans. « C’est le constat de l’enquête que j’avais faite sur les programmes d’accès à l’égalité, en particulier une étude qui avait été faite il y a environ dix ans. Les employeurs disaient que la diversité était importante, mais quand je leur demandais s’ils avaient revu leurs pratiques, leurs méthodes de sélection […], ils me disaient que non. Ils ne se rendaient pas compte que leurs pratiques pouvaient être un obstacle à la diversité. Je vois que les choses n’ont pas tellement changé. »
Les deux chercheuses attendent avec impatience de pouvoir analyser les données à une échelle moins «macro» et comparer les provinces canadiennes entre elles. «Dans un deuxième temps, avec l’Université Paris-Dauphine, nous allons établir les différences entre les provinces », dit-elle, le Canada ne pouvant être considéré comme un bloc monolithique. Le rapport complet de l’OCDE est prévu pour septembre.
Pour l’OCDE, le Canada semble aussi bon élève en ce qui a trait à la reconnaissance que la diversité est une réalité et un défi auquel il faut s’attaquer