Les États-Unis et le Mexique seraient près d’une entente dans l’automobile
Le Canada se réjouit de cette avancée dans les négociations de l’ALENA
Les États-Unis et le Mexique seraient sur le point de s’entendre dans leurs négociations à deux sur l’avenir de l’ALENA. Loin de se sentir exclu, le Canada se dit heureux de ces avancées et dit avoir hâte de rejoindre les deux pays pour la dernière étape de la renégociation du traité.
Washington et Mexico seraient presque prêts à annoncer la conclusion d’une entente verbale après des semaines de négociations bilatérales, notamment sur l’épineuse question du secteur de l’automobile, dans le cadre du renouvellement de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), ont rapporté plusieurs sources mercredi. « Nous espérons être parvenus à une solution d’ici quelques heures ou quelques jours », a déclaré le ministre de l’Économie mexicain, Ildefonso Guajardo, dans le Wall Street Journal. L’annonce de la conclusion d’une «entente verbale» entre le Mexique et les États-Unis serait probablement pour jeudi, a rapporté le site du média d’information politique américain Politico, et ne dépendrait plus, essentiellement, que de la capacité de l’entourage du président américain à trouver un moment dans son emploi du temps qui lui permettrait d’assister à l’annonce en personne.
En cours depuis la fin du printemps, les négociations entre les deux pays portent principalement sur la proportion minimale de contenu nord-américain qu’un véhicule devrait avoir pour être exempté de taxe à l’importation — il serait question de la porter de 62,5 % à 75 % — et sur la part de ce contenu qui devrait venir d’usine où les salaires des travailleurs seraient le double, voire le triple de la moyenne actuelle au Mexique. D’autres enjeux propres aux deux pays, notamment agricoles, étaient aussi au menu des discussions.
Des voix au Canada ont évoqué, ces derniers jours, le spectre de renégociations de l’ALENA qui se font sans lui et qui le placeraient, à la fin, devant un fait accompli. Donald Trump a semblé accréditer cette perception la semaine dernière en liant le fait que le Canada ne participe pas aux discussions en cours au fait que ses « tarifs sont trop élevés, [ses] barrières sont trop fortes ».
La ministre canadienne des Affaires extérieures, Chrystia Freeland, a rejeté cette vision des choses du revers de la main mercredi. Elle s’est, au contraire, dite « très encouragée » par les dernières nouvelles sur les discussions entre les deux autres partenaires commerciaux.
« Nous sommes restés en contact étroit avec les États-Unis et le Mexique cette semaine, comme durant tout l’été. Nous les sentons optimistes à propos du travail bilatéral qu’ils ont abattu sur des enjeux qui les concernent », a-t-elle déclaré en marge de la retraite annuelle du cabinet fédéral à Nanaimo, sur l’île de Vancouver. La ministre fédérale s’est dite impatiente de retrouver ses vis-à-vis américains et mexicains à la table de négociations et « de voir se conclure rapidement la renégociation de l’ALENA ».
Le ministre mexicain Guajardo a réitéré, lui aussi, qu’un véritable accord devra nécessairement impliquer les trois pays. «Ce que nous faisons ici, c’est essayer de résoudre les problèmes les plus importants entre les États-Unis et le Mexique — ce qui mènerait à une réunion trilatérale avec le Canada », at-il déclaré à Washington.
Le début des séries
Commencée il y a un an sous la pression d’un président américain qui a qualifié l’entente de libre-échange de «pire traité jamais signé » par son pays, et qui menace périodiquement d’en claquer la porte, la renégociation de l’ALENA a d’abord porté sur des questions plus techniques et moins litigieuses visant à moderniser l’entente de presque vingtcinq ans, a rappelé en entretien téléphonique au Devoir mercredi le négociateur en chef pour le Québec, Raymond Ba- chand, qui compare cette étape à « la première moitié de la saison » dans le sport professionnel.
Très techniques, mais aussi très politiques, les discussions sur le secteur de l’auto pourraient être qualifiées de seconde moitié de la saison, poursuit-il. Une fois que les Américains ont abandonné leur exigence initiale d’un contenu minimal provenant uniquement des États-Unis, leur position face au Mexique devenait la même que celle du Canada, ce qui lui a permis de s’effacer un peu.
« S’il y a entente dans ce dossier entre les Mexicains et les Américains, on va entrer dans ce qu’on pourrait considérer comme les séries éliminatoires », poursuit l’ancien ministre des Finances québécois. C’est-à-dire des négociations à trois sur une dernière série d’enjeux extrêmement épineux, pour des raisons moins techniques que politiques, comme les demandes américaines pour que le nouvel accord s’éteigne automatiquement à moins que ses membres conviennent de le reconduire tous les cinq ans, que soit aboli le mécanisme d’arbitrage entre les pays ou que soit démantelé le système canadien de gestion de l’offre en agriculture.
Or, si de petits aménagements pourraient être trouvés sur certaines questions, l’essentiel de ces demandes est totalement inacceptable pour le Canada, répète Raymond Bachand. L’échec ou le succès des négociations dépendra de l’entêtement de la Maison-Blanche à exiger l’impossible et de ses calculs en prévision des prochaines élections de mi-mandat, dit le négociateur, mais aussi de l’habileté du Canada et du Mexique à faire passer de modestes aménagements pour de grandes victoires du président américain. « Tout peut se régler en dix jours, si Donald Trump le veut. »
Chrystia Freeland s’est dite « très encouragée » par les dernières nouvelles sur les discussions