Le Devoir

Le patron de la Fed prêt à tout contre l’inflation

- VIRGINIE MONTET

Jerome Powell est resté muet sur l’impact négatif potentiell­ement important que peut avoir une escalade des tarifs douaniers, notamment avec la Chine

Le président de la banque centrale américaine Jerome Powell a affirmé vendredi que la Fed « ferait tout ce qui est en son pouvoir» pour réagir à une éventuelle hausse de l’inflation ou à une crise.

Le patron de la Fed, critiqué par le président Donald Trump pour la montée des taux d’intérêt, a assuré que le Comité monétaire de l’institut d’émission prendrait ses responsabi­lités si l’inflation devait grimper, tout en indiquant que, pour l’instant, l’économie n’était pas en surchauffe.

Dans un discours très académique à la conférence de Jackson Hole, au pied du majestueux Grand Teton dans le Wyoming, M. Powell s’est par ailleurs abstenu de répondre plus avant aux critiques du président Trump ou d’évoquer la politique commercial­e des tarifs douaniers comme un risque pour l’économie.

Cette semaine, Donald Trump, rompant avec la tradition de respect de l’indépendan­ce de la banque centrale, a redit son mécontente­ment de la politique monétaire qui a lentement remonté les taux par deux fois cette année et entend le faire encore deux fois d’ici la fin de l’année. Ils se situent actuelleme­nt entre 1,75 % et 2 %.

Il n’est, selon ses dires, «pas emballé » par Jerome Powell, un avocat de la finance de 65 ans qu’il a choisi luimême pour remplacer Janet Yellen à la tête de la Réserve fédérale en février.

En rehaussant les taux, la Fed dope le dollar, qui rend les exportatio­ns américaine­s plus chères, ce qui va à l’encontre des objectifs de la bataille commercial­e lancée par Donald Trump.

Les taux continuell­ement plus hauts signifient aussi des crédits à la consommati­on et immobilier­s plus chers, ce qui est impopulair­e auprès des consommate­urs américains, qui seront appelés aux urnes dès novembre pour les élections de mimandat.

Dans son discours très prudent, Jerome Powell a réitéré son soutien « à la trajectoir­e actuelle d’une hausse graduelle des taux ».

Il a décrit une économie «forte» avec une inflation autour « de la cible de 2 % », que la Fed estime favorable à l’économie et « où les gens qui veulent travailler trouvent un emploi ».

Bien que la croissance ait grimpé à 4,1 % au 2e trimestre et que le taux de chômage soit à 3,9%, proche de son plus bas niveau « en 20 ans », l’économie ne « présente pas de risque élevé de surchauffe ».

Et « c’est une bonne nouvelle », a dit M. Powell, désamorçan­t les craintes que la relance budgétaire, grâce aux réductions d’impôts et aux augmentati­ons des dépenses, provoque un surrégime qui ferait resurgir l’inflation.

Devant un parterre d’économiste­s et de banquiers centraux réunis pour cette conférence annuelle dans la station de ski huppée du Wyoming, M. Powell a fait de longues digression­s historique­s sur la conduite passée de la politique monétaire et en a retenu quelques leçons, qu’il a partagées.

Il a ainsi défendu les bienfaits d’une approche plus opportunis­te, empruntée à son illustre prédécesse­ur Alan Greenspan, qui consiste à « attendre encore le prochain meeting ». Peut-être une façon de laisser entendre que le Comité monétaire (FOMC) saura adapter son attitude quant aux données économique­s à court terme.

Le patron de la Fed a par ailleurs reconnu une nouvelle fois que les salaires n’avaient « augmenté que très lentement au cours des dernières décennies ».

Il est resté muet sur l’impact négatif potentiell­ement important que peut avoir une escalade des tarifs douaniers, notamment avec la Chine, une crainte de plus en plus palpable parmi les industriel­s et entreprene­urs américains.

Mais il a appelé à réduire le déficit budgétaire, une nécessité « qui devient de plus en plus importante », alors que les réductions d’impôts aux entreprise­s et les hausses de dépenses dans l’armement notamment vont creuser le déficit fédéral des États-Unis à plus de 800 milliards de dollars cette année, soit 4,2 % du PIB.

Newspapers in French

Newspapers from Canada