Financement à la traîne
L’hypothétique possibilité de déchirer l’entente avec les médecins spécialistes et de récupérer des milliards cache la vraie question: celle du financement même du réseau de la santé. Les investissements peinent à suivre la hausse de la demande en soins depuis des années. Infirmières et autres travailleurs de la santé exténués l’ont abondamment rappelé cette année. Ajoutez à cela que 20 % des bâtisses du réseau sont jugées en très mauvais état. Juste dans les dernières semaines, le ministre Gaétan Barrette, sillonnant le Québec, a annoncé plus de 5,5 milliards en projets de construction et de rénovation. Une facture laissée au prochain gouvernement, alors que la plupart des projets en sont au stade de la planche à dessin.
Et l’argent pour recruter infirmières et préposés en contexte de pénurie de main-d’oeuvre et de manque d’attractivité du réseau ? Et les soins à domicile ? Et les services sociaux? Et la qualité des soins en CHSLD (rappelons que Québec est poursuivi pour maltraitance) ? Et… La liste est longue.
Pendant que plus de 400 000 Québécois attendent toujours, à travers le guichet d’accès, de trouver un médecin de famille, depuis 2007, plus de 600 postes de résidents sont restés vacants. À mille patients par médecin, la liste d’attente aurait pu être chose du passé. Les manières de Gaétan Barrette ont été jugées coercitives par les omnis. Plusieurs jeunes médecins préfèrent la médecine spécialisée ou même quitter le Québec. Qui a un plan pour renverser la tendance, tout en favorisant l’interdisciplinarité dans notre système, souvent qualifié d’hospitalocentriste ?
Dans les luttes serrées qui s’annoncent dans certaines circonscriptions, les candidats en région devront probablement trouver à calmer la grogne de citoyens qui estiment avoir perdu au change dans la grande réforme du réseau. Des groupes très actifs luttent pour une gouvernance et des soins de proximité.
Finalement, les partis oseront-ils s’aventurer sur des terrains moins simples à résumer en un clip télé, comme le surdiagnostic (que de plus en plus d’études pointent du doigt), le surtraitement (un aîné sur quatre prend plus de dix médicaments différents) et la prévention (les maladies chroniques font exploser les coûts alors qu’elles sont le plus souvent évitables) ?