Le Devoir

Des mots sur un présent agité

Les scènes montréalai­ses vont vibrer au gré des questions sociales, politiques et économique­s

- MARIE LABRECQUE COLLABORAT­RICE LE DEVOIR

La saison théâtrale d’automne ne recule pas devant quelques questions sociales, politiques ou économique­s qui agitent notre époque. Parallèlem­ent, on assiste à un certain retour du répertoire québécois des décennies 60 et 70, à l’instar de

Les fées ont soif, qui sera revisitée au Rideau Vert. Panorama en douze coups de théâtre.

Guerres et paix

C’est le sujet chaud du début de saison, trois pièces très attendues en septembre tournant autour de l’éternel problème des conflits armés entre humains. Dans Le reste vous le connaissez

par le cinéma, à l’Espace Go, le formidable auteur anglais Martin Crimp s’est approprié Les Phénicienn­es d’Euripide. Christian Lapointe met en scène cette lutte fratricide commentée par un choeur féminin.

Oslo, de l’Américain J. T. Rogers, raconte les tractation­s en coulisse ayant mené aux accords de 1993 entre deux ennemis: Israël et l’OLP. Édith Patenaude monte ce thriller, maintes fois primé en 2017, chez Jean-Duceppe.

Après son stimulant Dans la solitude des champs de coton, en 2016, le metteur en scène français Roland Auzet revient au Théâtre Prospero avec

Écoutez nos défaites END. Une adaptation d’un roman de Laurent Gaudé, avec Gabriel Arcand.

La parole libérée

Quelques bons échos nous sont parvenus des Barbelés, ce nouvel opus d’Annick Lefebvre (J’accuse) créé l’automne dernier au Théâtre de la Colline, à Paris, par Alexia Bürger — auréolée depuis par le succès de sa pièce Les Hardings. Un solo écrit pour la comédienne Marie-Ève Milot. Dès le 4 septembre, au Théâtre de Quat’Sous.

Humanité à la dérive

Golgotha Picnic de l’Espagnol Rodrigo García, qui met en vedette un Christ contempora­in, a suscité des manifestat­ions de catholique­s lors de sa création en France en 2011. Angela Konrad s’empare de cette critique de la société de consommati­on et l’adapte pour une distributi­on majoritair­ement féminine (Sylvie Drapeau, Dominique Quesnel, Lise Roy). Du 18 au 29 septembre, à l’Usine C.

Classiques français revisités

Une création sur une création: dans

Candide ou l’optimisme, Pierre-Yves Lemieux montre la mise au monde du

fameux conte philosophi­que par Voltaire (incarné par le brillant Emmanuel Schwartz) et son entourage. Alice Ronfard dirige cette production du Théâtre du Nouveau Monde (TNM). Avec Prouesses et épouvantab­les

digestions du redouté Pantagruel, Gabriel Plante, lui, s’attaque à Rabelais et à son «hénaurme» univers satirique. Avec Paul Ahmarani, Nathalie Claude, Renaud Lacelle-Bourdon, Cynthia WuMaheux sur la scène du Théâtre Denise-Pelletier, c’est prometteur.

Le chiffre de l’automne

Poursuivan­t sa théâtrogra­phie écrite en collaborat­ion avec les interprète­s, Mani Soleymanlo­u change toutefois de génération avec Neuf. L’auteur d’Ils étaient quatre crée ici avec un quintette expériment­é: Henri Chassé, Pierre Lebeau, Marc Messier, Mireille Métellus et Monique Spaziani, qui jouent un groupe d’acteurs. Dès le 25 septembre, au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui.

Tribunal populaire

Après Pour réussir un poulet, la nouvelle création de Fabien Cloutier,

Bonne retraite, Jocelyne, s’attaque à la «culture du vide», aux jugements expéditifs et à l’ignorance. Le mordant dramaturge y orchestre une réunion familiale qui vire au tribunal populaire. Dès le 9 octobre, à La Licorne.

Un nouveau chez Tremblay

Bonjour, là, bonjour est, étonnammen­t, la première incursion de Claude Poissant chez le dramaturge québécois. Le metteur en scène monte cette oeuvre de 1974 sur un amour interdit et les carences de la communicat­ion, avec une forte distributi­on: Sandrine Bisson, Francis Ducharme, Diane Lavallée, Mylène McKay, Gilles Renaud… Dès le 7 novembre, au Théâtre Denise-Pelletier.

Les débats sont ouverts

Le nouveau sujet auquel s’attaque Porte Parole (J’aime Hydro) s’annonce d’une grande pertinence. En cette ère de polarisati­on idéologiqu­e croissante, la compagnie documentai­re a orchestré des débats autour de thèmes polémiques (ici, accommodem­ents raisonnabl­es et féminisme) entre des individus d’opinions et de cultures diverses. Des échanges que recréent des comédiens (dont Pascale Bussières) sur scène dans L’Assemblée. On pourra aussi voir une version anglophone du prometteur concept, inspiré de participan­ts et de sujets différents. Dès le 13 novembre, à l’Espace Go.

Amours russes

Tchekhov était déjà l’inspirateu­r du spectacle qui a révélé Angela Konrad à Montréal, Variations pour une déchéance annoncée. Cette fois, la prolifique créatrice utilise la première pièce, inachevée, du grand dramaturge russe afin d’examiner la part d’ombre des relations amoureuses à travers la «reconstitu­tion d’un meurtre passionnel» dans Platonov, amour, haine et angles morts. Dès le 20 novembre, au Théâtre Prospero.

#MeToo

Quatre années après sa riche Tribus, montée à La Licorne, Frédéric Blanchette renoue avec l’intéressan­te auteure anglaise Nina Raine dans

Consenteme­nt. Axée sur deux couples d’avocats qui voient leur vie privée s’engluer dans l’ambiguïté des

rapports humains, des concepts de vérité et de consenteme­nt sexuel, cette «tragicoméd­ie» créée tout juste l’an dernier ne pourrait être d’une plus brûlante actualité. Dès le 2 décembre, au Théâtre Jean-Duceppe.

Doublé Marcel Dubé

Qui s’attendait à voir deux pièces de ce pionnier de la dramaturgi­e québécoise à l’automne 2018? Au TNM, Benoît Vermeulen monte le rare Bilan, l’oeuvre de 1960 avec laquelle Dubé a amorcé sa critique du monde bourgeois. Avec notamment Sylvie Léonard et Guy Jodoin.

Et dans une rencontre artistique des plus intrigante­s, Christian Lapointe dirige onze jeunes diplômés de l’École nationale dans une relecture de cette charge sociale qu’est Les beaux dimanches. À La Chapelle.

Pauline Julien et Gérald Godin

Coïncidenc­e: deux spectacles font revivre le mythique couple d’artistes engagés. On verra à Fred-Barry Je

cherche une maison qui vous ressemble, une création de Marie-Christine Lê-Huu, dirigée par Benoît Vermeulen. Et au Studio d’Espace Libre, Je ne

te savais pas poète s’appuie sur la correspond­ance passionnel­le entre la chanteuse et le ministre.

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MARIE-FRANCE COALLIER LE DEVOIR Angela Konrad adapte une critique de la société de consommati­on pour une distributi­on majoritair­ement féminine.
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ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR Mani Soleymanlo­u poursuit sa théâtrogra­phie avec Neuf.

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