L’INRS se tourne vers l’avenir
«Je pense que c’est le temps de réfléchir aux cinquante prochaines années», lance Luc-Alain Giraldeau, directeur général de l’Institut national de la recherche scientifique (INRS) dans son bureau au Centre urbanisation, culture société, situé à Montréal. Contrairement à la posture recroquevillée de la sculpture Le malheureux magnifique, édifiée devant l’immeuble, M. Giraldeau adopte plutôt une position d’optimisme et d’ouverture, en manifestant son intention d’ouvrir un dialogue avec différents acteurs de la société.
Depuis sa création en 1969, l’INRS est demeuré, à quelques détails près, articulé autour des mêmes créneaux, répartis aujourd’hui dans quatre centres de la province: l’eau, la terre et l’environnement à Québec, l’énergie, les matériaux et les télécommunications à Montréal et à Varennes, la santé à l’Institut Armand-Frappier de Laval et les sciences sociales dans l’édifice où se déroule l’entrevue. «On a répondu à des besoins qui étaient exprimés dans la société québécoise à la fin des années 1960. On a, je pense, amplement répondu au mandat, compte tenu des ressources qu’on nous a données », souligne-t-il. Maintenant, il regarde vers l’avenir. Sans vouloir délaisser ces domaines, il reconnaît que «la société a changé et nos besoins aussi». «Y a-t-il d’autres domaines émergents dans lesquels on devrait former des étudiants à la recherche comme seul l’INRS peut le faire ? »
Car l’INRS (imaginez une époque où le Québec accusait un retard considérable dans la formation et le développement de sa recherche) constitue un ovni dans le monde de la science et de l’éducation supérieure. En plus d’accorder des diplômes, il favorise la collaboration d’acteurs universitaires, industriels et gouvernementaux. Plutôt que de séparer les disciplines, comme le font les facultés dans les établissements universitaires classiques, il en met plusieurs à contribution autour de ses objets de recherche.
«On doit faire de la recherche fondamentale et appliquée avec l’objectif précis de contribuer au développement économique et social», insiste Luc-Alain Giraldeau en se référant au mandat de l’INRS. «Les professeurs embauchés à l’INRS sont conscients de notre mission et très ouverts à travailler avec le gouvernement provincial, des administrations municipales, des industries, des compagnies ou des start-up pour contribuer au développement. »
La formule a généré son lot de succès, comme le démontre la renommée internationale du Laboratoire de contrôle du dopage à Laval, accrédité par l’Agence mondiale antidopage, ou du Laboratoire de sources femtosecondes à Varennes, qui explore de nouveaux types de lasers.
«Je pense que les gens n’ont pas compris le côté extrêmement innovant de l’INRS, qui n’est pas disciplinaire et qui permet de répondre rapidement à de très nombreux problèmes», observe M. Giraldeau. Il constate que les formules de financement universitaire conviennent mal à son Institut, dont le nombre de professeurs stagne à 150 depuis plusieurs années. «Les ministères, de leur côté, ont un peu oublié la mission de l’INRS», se désole-t-il, en évoquant la multiplication des instituts de recherche publics ou privés financés par l’État.
L’INRS demeure à ses yeux un véhicule unique de recherche. «Je pense qu’il faudrait qu’on prenne conscience que l’INRS peut rendre de meilleurs services en lui permettant d’être à l’écoute des besoins de la société québécoise et en lui donnant les moyens de se développer pour répondre à ces besoins.» Et il voit dans son 50e anniversaire qui approche l’occasion de lui donner un nouveau souffle.