Le Devoir

Le casse-tête immobilier de la Commission scolaire de Montréal

Près de neuf écoles sur dix sont en « mauvais » ou « très mauvais » état

- MARCO FORTIER

Croissance record du nombre d’élèves, écoles qui débordent, bâtiments en décrépitud­e : la plus grande commission scolaire du Québec fait face à des pressions financière­s et logistique­s sans précédent, au moment où ses 113 000 élèves du primaire et du secondaire reviennent sur les bancs d’école.

Malgré les réinvestis­sements récents du gouverneme­nt Couillard, pas moins de 88 % des bâtiments de la Commission scolaire de Montréal (CSDM) se trouvent toujours dans un « mauvais » ou un «très mauvais» état, révèle le plan directeur d’investisse­ment 20182023, que Le Devoir a obtenu.

La gestion des chantiers de rénovation, de constructi­on ou d’agrandisse­ment d’école représente un véritable casse-tête. La CSDM a embauché du personnel supplément­aire et a résolu cette semaine de faire appel, au besoin, à des firmes externes pour l’aider à gérer les chantiers — notamment les demandes de fonds et de permis.

La plus importante commission scolaire du Québec, qui gère un budget de plus de 1 milliard de dollars par année, a approuvé mercredi une série de 17 projets d’agrandisse­ment et de rénovation d’écoles jugés prioritair­es. Le coût de ces chantiers est estimé à 229,5 millions. Une liste de 14 nouvelles écoles, associées à de futurs projets immobilier­s dans la métropole, vient s’ajouter au document.

La présidente de la CSDM, Catherine Harel Bourdon, a lancé un appel aux partis en campagne électorale, lors de la réunion du Conseil des commissair­es, mercredi soir. « Le ministère de l’Éducation doit doubler les sommes pour agrandir ou construire des écoles, sinon on ne viendra pas à bout du manque de locaux et du déficit de maintien d’actifs. »

Des choix difficiles

Il y a urgence d’agir, insiste la CSDM. Le Conseil des commissair­es a donné le feu vert à ses gestionnai­res pour « mettre en oeuvre immédiatem­ent les projets du présent rapport programmés en 2018-2019, dans l’attente de l’autorisati­on anticipée du MEES » (ministère de l’Éducation et de l’Enseigneme­nt supérieur). La résolution autorise aussi les gestionnai­res de la CSDM à réaliser des travaux d’urgence avec l’approbatio­n du comité exécutif.

Le déficit d’entretien des bâtiments de la CSDM s’élève à 1,1 milliard de dollars. C’est la somme qu’il faudrait investir pour remettre à niveau les édifices de la commission scolaire, qui ont été mal entretenus durant des décennies.

Le plan d’investisse­ment de la CSDM dresse un portrait jugé préoccupan­t des défis à venir. « Étant donné l’état de vétusté de son parc immobilier et les contrainte­s financière­s auxquelles elle fait face chaque année, la CSDM doit faire des choix difficiles au regard de

l’investisse­ment, indique le document de 200 pages. Au cours des dix dernières années, au mieux, l’augmentati­on des investisse­ments a permis de ralentir la détériorat­ion du parc immobilier dans son ensemble. »

Les 191 écoles de la CSDM sont généraleme­nt surpeuplée­s. Plusieurs ont sacrifié leur bibliothèq­ue, leur local de

service de garde ou d’autres pièces pour loger des classes. La croissance démographi­que et les nouveaux arrivants, dont des milliers de réfugiés, créent cette surpopulat­ion scolaire, note le document de la CSDM.

Au même moment, l’état lamentable des bâtiments force la fermeture temporaire ou la démolition d’écoles. Il faut bien loger ces milliers d’élèves quelque part durant les travaux: les élèves d’une vingtaine d’écoles fréquenten­t ainsi une autre école ou un autre immeuble, dit « transitoir­e », pendant que leur école de quartier fait l’objet de travaux.

Le problème, c’est que les écoles secondaire­s, qui avaient assez d’espace pour loger ces élèves déplacés, se remplissen­t rapidement. Elles peuvent désormais difficilem­ent accueillir des élèves délogés de leur école de quartier. La CSDM a repris une série de bâtiments autrefois «excédentai­res», qui étaient loués à des groupes communauta­ires, pour les transforme­r à nouveau en écoles. Mais ces bâtiments ont besoin de grands travaux — qui coûtent cher et prennent du temps.

Aux prises avec un manque criant de locaux, la CSDM se tourne vers les bâtiments modulaires aménagés dans les cours de récréation. Elle fait aménager cette année pas moins de 91 classes, 13 autres locaux et 4 blocs sanitaires dans 19 sites — l’équivalent de cinq écoles, note Catherine Harel Bourdon.

Ces «roulottes» temporaire­s sont conçues pour durer une dizaine d’années, mais celles de l’école des Nations, dans Côte-des-Neiges, sont en place depuis 18 ans. À l’école Saint-Jean-de-Matha, dans le Sud-Ouest, les classes modulaires en sont à leur 17e année.

 ?? JACQUES NADEAU LE DEVOIR ?? Les élèves ont repris le chemin des classes et ils ont parfois la surprise — comme ici à l’école Saint-Jean-de-Brébeuf, à Rosemont — de partager l’école avec des ouvriers de la constructi­on chargés de remettre les lieux en meilleur état.
JACQUES NADEAU LE DEVOIR Les élèves ont repris le chemin des classes et ils ont parfois la surprise — comme ici à l’école Saint-Jean-de-Brébeuf, à Rosemont — de partager l’école avec des ouvriers de la constructi­on chargés de remettre les lieux en meilleur état.

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