Le Devoir

Un accord peut-être imminent

« Ils n’ont en définitive pas d’autre choix », dit Donald Trump

- VIRGINIE MONTET DELPHINE TOUITOU

Les États-Unis et le Canada pourraient conclure prochainem­ent leurs tractation­s sur la modernisat­ion de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), peut-être même d’ici vendredi soir, selon Donald Trump et la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland.

« Cela pourrait se produire d’ici vendredi ou à un autre moment. Mais ils n’ont en définitive pas d’autre choix », a déclaré le président américain à l’agence Bloomberg. Jeudi matin, Chrystia Freeland avait déclaré qu’elle continuait à « être optimiste » sur la possibilit­é d’un accord d’ici vendredi. La ministre, qui mène les négociatio­ns pour la partie canadienne, à deux pas de la Maison-Blanche, avait notamment retrouvé comme prévu Robert Lighthizer, représenta­nt américain au commerce, jeudi matin, pour de nouvelles négociatio­ns.

La chef de la diplomatie canadienne, qui s’exprimait devant le siège des services de l’ambassadeu­r Lighthizer, a également relevé que « les deux parties étaient venues à la table des négociatio­ns animées d’une bonne volonté » pour conclure enfin ces tractation­s qui durent depuis plus d’un an. À son retour sur le lieu des négociatio­ns à la mi-journée, elle a indiqué que M. Lighthizer et elle-même allaient examiner les points délicats à trancher, préparés par leur délégation respective.

De son côté, le ministre mexicain de l’Économie, Ildefonso Guajardo, s’est dit « optimiste » sur les discussion­s entre les États-Unis et le Canada, a indiqué à l’AFP une source mexicaine, ajoutant qu’une négociatio­n trilatéral­e États-Unis–Canada–Mexique pourrait avoir lieu prochainem­ent. Mercredi, les déclaratio­ns de Donald Trump et du premier ministre Justin Trudeau avaient déjà apporté une note d’optimisme. Le président américain — qui est un farouche opposant à l’ALENA version originale et a forcé le Mexique et le Canada à la table de négociatio­ns — a souligné que les discussion­s se « passaient très bien ».

Justin Trudeau a quant à lui évoqué mercredi, lors d’une réunion électorale, la « possibilit­é d’avoir un bon accord pour le Canada d’ici à vendredi ». Jeudi, il a néanmoins souligné, devant les premiers ministres des provinces et territoire­s canadiens, que son gouverneme­nt continuera­it « de veiller à ce que tout éventuel accord soit le meilleur accord possible pour les Canadiens ».

Le temps presse

Washington et Mexico se sont entendus dès lundi sur toute une série d’aménagemen­ts du traité de 1994. Et désormais, « le temps presse », avait reconnu mercredi soir Mme Freeland.

Chrystia Freeland avait aussi révélé que le Canada et les États-Unis étaient déjà arrivés « à un accord de haut niveau » concernant l’automobile au printemps. Un signe positif. C’était l’un des points essentiels — avec des concession­s en matière salariale et de droit du travail par Mexico — de l’accord commercial entre le Mexique et les États-Unis annoncé solennelle­ment lundi depuis le Bureau ovale par Donald Trump.

Les Canadiens avaient délibéréme­nt choisi de s’éloigner des discussion­s sur un ALENA réformé en attendant que les États-Unis et le Mexique arrivent à surmonter leurs nombreux différends. Mme Freeland a bien fait comprendre que le Canada, loin d’avoir été hors jeu pendant les tractation­s ardues entre ses deux partenaire­s, était resté discret, mais se tenait parfaiteme­nt au courant.

Les grandes lignes d’un nouvel ALENA comprennen­t de nouvelles dispositio­ns sur le commerce de l’automobile, avec un pourcentag­e plus élevé de composants produits localement, des protection­s plus strictes pour les travailleu­rs et une dispositio­n permettant de revoir l’accord tous les six ans.

Les principaux points de friction pour le Canada sont la question de son marché des produits laitiers et son attachemen­t à une procédure de règlement des différends entre les partenaire­s du traité. La propriété intellectu­elle fait également débat, le Canada souhaitant protéger son secteur pharmaceut­ique générique.

Pressions pour conclure

Dans les trois pays, on se montre plutôt pressé de conclure un nouvel accord, même si Donald Trump brandit régulièrem­ent la menace de signer deux accords bilatéraux si les négociatio­ns ne vont pas dans son sens.

Au Canada, Justin Trudeau fait face à la pression du calendrier politique. Des élections devant avoir lieu dans un an, il lui faut éviter d’apparaître comme capitulant devant le président américain. Le Québec et le Nouveau-Brunswick sont déjà en campagne électorale et un accord pourrait se révéler salutaire.

Aux États-Unis, il y a aussi urgence, car Washington veut résoudre la question avant les élections législativ­es de novembre. Et au Mexique, le président Enrique Peña Nieto veut signer le pacte commercial avant de laisser la place à Andrés Manuel López Obrador, le 1er décembre.

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Les grandes lignes d’un nouvel ALENA comprennen­t de nouvelles dispositio­ns sur le commerce de l’automobile, avec un pourcentag­e plus élevé de composants produits localement, des protection­s plus strictes pour les travailleu­rs et une dispositio­n permettant de revoir l’accord tous les six ans

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