Le Devoir

Le REM : un projet pertinent ?

- Louise Nepveu Utilisatri­ce du train depuis 1963

Depuis des décennies, nous avons eu le privilège de bénéficier de la ligne de train Montréal–Deux-Montagnes qui reliait au centre-ville aussi bien MontRoyal et l’arrondisse­ment de Saint-Laurent que Pierrefond­s, Laval et Deux-Montagnes. Tandis que Montréal était aux prises avec des entraves de circulatio­n majeures, s’asseoir confortabl­ement dans un train climatisé aux horaires précis s’apparentai­t à un véritable luxe. Nous ignorions superbemen­t les cônes orange, les tempêtes de neige et le verglas et regardions avec sympathie les malheureux automobili­stes coincés dans le trafic.

Le train offrait l’avantage d’être raccordé non seulement à la Gare centrale et à la station de métro Bonaventur­e, mais également au réseau d’autobus donnant accès à tous les établissem­ents situés sur le mont Royal : Université de Montréal, collège Notre-Dame, hôpitaux, etc.

Six ans

Tout cela s’est écroulé avec le projet de constructi­on du REM, qui ne sera pas parachevée avant 2024… si aucun obstacle ne provoque des retards. Six années interminab­les !

Il semble qu’il n’existe aucun exemple semblable dans tout le Canada : détruire une ligne performant­e en faisant miroiter un projet dont on nous dit qu’il nous fera « entrer dans le XXIe siècle ». On ajoute que le train actuel était devenu « vétuste ».

Depuis que la ligne Montréal– Deux-Montagnes a fait l’objet de travaux majeurs dans les années 1990, le nombre d’usagers a bondi et des milliers de personnes ont choisi d’emménager à proximité des gares qui jalonnent son parcours. Et soudain, elles apprennent que la constructi­on du REM va les priver de la ligne actuelle, forçant tout le monde à emprunter des autobus vers les stations de métro de la ligne orange déjà saturée aux heures de pointe. Au cours des six prochaines années, comment se déplaceron­t les 15 000 usagers quotidiens de la ligne Deux-Montagnes ? Combien d’autobus faudra-t-il pour les conduire au métro ? Des centaines ! Et tous ces autobus viendront gonfler les bouchons de circulatio­n, c’est inévitable. Des usagers ont calculé qu’un trajet de 27 minutes prendra au minimum une heure trente. Aussi bien dire à tout le monde d’aller tout de suite acheter une auto !

Que l’on ait voulu créer un lien pour desservir l’aéroport de Montréal est assurément légitime, mais le nord-ouest de l’île et sa banlieue, eux, qu’y gagneront-ils ? La durée du trajet diminuera de quelques minutes à peine, si l’on veut bien croire les chiffres que l’on trouve sur le site du REM. On nous informe également qu’il y aura 55 % moins de places assises, un non-sens total quand on pense que la majorité des usagers devront supporter la station debout pendant au moins 30 à 35 minutes. Enfin, on apprend que la réduction des GES sera infime.

Un projet pharaoniqu­e

Devons-nous subir un tel branlebas alors que de nouvelles voitures de train et une améliorati­on des horaires le soir et les fins de semaine auraient satisfait tout le monde sur cette ligne de train ? En un mot, le REM sur la ligne Montréal–Deux-Montagnes étaitil nécessaire ? Beaucoup de questions se posent sur la pertinence de ce projet pharaoniqu­e qui coûtera 7 milliards, dit-on, pendant que des secteurs entiers sur l’île et en périphérie réclament des transports collectifs dignes du XXIe siècle.

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