Le Devoir

Les propositio­ns caquistes ne tiennent pas la route

- Me Stéphane Handfield

Tout d’abord, le chef de la CAQ, François Legault, propose d’abaisser le seuil d’immigratio­n au Québec de 50 000 à 40 000 immigrants. Il souhaite diminuer de 20 % la sélection des travailleu­rs qualifiés, diminuer également de 20 % l’accueil des immigrants dans la catégorie du regroupeme­nt familial, communémen­t appelé parrainage, et diminuer de 20 % l’accueil de réfugiés.

Si la Coalition avenir Québec (CAQ ) souhaite avoir des cibles chiffrées, il apparaît important de mentionner que le prochain seuil d’immigratio­n ne devra pas être déterminé à la légère. Il devra s’appuyer sur une analyse approfondi­e de la situation et des besoins actuels au Québec et devra miser davantage sur un pourcentag­e de rétention beaucoup plus élevé des immigrants sélectionn­és par Québec.

Travailleu­rs qualifiés

Pour les travailleu­rs qualifiés, la CAQ suggère la création d’un Certificat d’accompagne­ment transitoir­e (CAT), lequel remplacera­it l’actuel Certificat de sélection du Québec (CSQ ). Or, s’il est vrai que le Québec sélectionn­e son immigratio­n dite économique, M. Legault oublie que c’est le gouverneme­nt fédéral qui a le dernier mot en matière d’immigratio­n. C’est le ministère Immigratio­n, Réfugiés et Citoyennet­é Canada qui délivre les visas, les permis et les statuts. Donc, dans l’état actuel du droit, cette propositio­n n’est pas applicable. Il faudrait des modificati­ons législativ­es tant à Québec qu’à Ottawa. Voilà de longues, très longues discussion­s en perspectiv­e…

En admettant que le gouverneme­nt fédéral accepte de modifier les règles afin de permettre à Québec d’aller de l’avant avec la création du Certificat d’accompagne­ment transitoir­e, qu’adviendra-t-il des familles qui, à l’expiration du délai de 3 ans proposé par la CAQ pour réussir les tests de français et des valeurs québécoise­s, n’auront pas réussi ces examens? Ils deviendron­t des sans-statut, des illégaux. Sans pouvoir travailler, sans pouvoir étudier, sans ressources. Femmes, hommes, enfants…

De plus, Québec serait incapable d’expulser ces personnes, car seule l’Agence des services frontalier­s du Canada a compétence en matière de renvois et d’exécution de la loi.

Le Québec se retrouvera avec une problémati­que importante de personnes illégales sur son territoire. On créera donc un problème qui n’existe pas actuelleme­nt.

Regroupeme­nt familial

Lorsque M. Legault affirme vouloir une diminution de 20 % dans l’accueil de personnes dans la catégorie du regroupeme­nt familial et dans la catégorie des réfugiés, encore une fois il oublie que ces deux catégories relèvent de la compétence exclusive du fédéral. Pire encore, concernant les réfugiés, seul le tribunal a compétence afin de déterminer qui doit être reconnu comme réfugié au Canada et non le gouverneme­nt provincial ou fédéral. Rappelons que la Commission de l’immigratio­n et du statut de réfugié est un tribunal indépendan­t et de compétence fédérale.

Concernant le programme du regroupeme­nt familial, M. Legault précise qu’il sera plus souple avec les personnes âgées sur le plan de la connaissan­ce du français et des valeurs québécoise­s, mais qu’un « frère » ou une « soeur » de 40 ans doit apprendre le français. Ce que M. Legault néglige, une fois de plus, c’est qu’il est impossible de soumettre une demande de parrainage, tant au Québec que dans une autre province canadienne, pour un frère ou une soeur. Le parrainage ne s’applique qu’aux parents, grands-parents, conjoints, conjointes et enfants à charge.

Par ces propositio­ns et déclaratio­ns, M. Legault fait la démonstrat­ion qu’il ignore complèteme­nt les règles en matière d’immigratio­n tant au Québec qu’au Canada.

Voilà pourquoi les propositio­ns de la CAQ en matière d’immigratio­n ne tiennent tout simplement pas la route !

François Legault fait la démonstrat­ion qu’il ignore complèteme­nt les règles en matière d’immigratio­n tant au Québec qu’au Canada

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