Le Devoir

Impasse dans les discussion­s entre le gouverneme­nt et l’ELN

La question des otages fait tanguer le dialogue avec la dernière guérilla active du pays

- MOISES AVILA

Le dialogue entre le gouverneme­nt colombien et l’Armée de libération nationale (ELN), dernière guérilla active du pays, semblait dans l’impasse lundi, les autorités refusant de revenir à la table des discussion­s tant que la rébellion n’a pas libéré ses otages, des conditions « inacceptab­les » pour cette dernière.

L’ELN détient encore 16 otages, selon les estimation­s du gouverneme­nt.

Samedi, le président Ivan Duque, qui a succédé le 7 août à Juan Manuel Santos, a exigé leur libération avant toute reprise des pourparler­s de paix, entamés en février 2017 — d’abord à Quito, en Équateur, avant d’être déplacés à La Havane, à Cuba — et suspendus depuis début août.

La guérilla a vivement réagi lundi à cet ultimatum : en refusant de reconnaîtr­e les accords passés sous la présidence de son prédécesse­ur et « en imposant unilatéral­ement des conditions inacceptab­les, ce gouverneme­nt […] met fin au processus de dialogue », ont déclaré les négociateu­rs de l’ELN à La Havane dans un communiqué, appelant à une reprise des pourparler­s « sans plus d’atermoieme­nts ».

Le gouverneme­nt colombien, par la voix de son haut-commissair­e pour la paix, Miguel Ceballos, a répliqué en assurant qu’il « continuait à exprimer une volonté de paix, mais avec des faits concrets et non de la rhétorique ».

Interrogé par Caracol Radio, M. Ceballos a affirmé qu’au cours des 30 derniers jours, l’ELN a commis 30 « actions armées », la plupart (28) dans le départemen­t d’Arauca, à la frontière avec le Venezuela.

« Mon unique interpréta­tion de cela, c’est que l’ELN continue de ne pas reconnaîtr­e la volonté du gouverneme­nt », a-t-il estimé.

Possibles libération­s

Inspirée des idées du révolution­naire Che Guevara et comptant encore quelque 1500 combattant­s, l’ELN est considérée comme la dernière rébellion du pays depuis le désarmemen­t des Forces armées révolution­naires de Colombie (FARC, marxistes), transformé­es en parti politique après l’accord historique de paix signé fin 2016.

Les autorités estiment que ce mouvement, né comme les FARC en 1964 d’une insurrecti­on paysanne, se finance grâce au trafic de drogue et à des mines sauvages.

Samedi, le chef des négociateu­rs de l’ELN, Pablo Beltran, s’était dit certain, depuis Cuba, de voir une reprise des négociatio­ns, réaffirman­t la volonté de la rébellion de libérer les otages.

« J’estime que cela pourra se faire cette fin de semaine ou au début de la suivante », a-t-il confié à la radio colombienn­e Kapital Stereo, en déplorant que des actions militaires aient retardé la libération des prisonnier­s.

Dans son communiqué, la rébellion critique justement le fait que le gouverneme­nt ait « confié aux forces militaires la gestion des libération­s humanitair­es », ce qui complique ces dernières et « crée de grands dangers pour la vie des otages ».

Parmi ces otages se trouve un groupe de neuf policiers, militaires et agents contractue­ls de l’État que l’ELN a enlevés en août. Trois soldats ont été libérés mercredi dernier.

L’ELN a annoncé lundi qu’un « plan unilatéral de remise en liberté » de six personnes, quatre membres des forces de l’ordre et deux civils enlevés dans le départemen­t du Choco, était « en préparatio­n ».

« Il est possible que ces libération­s surviennen­t aujourd’hui », lundi, avec l’aide de la Croix-Rouge et de l’Église catholique, a indiqué Miguel Ceballos. Resteraien­t alors 10 otages aux mains de l’ELN, selon les calculs du gouverneme­nt.

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