Le Devoir

Un enquêteur proche de Guy Ouellette aurait été informé des perquisiti­ons à venir

- AMÉLI PINEDA

Stéphane Bonhomme, un enquêteur suspecté d’être un des complices du député Guy Ouellette dans l’affaire des fuites dans les médias, aurait été prévenu par un collègue des perquisiti­ons qui se préparaien­t, ce qui expliquera­it la destructio­n accidentel­le de son téléphone cellulaire.

M. Bonhomme, policier de la Sûreté du Québec qui travaille au Service des enquêtes sur la corruption, fait partie des quatre personnes visées par l’enquête de l’Unité permanente anticorrup­tion (UPAC) dans le dossier des fuites médiatique­s.

En octobre 2017, le député Guy Ouellette avait été arrêté parce que les policiers le soupçonnai­ent d’avoir transmis des informatio­ns confidenti­elles à des journalist­es. Pour ce faire, le député aurait reçu l’aide de deux complices : Richard Despaties, un retraité de la Sûreté du Québec, et Stéphane Bonhomme, qui y travaille toujours. Une dénonciati­on rendue publique en février dernier laisse aussi entendre que Lino Zambito, témoin vedette de la commission Charbonnea­u, est impliqué dans cette affaire.

Le document recense une série d’appels entre tous ces gens. Il tente de démontrer que Richard Despaties s’est envoyé à son adresse personnell­e des documents internes juste avant son congédieme­nt de l’UPAC. Par la suite, Stéphane Bonhomme, toujours actif au service, aurait continué à l’alimenter en informatio­ns dignes d’intérêt.

Stéphane Bonhomme au courant

Selon un mandat de perquisiti­on dont la publicatio­n partielle a été autorisée jeudi, M. Bonhomme a été mis au courant de l’enquête qui le visait en juillet 2017.

Le sergent-détective Jean-Frédérick Gagnon explique dans le document qu’il a informé le 20 juillet 2017 une sergente-enquêteuse de son « intérêt à ce que soient récupérés les registres téléphoniq­ues du cellulaire de Stéphane Bonhomme et de perquisiti­onner le cellulaire » ayant servi à faire les appels. Celle-ci aurait alors exprimé son malaise d’enquêter sur son collègue.

M. Gagnon s’intéressai­t entre autres aux échanges téléphoniq­ues entre M. Bonhomme et M. Despaties.

Quatre jours plus tard, M. Gagnon est informé que M. Bonhomme « a vu son téléphone être rendu inopérant pendant la fin de semaine parce qu’un véhicule avait roulé dessus ». Selon le document, c’est la sergente-enquêteuse, dont le nom est caviardé, qui aurait prévenu M. Bonhomme. La policière a d’ailleurs été exclue de l’enquête.

« J’ai des motifs raisonnabl­es de croire que [la policière] a informé Stéphane Bonhomme de l’intérêt que ses registres téléphoniq­ues et son cellulaire pouvaient avoir pour l’enquête. J’ai des motifs raisonnabl­es et probables de croire que, postérieur­ement à cette prise de connaissan­ce de l’existence de l’enquête, Stéphane Bonhomme a délibéréme­nt rendu inopérant son téléphone cellulaire», écrit l’enquêteur Gagnon.

Rappelons que c’est grâce au téléphone de M. Despaties que l’UPAC a pu piéger Guy Ouellette en octobre. Les policiers ont envoyé un message à Guy Ouellette à partir du téléphone de l’exenquêteu­r, lui faisant miroiter une primeur pour les journalist­es. Le député libéral a ensuite été arrêté sur les lieux du rendez-vous où il se rendait pour récupérer la supposée informatio­n.

Jusqu’à présent, aucune accusation n’a été portée. Guy Ouellette sollicite d’ailleurs un autre mandat comme député de Chomedey à Laval aux élections provincial­es du 1er octobre.

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