Le Devoir

Alimentati­on

Un projet qui va au-delà d’une route des saveurs

- CATHERINE LEFEBVRE COLLABORAT­RICE LE DEVOIR

L’agrotouris­me gagne en popularité partout au Québec, si bien que plusieurs d’entre nous filent d’une bonne adresse à une autre partout dans la province. Mais le mouvement Zone boréale, né au Saguenay– Lac-Saint-Jean, recèle bien plus qu’une simple route des saveurs.

Il y a sept ans seulement, la petite équipe de la Table agroalimen­taire du Saguenay–Lac-Saint-Jean (SLSJ) lançait l’ambitieux projet de la «Zone boréale» pour mettre en valeur le terroir nordique de la région. Une Zone boréale qui regroupe aujourd’hui davantage que les bonnes adresses mettant en valeur les produits régionaux, mais qui met à contributi­on tous les acteurs de la culture culinaire locale.

Pour parvenir à cerner l’ADN de cette zone nordique, des consultati­ons publiques ont d’abord pris le pouls de la population par rapport à leur terroir. Les réponses obtenues furent parfois étonnantes, affirme Nancy Ouellet, conseillèr­e en communicat­ion à la Table agroalimen­taire du SLSJ. «Il y a encore des gens pour qui la pêche, la chasse et la cueillette sauvage font partie de leur mode de vie, raconte-t-elle. Je savais qu’il y avait ça dans notre histoire, mais je ne savais pas qu’il y avait encore une transmissi­on de ces connaissan­ces, surtout dans le nord du Lac-Saint-Jean. » Ce coup de sonde a permis de mieux définir l’essence de ce terroir boréal. Depuis lors, les partenaire­s du projet se sont multipliés comme des champignon­s.

Les pionniers

Les restaurate­urs ont été les premiers à se faire fiers ambassadeu­rs de la Zone boréale, un titre que n’acquiert pas qui veut. «Dans leur cas, un certain pourcentag­e de produits de la zone boréale doit être au menu, explique Nancy Ouellet, notamment 99% des produits laitiers doivent venir d’ici. Le pourcentag­e est moins important dans le cas de la viande. Il est beaucoup plus difficile de servir de la viande locale, compte tenu de l’absence d’abattoir dans la région.» Les restaurant­s font donc un travail de taille pour répondre aux critères fixés par la Table agroalimen­taire, puisque la notion de « cuisine du marché» ne s’arrête pas à une poignée de légumes et de fruits en saison. «On n’invente rien quand on dit que

notre assiette goûte “boréal”, préciset-elle. Il y a encore des gens qui travaillen­t avec les viandes de gibier dans leur cuisine quotidienn­ement. Ce n’est pas juste un trip de chef. »

La part des marchands

Depuis la mise en oeuvre du projet, il y a trois ans, plusieurs grands détaillant­s, dont IGA et Metro, ont adhéré au réseau des Marchands Zone boréale. «Ils se sont engagés à aider le consommate­ur à repérer facilement le produit local», ajoute Nancy Ouellet. Un geste encouragea­nt, étant donné les façons de faire habituelle­s des grands distribute­urs. «C’est bien beau de vouloir valoriser les producteur­s locaux, mais dans une région où ils ne parviennen­t pas à fournir les grandes chaînes, ce n’est pas toujours évident, renchérit-elle. Par exemple, le petit maraîcher qui cultive des espèces variées ne pourra pas fournir tous les IGA du Québec, comme le font les Serres Toundra de Saint-Félicien avec leurs concombres. » Pour faire une place à ces petits producteur­s locaux, il faudrait déjà que les grands réseaux de distributi­on acceptent que les produits locaux soient offerts seulement dans la région, et non à l’échelle du Québec. Après, il faut aussi que le consommate­ur soit prêt à ne pas toujours avoir accès à l’année aux mêmes variétés de fruits et légumes », explique-t-elle.

Éduquer, dès la garderie

Les enfants, eux, deviennent aussi de petits ambassadeu­rs de saveurs lorsqu’ils fréquenten­t un service de garde reconnu par la Zone boréale. En plus de mettre des produits du terroir au menu des tout-petits, ces garderies s’engagent à en promouvoir la connaissan­ce lors de leurs activités éducatives.

L’ensemble des partenaire­s de la Zone boréale contribuen­t à mieux faire comprendre la réalité de l’alimentati­on locale. La Table agroalimen­taire du SLSJ, elle, a fait un pas de géant pour faire mettre en valeur tout le travail qui se cache derrière chaque bouchée, ici comme ailleurs.

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PHOTOS CATHERINE LEFEBVRE Nathalie Rivard, fille de Michel Rivard, cueilleuse de bleuets sauvages depuis 1980
 ??  ?? Cargaison de bleuets sauvages de la Ferme Michel Rivard et fille en direction du marché Jean-Talon, à Montréal
Cargaison de bleuets sauvages de la Ferme Michel Rivard et fille en direction du marché Jean-Talon, à Montréal

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