Le Devoir

LES OBSERVATEU­RS

- AMIR KHADIR

Le Devoir s’est tourné vers quatre anciens politicien­s de toutes allégeance­s pour connaître leurs impression­s sur la campagne. Aujourd’hui, l’ex-député solidaire Amir Khadir prend la parole. Propos recueillis par Améli Pineda.

Qu’est-ce qui a le plus retenu votre attention durant la dernière semaine de campagne ?

Le débat des chefs. Tout le monde s’entend pour dire qu’en 2012, Françoise [David] avait gagné le débat en marquant les esprits. Et j’ai l’impression qu’en 2018, on a vécu le même phénomène avec Manon Massé, mais que certains commentate­urs et analystes de la scène politique ne l’ont peut-être pas encore réalisé. Depuis jeudi, les gens que je rencontre me parlent de la performanc­e de Mme Massé et, ce qui les a marqués, c’est qu’elle est restée ellemême. J’ai une électrice indécise à qui j’ai parlé et qui l’a bien résumé : lancer des chiffres et des chiffres, ça finit par étourdir. Ce que les gens veulent savoir, c’est la vision du Québec qu’a chacun des chefs, et ça, Manon a réussi à le faire. Les trois minutes de temps de parole en moins, pour les gens ordinaires, ce n’est pas ça qui est marquant. Ils ont vu une femme tenir tête aux trois autres chefs, avoir un discours cohérent et garder son calme lorsque les trois autres se chicanaien­t.

Québec solidaire semble avoir inspiré certains adversaire­s dans leurs engagement­s. Le Parti libéral du Québec, notamment, a tenté de dépasser QS par la gauche en proposant la gratuité du transport collectif pour les étudiants et les aînés. Qu’en pensez-vous ?

Selon moi, ça prouve que, même avec une faible députation, Québec solidaire a été capable de marquer l’espace politique. Avant notre arrivée à l’Assemblée nationale, on parlait de rigueur budgétaire, d’accorder des marges au marché, mais on parlait très peu d’enjeux humains et sociaux. Je pense que la présence de QS force les partis à se positionne­r sur des enjeux qu’on dit « à gauche », comme le transport en commun ou les soins dentaires. Par contre, je pense que les gens ne sont pas dupes et qu’ils vont préférer l’original à la copie diluée.

À mi-campagne, quel est l’enjeu « oublié » qui doit être abordé par les chefs avant la fin de la campagne ?

L’indépendan­ce. Manon a tenté de la raviver parce que, si on veut que notre avenir soit écologique, il faut remettre en question notre place au sein de la fédération canadienne. Notre plan de transition énergétiqu­e implique une meilleure maîtrise de tous nos moyens. L’autre enjeu qu’il faut aborder, c’est notre rapport avec les peuples autochtone­s, qui s’attendent à des engagement­s clairs des partis politiques. Les Premières Nations ont une vision de leur avenir qui ne trouve malheureus­ement pas d’écho, et les formations politiques doivent davantage les inclure dans leurs engagement­s.

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