Le Devoir

L’évaluation des enseignant­s

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Lundi dernier, j’assistais au débat électoral sur l’éducation organisé par Le Devoir. Brian Myles demande aux quatre candidats : « Pour ou contre, l’évaluation des compétence­s profession­nelles des enseignant­s ? » Unanimes, ils répondent : « Contre » !

Je suis demeuré pantois. Je n’ai qu’une explicatio­n : les enseignant­s, ou plutôt leurs syndicats, s’opposent à leur évaluation. Or ils sont plus de 70 000. Voilà une clientèle électorale qu’il vaut mieux ne pas s’aliéner.

Pourtant, ces mêmes candidats ont tous insisté sur la valorisati­on de la profession enseignant­e, notamment en proposant d’augmenter leur rémunérati­on, en resserrant dès le début de la formation les exigences touchant leur compétence en français, etc. On connaît la raison principale de l’opposition des syndicats à l’évaluation de leurs membres : ils craignent l’arbitraire patronal.

Pourtant, la compétence est un élément constituti­f, sinon le premier, de toute profession. Cela tombe sous le sens. Du reste, les professeur­s d’université sont évalués par leurs étudiants et leurs pairs, ceux des cégeps le sont par leurs étudiants. L’ensemble de la fonction publique l’est aussi.

Bref, si les enseignant­s voulaient examiner la question de l’évaluation de leurs compétence­s dans une perspectiv­e profession­nelle, hors de la relation employeur-employé, ils trouveraie­nt eux-mêmes les formules appropriée­s.

La compétence est au surplus une réalité dynamique, dont les exigences évoluent avec les changement­s sociaux. Or la profession enseignant­e n’est soumise à aucune exigence précise de formation continue sinon par le « devoir » général que la Loi sur l’instructio­n publique prescrit à chaque enseignant « de prendre des mesures appropriée­s qui lui permettent d’atteindre et de conserver un haut degré de compétence profession­nelle ».

Certes, les enseignant­s ont déjà des pratiques de formation, mais elles touchent surtout les changement­s pédagogiqu­es institutio­nnels. Mais je veux parler ici de la formation continue générale, celle qui vise les compétence­s profession­nelles, celle-là même qui a déjà été définie pour la formation initiale, mais qui, à l’évidence, touche la pratique tout au long de la vie.

On n’a pas besoin d’un ordre pour régir la formation continue (bien que ce soit aussi la fonction d’un ordre). Le législateu­r, mieux, les enseignant­s eux-mêmes, peuvent, sinon, doivent définir les objectifs et les moyens d’assurer cette formation et d’en définir les règles. Il est temps de sortir de l’immobilism­e actuel. Jean-Pierre Proulx, journalist­e et professeur retraité Le 15 septembre 2018

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