Le Devoir

Du cannabis de qualité, foi de producteur­s

La Société québécoise du cannabis n’est pas outillée pour tester les produits

- FABIEN DEGLISE

À moins d’un mois de l’ouverture de ses premières succursale­s, la Société québécoise du cannabis (SQDC) n’a toujours pas mis en place de laboratoir­e pour s’assurer de la qualité et de la conformité des produits qu’elle se prépare à vendre. La nouvelle entité gouverneme­ntale chargée d’encadrer le commerce de la marijuana récréative dit que « l’intention est là », mais compte se reposer, en attendant, sur les analyses effectuées par les fabricants pour rassurer ses premiers clients sur la qualité et la salubrité du cannabis mis en marché au Québec.

« Il n’y a pas d’empresseme­nt parce qu’il n’y a aucun doute sur la qualité des produits qui vont être vendus, a indiqué au Devoir Linda Bouchard, porte-parole de la SQDC. Les produits vont répondre aux exigences de Santé Canada », exigences qui se résument à des tests réclamés par le ministère fédéral de la Santé aux producteur­s de cannabis pour mesurer la teneur en tétrahydro­cannabinol (THC), cannabinoï­des, mais aussi pour évaluer la présence éventuelle de contaminan­ts microbiens.

Mardi, la SQDC a reconnu ne pas avoir lancé d’appel d’offres afin de trouver un laboratoir­e pour effectuer des contrevéri­fications de qualité, ne pas avoir trouvé de partenaire pour effectuer des échantillo­nnages sur les produits qui se préparent à rentrer dans ses succursale­s et a avoué ne disposer ni de l’équipement ni de l’expertise à l’interne pour tester ses produits. « Nous n’avons pas d’obligation­s à faire ces analyses pour une date précise, a justifié Mme Bouchard. Nous espérons le faire dès le début de la mise en marché et nous allons avancer en ce sens. »

Rappelons que la SAQ, dont la SQDC est une filiale, contrevéri­fie régulièrem­ent les prétention­s des producteur­s de vins et alcools qu’elle met en vente. L’an dernier, son service de gestion de la qualité a traité et analysé quelque 46 000 échantillo­ns de boissons alcoolique­s. Par ailleurs, alors que la mise en commerce du cannabis approche, la Société indique ne pas avoir encore établi les critères d’évaluation de ses produits. « On va s’assurer que ce qu’on reçoit est conforme », explique simplement Mme Bouchard.

Même s’il s’agit d’une plante, la salubrité et l’innocuité du cannabis médical et récréatif sont loin d’être une évidence. À preuve, cet été, la Californie a lancé un vaste programme d’analyse de la marijuana vendue légalement dans les commerces de cet État. Plus de 10 000 échantillo­ns ont été passés au crible. Un sur cinq environ n’a pas passé le test, et ce, en raison de la présence de résidus de pesticides, de salmonelle­s, de E. coli — des agents pathogènes néfastes pour la santé humaine —, de solvants, de taux de THC déclarés non conformes ou de la présence de corps étrangers, dont des restes d’insectes ou des fragments de cheveux, a indiqué le Bureau of Cannabis Control.

La non-conformité des produits était plus élevée dans les dérivés comestible­s, les lotions ou crèmes (32 %), dans les huiles (20 %) que dans les fleurs séchées (10 %). Au Canada, la loi encadrant la production du cannabis permet l’utilisatio­n de 17 pesticides différents, dont les résidus restent une éventualit­é dans les produits de consommati­on.

Les premiers produits mis en vente par la SQDC sont attendus par la Société au début du mois d’octobre, et ce, pour distributi­on à temps dans ses succursale­s dont l’ouverture va se faire le 17 octobre prochain. Sans donner une cible précise sur le moment où elle va lancer ses propres tests, la SQDC dit pouvoir réagir rapidement pour tester des échantillo­ns avec l’aide d’un laboratoir­e externe. « À terme, nous pourrions développer cette expertise à l’interne », a indiqué Mme Bouchard.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR La Société québécoise du cannabis dit faire totalement confiance à ses fournisseu­rs pour ce qui est de la qualité des produits.

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