Le Devoir

Inquiets, les producteur­s laitiers lancent un nouvel appel à Ottawa

Les autres accords commerciau­x ont des impacts négatifs, font-ils valoir, en espérant que l’ALENA pourra les épargner

- FRANÇOIS DESJARDINS Avec Hélène Buzzetti Avec La Presse canadienne

L’industrie laitière canadienne est catégoriqu­e : tout nouvel accord de libreéchan­ge avec les États-Unis devra l’épargner entièremen­t, car elle a « déjà fait les frais » des ententes qui ont été signées avec l’Europe et les pays du Partenaria­t transpacif­ique (PTP).

Les représenta­nts du secteur ont convergé vers Ottawa mercredi afin d’insister sur l’effet que des concession­s sur la gestion de l’offre pourraient avoir non seulement sur les producteur­s, mais sur la constellat­ion de fournisseu­rs et de transforma­teurs qui gravitent autour de l’industrie.

« L’industrie laitière ne peut à nouveau subir des impacts négatifs avec cet accord commercial », a dit le président des Producteur­s laitiers du Canada (PLC), Pierre Lampron, lors d’une conférence de presse avec d’autres producteur­s venus d’ailleurs au pays.

Lorsqu’un journalist­e a demandé s’il y avait un plan B au cas où les négociatio­ns ne tourneraie­nt pas à leur avantage, David Wiens, producteur manitobain et vice-président des Producteur­s laitiers, a dit que « nous entrons dans la spéculatio­n ». Le premier ministre Justin Trudeau appuie le système de gestion de l’offre, en particulie­r dans l’industrie laitière, a-t-il affirmé. « Nous lui avons expliqué qu’un appui à la gestion de l’offre signifie qu’il ne devrait y avoir aucune concession sur la gestion de l’offre. »

Selon les PLC, l’accord de libreéchan­ge avec l’Europe et le PTP ont eu pour effet de réduire de 250 millions de dollars la production laitière au Canada. L’accord avec l’Europe a permis l’entrée de 17 000 tonnes de fromage par année, alors que le PTP prévoit la cession de 3,25 % des quotas d’importatio­n supplément­aires pour les produits laitiers.

En guise de compensati­on, Ottawa a offert 250 millions en aide à l’investisse­ment et 100 millions pour appuyer la diversific­ation des marchés.

Si la compensati­on financière pour l’ouverture faite dans le cadre du libreéchan­ge avec l’Europe a été dévoilée, ce n’est pas le cas encore pour le PTP. « Ce qu’on veut, ce ne sont pas des chèques, c’est répondre au marché pour que nos revenus viennent du marché», a dit M. Lampron.

Protéger « intégralem­ent » ?

Le premier ministre Justin Trudeau a fait savoir mercredi que le Canada en voulait plus de ses partenaire­s de négociatio­n avant de signer un nouvel Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Il a estimé que le gouverneme­nt avait exprimé très clairement son intérêt pour ce qui pourrait être une bonne affaire pour le Canada, mais qu’un certain nombre de choses « devraient bouger avant d’y arriver ».

Selon La Presse canadienne, les Américains auraient renoncé à leurs demandes controvers­ées d’inclure des clauses « Buy American » pour les lucratifs marchés publics. Comme conçu à l’origine, le plan des États-Unis aurait limité la capacité de leur pays respectif à soumission­ner pour de précieux projets d’infrastruc­ture du gouverneme­nt américain.

Quand le bloquiste Mario Beaulieu a demandé à M. Trudeau à la période de questions s’il allait protéger « intégralem­ent» la gestion de l’offre, le premier ministre a répondu que « comme je l’ai dit directemen­t aux producteur­s agricoles, y compris aux producteur­s laitiers à travers le pays, nous allons protéger la gestion de l’offre ».

Sur les autres sujets que le Canada voulait aborder dans le cadre des discussion­s — égalité des sexes, Autochtone­s, environnem­ent, etc. —, M. Trudeau a dit en point de presse qu’il y a eu « du bon progrès ».

La ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, qui était à Washington mercredi, est arrivée dans la capitale américaine mardi, alors qu’un des principaux alliés du président Donald Trump au sein du Congrès indiquait clairement que certains législateu­rs américains commencent à en avoir assez de ce qu’ils considèren­t comme l’intransige­ance du Canada.

Le représenta­nt Steve Scalise, un républicai­n de la Louisiane, a mis en garde contre une «frustratio­n croissante » envers ce qu’il a appelé « les tactiques de négociatio­ns » du Canada.

Des observateu­rs précisent que le Congrès souhaite que le Canada fasse partie d’un accord commercial tripartite, mais pas nécessaire­ment au prix de l’entente préliminai­re conclue avec le Mexique. Cette entente doit être approuvée par le Congrès avant le 1er décembre, puisque le nouveau gouverneme­nt mexicain qui prendra le pouvoir en janvier a exprimé certaines réserves à son égard.

Le Canada, pendant ce temps, résiste aux échéancier­s que tente de lui imposer le gouverneme­nt Trump pour en venir à une entente — tout d’abord la fin août, puis maintenant la fin septembre.

L’industrie laitière ne peut à nouveau subir des impacts négatifs avec cet accord commercial PIERRE LAMPRON

 ?? ADRIAN WYLD LA PRESSE CANADIENNE ?? Les membres du c.a. des Producteur­s laitiers du Canda, de gauche à droitear : Blaine McLeod, David Wiens, Pierre Lampron, Ralph Dietrich et Bruno Letendre
ADRIAN WYLD LA PRESSE CANADIENNE Les membres du c.a. des Producteur­s laitiers du Canda, de gauche à droitear : Blaine McLeod, David Wiens, Pierre Lampron, Ralph Dietrich et Bruno Letendre

Newspapers in French

Newspapers from Canada