Le Devoir

Une Paix des braves avec chaque nation autochtone

Le chef caquiste se garde de rabrouer les policiers de la SQ portant le « bracelet 144 »

- MARCO BÉLAIR-CIRINO

À SAGUENAY Le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, veut conclure des ententes, inspirées de la Paix des braves, avec chacune des nations autochtone­s. Préconisan­t « le respect entre les nations », il refuse toutefois de dénoncer le « bracelet 144 » porté par des agents de la Sûreté du Québec.

En effet, des policiers arborent un bracelet rouge orné de huit étoiles en guise de solidarité avec leurs huit confrères du poste de Val-d’Or visés par des allégation­s de violence contre des femmes autochtone­s. « Je ne veux pas m’embarquer à juger ce geste », a déclaré M. Legault à Chibougama­u mardi. Il s’en remet à l’Associatio­n des policières et policiers provinciau­x du Québec (APPQ). « Ce n’est pas à moi de décider. »

Pourtant, les Premières Nations voient dans le port du « bracelet 144 » un geste d’« intimidati­on » et de « provocatio­n » de la part des policiers de la SQ. Le président de la Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtone­s et certains services publics au Québec, Jacques Viens, a dit « espérer qu’on en vienne, à un moment donné, à abandonner cette pratique » adoptée après la suspension de huit policiers visés dans le reportage « Abus de la SQ : les femmes brisent le silence » sur les ondes de Radio-Canada il y a près de deux ans.

Après avoir été pressé de questions, M. Legault s’est dit disposé à « discuter » de différente­s mesures pour rétablir un climat de confiance entre les Premières Nations et les autorités. « Une chose est claire : il faut refaire les liens », a-t-il affirmé.

Le candidat caquiste dans Ungava, Denis Lamothe — un ex-agent de la SQ —, appréhende les effets du port prolongé du « bracelet 144 » par des agents en Abitibi-Témiscamin­gue. « Je peux comprendre la position du syndicat là-dedans: on porte le brassard pour se plaindre. Mais si on veut se rapprocher des communauté­s autochtone­s, je ne suis pas sûr que c’est la meilleure idée », a-t-il affirmé, aux côtés de M. Legault dans les installati­ons de Chantiers Chibougama­u, dans le Nord-du-Québec.

Le port du « bracelet 144 » ne constitue « pas une action facilitant le rapprochem­ent », a souligné la porte-parole du Parti libéral du Québec, Catherine Maurice. Craignant de prendre une décision qui pourrait «compliquer davantage la situation », l’équipe de Philippe Couillard « laisse le soin aux organisati­ons concernées [l’APPQ et la SQ], de prendre les mesures jugées appropriée­s ».

De son côté, le chef du Parti québécois, Jean-François Lisée, a lancé aux policiers d’«ici et ailleurs»: «N’affichez pas vos conviction­s ! » « Lorsqu’on est en situation d’autorité, qu’on est policier, on n’affiche pas ses conviction­s. Ni religieuse­s ni syndicales, et surtout pas lorsqu’il y a une controvers­e locale », a-t-il dit, à Val-d’Or.

Le chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL), Ghislain Picard, salue la sortie du chef péquiste. « M. Lisée dit exactement ce qu’on aurait voulu entendre du présent gouverneme­nt », a-t-il indiqué au Devoir. « Les policiers ont une curieuse façon de restaurer une confiance brisée. Ce sont des gestes qui sont inacceptab­les, qui intimident et provoquent. »

Une entente 2.0

Dans ce climat de tension, François Legault a pris l’engagement mardi d’amorcer des « discussion­s » avec les nations autochtone­s en vue de conclure avec

Des agents de la Sûreté du Québec portent un bracelet en solidarité avec leurs huit confrères du poste de Val-d’Or visés par des allégation­s de violence contre des femmes autochtone­s

elles des ententes calquées sur la Paix des braves, convenue entre Québec et les Cris en 2002. En plus d’un versement de 3,5 milliards de dollars à la nation crie, celle-ci prévoyait la prise en charge par la communauté de son développem­ent social, économique et culturel, la résolution des litiges opposant les Cris et le Québec ainsi que la mise en valeur des ressources naturelles, dont l’hydroélect­ricité.

« On a eu une entente au Québec avec la nation crie. Moi, je pense que ce serait une bonne idée de regarder pour en avoir une avec chacune des nations […] concernant la santé, l’éducation, le développem­ent économique, aussi », a fait valoir François Legault, réitérant son appui à la Déclaratio­n des Nations Unies sur les droits des peuples autochtone­s.

Le chef du PLQ, Philippe Couillard, a proposé quant à lui un marché aux Premières Nations qu’il considère comme des « alliés objectifs » en vue d’éventuelle­s discussion­s constituti­onnelles avec Ottawa et les autres provinces : « Je vais vous soutenir pour avoir l’autodéterm­ination plus importante. Et vous devriez soutenir les Québécois dans leur demande de reconnaiss­ance collective plus forte», a-t-il déclaré lors d’une rencontre éditoriale avec Le

Devoir lundi.

M. Lisée a promis que le passé sera garant de l’avenir en ce qui concerne les relations entre les autochtone­s et un éventuel gouverneme­nt péquiste. « Nous sommes ceux qui ont négocié, avec Bernard Landry, la Paix des Braves — qui est l’étalon-or internatio­nal [en la matière]. On a envoyé un très grand nombre de signaux très positifs dans le type de relation qu’on veut avoir avec les nations autochtone­s. »

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