Le Devoir

Une stratégie qui a fait sourciller au Part i québécois

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L’ancien chef du Bloc québécois — qui n’a jamais digéré les liens entre Québec solidaire et le Nouveau Parti démocratiq­ue, responsabl­e de sa défaite électorale en 2011 — estime ainsi que Mme Massé a un anglais «aussi bon [que son] français », cela alors que la principale intéressée ne fait pas de mystère de ses difficulté­s à s’exprimer en anglais.

En relevant ce qui lui écorche les oreilles quand Mme Massé parle (des liaisons mal faites, des erreurs syntaxique­s), M. Duceppe fait valoir « qu’on devrait mieux parler que cela » quand on aspire à diriger le Québec.

Jean-François Lisée n’a pas semblé apprécier cet élément de la sortie de M. Duceppe. « Ça lui appartient. Moi, je conseille à tous ceux qui veulent entrer dans le débat public de se concentrer sur les arguments et les programmes. »

Mais au-delà de la forme, il y a le fond qui dérange Gilles Duceppe : le fait que les solidaires seraient souveraini­stes «de temps en temps», puisque certains appuient le NPD au fédéral. Plus largement, « ce qu’ils proposent est en dehors de la réalité », pense-t-il.

M me Massé a pris le tout avec détachemen­t. « M. Duceppe fait toujours référence [au député sortant solidaire] Amir Khadir, qui avait dit [en 2011] qu’au Québec, à certains endroits, il fallait voter Bloc, et à d’autres, NPD pour bloquer Stephen Harper. Je suis complèteme­nt ailleurs. […] Si M. Duceppe a encore des rancoeurs… »

Dissension

En début de journée, Jean-François Lisée avait reconnu avoir dû expliquer mardi au conseil de direction du PQ le bien-fondé de sa décision-surprise d’attaquer Manon Massé en ouverture du débat de TVA, la semaine dernière.

« Il n’y a jamais d’unanimité au Parti québécois, ça n’existe pas », a dit M. Lisée depuis Rouyn-Noranda.

Mais selon lui, la réunion téléphoniq­ue avec la quinzaine de membres de la direction a permis de trouver un « consensus sur le résultat » de sa stratégie. « Ce qu’on a vécu ces derniers jours, où QS a dû se dévoiler, c’est sain pour la démocratie, a-t-il dit. Certains pensent que ça aurait dû se faire avant. Moi, je pense que c’était le bon moment… Et comme je suis le chef, j’ai le dernier mot. »

Quand on lui a demandé si Véronique Hivon faisait partie des gens qui demandaien­t à être convaincus (elle est membre de la direction), M. Lisée a répondu qu’il n’a pas « l’intention de révéler la totalité des conversati­ons qui ont lieu sur des questions stratégiqu­es » entre lui et sa vice-chef. Mme Hivon avait dirigé les tentatives de rapprochem­ent avec QS en 2016-2017.

« On discute elle et moi tous les jours, de tous les sujets. Elle est vice-chef, je suis chef. Donc c’est moi qui prends les décisions. Je me fais fort de l’écouter souvent et de suivre ses conseils souvent, mais pas tout le temps. »

Interrogée à Montréal, où elle tenait un point de presse, Mme Hivon n’a pour sa part pas voulu dire si elle se sentait à l’aise avec la stratégie d’attaquer QS. « Nos échanges, évidemment, sont privés et je pense que tout le monde va comprendre ça », a-t-elle répondu.

D’autres péquistes ont aussi laissé paraître un certain malaise face au plan de Jean-François Lisée. À Rouyn-Noranda, le député sortant, François Gendron (42 ans de parlementa­risme), a poliment refusé de s’entretenir avec les médias après un événement avec M. Lisée. « Le point de presse national est terminé », a-t-il botté en touche.

À Montréal, le candidat Olivier Gignac (Gouin) participai­t à un débat avec Gabriel Nadeau-Dubois (QS). Questionné par une étudiante, M. Gignac a répondu qu’il craignait de « devoir lancer de la boue » quand il s’est lancé en

politique. « Ça, ce sont mes valeurs à moi. M. Lisée a eu une vision différente. Lui, il est chef, il voit des choses que je ne vois pas, [ce n’est pas à moi de] juger si c’était la chose à faire. »

René Lévesque

En début de journée, Manon Massé avait dit prendre « comme un compliment» les attaques variées de JeanFranço­is Lisée à l’égard du programme de QS ou du fonctionne­ment du parti. « La plus grande preuve que le vent est en train de tourner, c’est le tourbillon d’attaques de la part de nos adversaire­s », pense-t-elle.

« M. Lisée, souvenez-vous, vous nous reprochez aujourd’hui la même chose qu’on reprochait hier au PQ de René Lévesque », a avancé Mme Massé alors que son parti mettait en ligne une vidéo où l’on voit un député de l’Union nationale qualifier la formation de M. Lévesque d’« extrémiste ».

La vidéo rappelle également que M. Lisée a traité cette semaine QS de parti « sectaire, dogmatique, ancré dans le marxisme ».

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR La vice-chef du Parti québécois, Véronique Hivon, n’a pas voulu dire si elle se sentait à l’aise e avec la stratégie d’attaquer QS.
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