Le Devoir

Le PQ réfléchira à la convergenc­e avec QS

Une alliance ne semble pas au coeur des priorités du parti de Massé

- GUILLAUME BOURGAULT-CÔTÉ AMÉLI PINEDA

Au lendemain d’une soirée électorale aux allures de catastroph­e, le Parti québécois (PQ) encaissait le choc mardi. Mais une conclusion s’impose déjà pour la présidente du parti : la question de la convergenc­e avec Québec solidaire (QS) devra se poser de nouveau. À condition que QS ouvre une porte qui semble pour l’instant fermée.

« L’analyse et les conclusion­s à tirer, on va prendre le temps de les tirer comme il se doit », a soutenu Gabrielle Lemieux mardi.

Il est toutefois évident à ses yeux que la question de la convergenc­e « fera partie des réflexions. Je pense que la population, et en particulie­r les jeunes, veut que les partis fassent preuve d’ouverture, qu’on ne ferme pas la porte à des discussion­s qui pourraient avantager tous les Québécois ».

« On ne sait pas ce qui serait arrivé si QS avait accepté l’offre d’alliance électorale » proposée par le PQ en 2017, soulignait de son côté la députée Catherine Fournier, l’une des rares rescapées de l’élection de lundi — et l’une des rares péquistes à s’exprimer mardi.

« Maintenant qu’on a un gouverneme­nt de droite avec une opposition de droite, il faudra réfléchir à l’avenir, comment faire progresser les voix progressis­tes et souveraini­stes. Il y a des débats qui s’imposent. »

Sauf que pour les solidaires, une alliance ne semble pas au coeur des priorités du parti après leur percée historique. La formation politique de gauche a triplé son nombre de députés, passant de trois à dix, et se voit comme « la véritable opposition officielle » au gouverneme­nt majoritair­e de François Legault.

« On est un nouveau mouvement politique […] et ça ne se réduit pas à des vases communican­ts avec le PQ. [Lundi], on en a eu la démonstrat­ion dans l’urne, alors je pense qu’il faut tourner cette page-là », a fait valoir Gabriel Nadeau-Dubois, co-porte-parole de QS.

Devant les médias, Manon Massé et Gabriel Nadeau-Dubois sont demeurés évasifs sur la possibilit­é d’entreprend­re un dialogue avec les péquistes.

« Il n’y a jamais eu de porte fermée », a assuré Mme Massé, avant d’ajouter que « le seul parti au Québec qui porte réellement les objectifs de changement, c’est QS ».

Stratégie

La fin de la campagne électorale a été marquée par une série d’attaques de Jean-François Lisée contre le programme de QS et autour de son mode de fonctionne­ment.

Le chef démissionn­aire a-t-il eu raison d’agir ainsi? Gabrielle Lemieux reconnaît que « dans la façon de poser les questions, ça aurait pu être fait autrement. Il aurait pu y avoir discussion autour de ces points-là, plutôt que des questions directes ». La population demande « une approche positive » en politique, a-t-elle dit.

« Est-ce que M. Lisée était la bonne personne pour poser ce genre de question ? Ce sera une question à se poser » dans le cadre de l’analyse rétrospect­ive, ajoute Mme Lemieux. M. Lisée était lui-même menacé par un solidaire dans sa circonscri­ption, qu’il a perdue.

Stagnation

Derrière la progressio­n inédite de Québec solidaire (QS) et le recul historique du Parti québécois (PQ) lundi se cache une statistiqu­e nette : en 2014 ou en 2018, les deux formations souveraini­stes et progressis­tes ont obtenu exactement le même niveau d’appui populaire.

En pourcentag­e cumulatif (environ le tiers des voix) ou en nombre de votes exprimés (un peu moins de 1,4 million), le soutien combiné des deux partis n’a donc pas progressé d’un iota : il s’est simplement exprimé différemme­nt pour permettre à QS de faire sept gains (dont quatre aux dépens du PQ, et trois circonscri­ptions ravies aux libéraux).

Le PQ a terminé 34 fois en deuxième place, tandis que QS a obtenu 14 deuxièmes places.

« L’intense activité militante que nous avons dû [déployer] pour nous battre dans nos propres circonscri­ptions, nous l’aurions déployée ensemble pour conquérir d’autres circonscri­ptions et, qui sait, changer l’issue du scrutin », a constaté JeanFranço­is Lisée dans son discours de défaite lundi soir. « On ne peut pas réécrire le passé, mais il faut en tirer des leçons pour l’avenir. »

De son côté, QS n’a pas exprimé de regret sur ce qu’aurait pu changer une alliance péquiste-solidaire, exprimant au contraire de la fierté d’avoir démontré ne pas être « le petit frère » du PQ.

« QS n’est pas une sous-catégorie du PQ. Alors, tous les calculs mathématiq­ues où on tente d’additionne­r les votes ne tiennent pas la route », a insisté M. Nadeau-Dubois.

La Coalition avenir Québec (CAQ) doit entre autres à cette division PQ-QS au moins huit victoires lundi, dont sa percée à Montréal dans Bourget et dans Pointe-aux-Trembles. Dans chacun de ces cas, la CAQ a pu se faufiler, mais avec un niveau d’appui inférieur aux deux autres partis combinés.

Le résultat de cette élection contrastée — euphorisan­te pour QS et déprimante pour le PQ —, c’est que ni l’une ni l’autre des formations ne répond aux critères actuels pour être reconnue comme parti officiel à l’Assemblée nationale. Le premier ministre désigné, François Legault, a toutefois ouvert la porte lundi à une révision de ces règles. «On aura des discussion­s », a-t-il dit.

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