Le Devoir

Les voisins d’un aérodrome obtiennent un dédommagem­ent

- ISABELLE PORTER À QUÉBEC LE DEVOIR

Dans Lanaudière, un groupe de citoyens vient de remporter une victoire en cour contre l’aérodrome qui s’est installé près de chez eux, à Saint-Cuthbert. Son propriétai­re a été condamné à dédommager chacun d’entre eux pour la perte de valeur de leur maison depuis son arrivée.

Dans un jugement de 35 pages, la Cour des petites créances a conclu que les propriétai­res des résidences près de l’aérodrome subissaien­t des « inconvénie­nts anormaux de voisinage » et que les activités généraient un bruit « excessif ».

Le propriétai­re du Centre récréatif ULM Québec, Guillaume Narbonne, a été condamné à payer 15 000$ en moyenne à dix de ses voisins. Une facture totalisant 140 000 $ en plus des frais de justice et des intérêts.

Ouvert depuis 2017, ULM Québec est un site récréatif destiné aux avions légers (Cessna et autres) situé à SaintCuthb­ert, une municipali­té de 1500 habitants au nord de Joliette. Des tensions avec le milieu sont apparues dès l’acquisitio­n du terrain au printemps 2016, la municipali­té tentant de bloquer le projet. Des manifestat­ions se sont tenues et des députés des deux ordres de gouverneme­nt sont intervenus dans le dossier. Sans succès toutefois, car la loi fédérale a préséance sur

Les plaignants obtiendron­t en moyenne 15 000 $ pour compenser la perte de valeur de leur propriété

le zonage et la loi québécoise en matière aéronautiq­ue.

Dans leur recours, les dix plaignants avancent que les bruits causés par les avions s’élèvent jusqu’à 75 décibels alors qu’à Montréal, par exemple, on demande une diminution de l’évaluation municipale à partir de 55 décibels.

L’un après l’autre, ils ont raconté au juge qu’ils n’avaient plus de plaisir à passer du temps dehors. L’un d’eux, propriétai­re d’un studio d’enregistre­ment, a raconté avoir modifié ses horaires de travail afin d’enregistre­r la nuit, pour ne pas être incommodé par les avions.

En s’appuyant sur l’avis d’un expert en évaluation, ils ont affirmé que leurs propriétés avaient perdu entre 7,5 % et 10 % de leur valeur.

Dans sa défense, Guillaume Narbonne a notamment fait valoir que ses voisins n’avaient subi « aucun dommage parce qu’ils n’avaient pas encore vendu leur immeuble » et qu’un tel centre était au contraire un atout pour la communauté, « surtout économique­ment ».

Or le juge Denis Le Reste a conclu que l’entreprise était bel et bien « responsabl­e des troubles de voisinage ». Il a souligné que la situation était « d’autant plus nuisible et reprochabl­e » que « les partis habitent en milieu rural ».

Joint par téléphone, Gérard Thériault s’est dit très heureux de ce dénouement. « Les promoteurs ont le droit de s’établir où ils veulent à cause de la Loi sur l’aéronautiq­ue, mais il y a des conséquenc­es à ça : ils sont responsabl­es des torts qu’ils causent. »

De son côté, M. Narbonne a réagi par courriel. « Nous venons juste de recevoir la décision et étudions les options qui s’offrent à nous », a-t-il écrit.

Du côté de la municipali­té, on s’attend à ce que l’évaluation à la baisse des maisons entraîne une baisse de revenus. « Ça démontre que la présence de l’aérodrome a un impact négatif sur la communauté », a dit le directeur général, Larry Drapeau.

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