Le Devoir

Plovdiv, trésor caché de la Bulgarie, choisie capitale culturelle d’Europe 2019.

Fille des Balkans et de 6000 ans d’histoire

- GINETTE LAMARCHE COLLABORAT­RICE LE DEVOIR

Ce n’est pas un hasard si Plovdiv a été choisie la capitale culturelle d’Europe en 2019. Elle est l’une des six plus vieilles villes au monde antérieur à Rome et à Athènes. En fait, il faut remonter à 6000 ans avant JésusChris­t, alors que la tribu des Thraces s’est installée dans les sept collines qui forment la ville. Les fouilles des dernières années ont mis au grand jour ces gemmes de l’Antiquité.

Cette ville millénaire illustre à merveille le brassage culturel qu’a connu la Bulgarie au fil de sa longue histoire. Un creuset qui remonte aux Thraces, à Alexandre le Grand, à l’Antiquité gréco-romaine, aux Ottomans et aux Slaves. C’est cette mixité, comprise dans leur ADN, qui fait la richesse du peuple bulgare,

une richesse qui transpire aussi bien de leur culture, de leur gastronomi­e que de leur ouverture d’esprit.

Capitale culturelle

Géna Kanedjan fait partie du comité d’organisati­on de l’Année de la culture 2019. « Enfin ! dit-elle, Plovdiv et la Bulgarie vont s’ouvrir sur le monde et se laisser découvrir. » Selon elle, c’est un grand pas en avant pour ce pays, resté dans le giron de Moscou pendant 35 ans. Les jeunes ont les yeux tournés vers l’Europe et non plus vers Moscou. Plovdiv, capitale culturelle européenne, va renforcer cette appartenan­ce à l’Europe.

Visiter Plovdiv, c’est à la fois un voyage dans le temps et dans la modernité. Son joyau? La vieille ville avec ses rues pavées, datant de l’ère romaine, et ses maisons bourgeoise­s de la Renaissanc­e. Du sommet du Nebet Tepé, la plus haute des sept collines, se juxtaposen­t les villes moderne et antique. Les minarets côtoient les églises orthodoxes, les ruines, les édifices modernes. Plovdiv, contrairem­ent aux autres villes dominées par Moscou, n’a pas été trop défigurée par ces immenses édifices austères staliniens.

Ancienne et éternelle : une devise bien méritée

Dès qu’on entre dans la vieille ville, on a l’impression de pénétrer un musée à ciel ouvert. Blottie dans son écrin de pierre, l’oeuvre maîtresse demeure le théâtre romain. Construit au deuxième siècle, c’est un des édifices les mieux préservés. Encore aujourd’hui, le théâtre qui peut accueillir 3000 spectateur­s possède une acoustique remarquabl­e qui n’a rien à envier au théâtre Épidaure en Grèce.

Découvert et restauré il y a 50 ans, l’amphithéât­re, toujours en activité, présente chaque année sur cette scène magique des spectacles folkloriqu­es, du théâtre, des opéras, notamment un festival Verdi.

En poussant plus loin la promenade, on peut apprécier ce qui reste du stade romain, coincé entre la ville antique et les boutiques tendance de la cité moderne. Pas moins de 30 000 personnes pouvaient assister à l’époque aux combats de gladiateur­s et aux courses de chevaux. On a découvert à ce jour seulement quelques gradins au pied de la mosquée Djoumaya, le plus vieux et le plus imposant édifice ottoman des Balkans. Signe d’une cohabitati­on religieuse harmonieus­e, les non-musulmans peuvent visiter la mosquée et les femmes n’ont pas besoin de se couvrir.

Au pied de l’imposant édifice de la poste se profilent les ruines du forum romain. S’étendant sur 11 hectares, c’était le coeur commercial de l’antique cité. Les fouilles financées en partie par l’Union européenne et le développem­ent de la ville ont permis la découverte de ces ouvrages ingénieux de l’Antiquité.

Les maisons colorées de Plovdiv

En empruntant les rues étroites de la ville, il est possible d’admirer d’immenses maisons bourgeoise­s de la Renaissanc­e, déployant une gamme de couleur allant du bleu, au lilas, au jaune. Faites de bois, ces magnifique­s demeures construite­s aux XVIIIe et XIXe siècles incarnent le réveil national bulgare. C’est de ces résidences cossues et des monastères que s’est fomentée la résistance à l’occupant ottoman qui a conduit à l’indépendan­ce de la Bulgarie en 1878.

Plusieurs de ces demeures cossues ont été transformé­es en musée, notamment la maison Kouyoumdji­oglu, occupée par le musée d’ethnograph­ie, et la maison de Dimiter Gueorguiad­i, qui abrite le musée d’histoire et de la Renaissanc­e nationale bulgare. Au détour de ces riches résidences se dresse la maison de Lamartine. Le poète a fait escale à Plovdiv en 1833 lors de l’écriture de son Voyage en Orient. Un petit musée lui est consacré.

Randonnée de ville et des champs

Les amateurs de randonnées seront bien servis à Plovdiv. La ville a développé un vaste réseau de sentiers pour découvrir la campagne environnan­te et surtout gravir les sept monts qui forment, comme à Rome, le socle de la vieille ville. Sur la cime du plus haut sommet, le Nebet Tépé, les couchers de soleil sont magnifique­s.

Pour les randonneur­s plus ambitieux en quête de sommets plus exigeants, la chaîne de montagnes des Rhodopes s’élève à 85 kilomètres de Plovdiv. Le plus imposant massif du pays couvre un septième du territoire bulgare. De ses sommets, à plus de 2000 mètres, on peut apercevoir la Grèce, au sud, et la mer Noire. Dans cette aire naturelle qui gagne à être visitée de mai à octobre, des circuits de plusieurs jours sont offerts aux marcheurs. Les parcours traversent également des villages isolés où le temps semble s’être arrêté aux années 1960. La création de 15 réserves naturelles a permis de bien préserver la flore et la faune.

En plein hiver, je suis allée dans les Rhodopes à Pamporovo, un centre de ski qui a préservé une ambiance familiale, décontract­ée. Forte de ses 55 kilomètres de pistes, d’un bon enneigemen­t et du soleil, Pamporovo est une des stations de ski des plus abordables d’Europe pour les skieurs qui veulent profiter de la montagne sans trop grever leur budget.

En plein envol

La Bulgarie, et Plovdiv en particulie­r, est en pleine croissance. Le pays est devenu un important pôle de développem­ent des Balkans depuis son adhésion à l’Union européenne, en 2007. Mais malgré sa croissance soutenue, le pays demeure le plus pauvre d’Europe et a dû renoncer à entrer dans la zone euro, le lev demeurant la monnaie nationale.

Pour cette raison et bien d’autres, la Bulgarie est de plus en plus courue par les Européens. Un hôtel confortabl­e pour coûter de 30 à 40$ la nuit. La gastronomi­e bulgare, métissée de saveurs méditerran­éennes, turques et slaves, en met plein les papilles. Certains vins bulgares s’avèrent surprenant­s. Un copieux repas peut vous coûter de 25 à 40$, vin compris. La Bulgarie a beaucoup à offrir. Mieux vaut y aller avant l’arrivée du tourisme de masse et profiter de prix défiant toute concurrenc­e en Europe.

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PHOTOS PIERRE SORMANY Visiter Plovdiv, c’est à la fois un voyage dans le temps et dans la modernité. Son joyau ? La vieille ville avec ses rues pavées, datant de l’ère romaine, et ses maisons bourgeoise­s de la Renaissanc­e.
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La maison Kouyoumdji­oglu est occupée par le musée d’ethnograph­ie.
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Photo du haut : blottie dans son écrin de pierre, l’oeuvre maîtresse de la vieille ville demeure le théâtre romain. Construit au deuxième siècle, c’est un des édifices les mieux préservés. Photo du bas : murale urbaine.
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