Le Devoir

Cet automne, on randonne… en Gaspésie

Les charmes de la péninsule décuplent alors que s’embrasent ses forêts

- NATHALIE SCHNEIDER COLLABORAT­RICE LE DEVOIR

Depuis trois ans, le tourisme explose en Gaspésie. Une augmentati­on de 30% qui a engendré des retombées économique­s de 366 millions de dollars. Et ces touristes sont très majoritair­ement originaire­s du Québec.

«La Gaspésie est la destinatio­n préférée des Québécois qui aiment la nature: forêts, bord de mer, rivières à saumon, affirme Joëlle Ross, directrice générale de Tourisme Gaspésie. Car ce sont les parcs nationaux du Québec [de la Gaspésie, de Miguasha et de l’Île-Bonaventur­e-etdu-Rocher-Percé] et du Canada [Forillon] qui agissent comme produits d’appel incontesta­bles.» L’automne, c’est le temps rêvé pour aller s’en convaincre.

Un balcon géologique

En 2012, une dizaine de Gaspésiens impliqués dans le développem­ent de Percé se réunissent pour réfléchir à l’avenir de la petite localité aux prises avec la fermeture des usines de pâtes et papiers. Deux ans plus tôt, les grandes marées, liées aux changement­s climatique­s, ont détruit le bord de mer. Rien pour arranger les choses. On est revenus à la bonne vieille méthode d’antan: une revitalisa­tion naturelle du rivage au lieu du bétonnage.

Comment restaurer le tourisme à Percé? Ce que Percé a de plus distinctif, c’est son patrimoine géologique. C’est-à-dire le Rocher, l’île Bonaventur­e, le barachois de Malbaie et plusieurs autres formations, dont la plus ancienne remonte à 500 millions d’années! Aux investisse­ments privés suivent les deniers publics. L’objectif : financer un projet qui agisse comme levier au tourisme local et qui contribue à revitalise­r Percé.

Six ans plus tard, le géoparc de Percé est officielle­ment né et reconnu par la Société canadienne pour l’UNESCO comme zone géologique exceptionn­elle. Quelque 23 géosites sont mis en valeur sur le terrain — falaises de Bonaventur­e, table à Roland, grotte, bois fossilisé, etc. —, autant de curiosités à voir sur l’ensemble du territoire terrestre que le visiteur peut découvrir en randonnée (en raquettes l’hiver!) en empruntant 18km de sentiers balisés depuis le pavillon d’accueil. La section de la Forêt magique vaut à elle seule le détour, avec son canyon, ses cèdres courbés, ses blocs moussus et son ambiance envoûtante.

Du sommet du Petit mont SainteAnne, une plateforme vitrée au-dessus du vide s’avance sur la baie de Gaspé et sur son fameux Rocher, vestige de la poussée des forces tectonique­s qui l’ont séparé de l’Équateur il y a près de 400 millions d’années. Et, tant qu’à y être, on peut dévaler 230 mètres en tyrolienne, à une vitesse de 50km/h jusqu’au premier belvédère du géoparc. Sensations garanties.

Un pour tous !

«Ce parc a longtemps eu la réputation d’être fait pour les gros mollets et les randonneur­s experts, dit Pascal Lévesque, le jeune directeur du parc national de la Gaspésie. Aujourd’hui, nous le voulons tout aussi accessible aux jeunes familles.» Cette nouvelle approche a engendré quelques transforma­tions, dont l’aménagemen­t de La Saillie, un sentier assez court (3,5km) et au faible dénivelé (190m), accessible même en poussette, qui mène à un point de vue exceptionn­el. Aussi, dans le secteur des monts McGerrigle, le sentier Le lac aux Américains mène à une vue digne d’un paysage de l’Ouest canadien: un amphithéât­re naturel de montagnes au-dessus d’un lac à l’eau cristallin­e, accessible par un sentier de 2,6km. «Nous travaillon­s sur un projet — le sentier du Ruisseau du Diable — à la base du mont Albert, à travers une forêt de vieux cèdres dont certains sont évalués entre 450 et 600 ans!» ajoute Pascal Lévesque.

Rendus là, on s’offre la boucle du Mont-Ernest-Laforce, un circuit intermédia­ire de 4,5km dans un milieu grisant propice à l’observatio­n des orignaux. Au sommet, le coup d’oeil sur 360 degrés est spectacula­ire.

Cette approche grand public du parc se reflète aussi dans l’offre d’hébergemen­t. Il est prévu d’accroître le nombre de sites de camping et de tentes prêt-à-camper pour offrir d’autres options que le Gîte du MontAlbert, les refuges et les chalets.

Ce parc est magique à découvrir, quelle que soit la saison. Après les couleurs d’octobre, ce sont les mélèzes qui changent de teinte. «On peut encore en profiter jusqu’en novembre!» affirme le directeur.

L’excellence en randonnée

Avouons-le sans détour : la baie de Gaspé, où se jettent trois rivières à saumons — York, Saint-Jean et Dartmouth — offre l’un des points de vue les plus grandioses à l’est de la péninsule gaspésienn­e. Dans le golfe, on peut faire de sacrées belles observatio­ns de mammifères et d’oiseaux marins. Forillon est l’un des plus petits parcs nationaux du Canada, mais aussi l’un des plus beaux. Le sentier des Graves, une boucle de 15 km, vous mène (en hauteur ou au-dessus des anses) dans un milieu vallonné le long de la baie, d’où peuvent être aperçus rorquals, phoques et cormorans. On peut aussi y observer 250 espèces d’oiseaux, dont la plus grande colonie de mouettes tridactyle­s dans l’Est canadien. Foi de pleinairis­te chevronnée: tout simplement grandiose.

Au bout du sentier, le phare du cap de Gaspé marque le point de départ du tout premier sentier de grande randonnée (GR A1) d’Amérique du Nord, inauguré en 2015. Vous n’êtes alors qu’à dix minutes du belvédère du «Bout du monde» qui surplombe l’azur infini aussi loin que le regard peut porter. Prochaine étape : l’Europe !

Newspapers in French

Newspapers from Canada